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Initiation au Jazz

petit guide pour se repérer dans l'univers du Jazz

  • 14 sujets
  • 296 réponses

25 déc. 2015 - 11:40

Alors, le... JAzz... :)
C'est un univers complexe et ancien quand même (plus d'un siècle d'histoire pour un genre quand même très stylisé et expérimental...). Et jusqu'ici la meilleure source de compréhension que j'ai eu c'est un cours de jazz appreciation sur edx. Donc je vais suivre vaguement la trame de ce cours, pour faire simple et rapide.

en cas de curiosité, le cours (ou ses restes) est là:
UTAustinX: UT.8.01x Jazz Appreciation intéressant parceque le prof est au piano et joue des exemples ou autre. (pis c bien construit et court pour tout ce que ça recense)

INTRODUCTION
1)Ecoute
D'abord le jazz c'est donc de l'improvisation. C'est ce que les musiciens de jazz passent leur vie à travailler et performer. Un solo ou une impro c'est un peu raconter une histoire, et on utilise des mots déjà employés par d'autres. Donc on construit un vocabulaire en écoutant d'autres joueurs. Donc en fait indépendamment des genres qu'on aime ou pas on va aussi et surtout considérer le "style" d'un musicien. Par exemple Charlie Parker, saxo époque bebop utilise plein de gammes et d'arpèges, "remplit" ses phrasés. Louis Armstrong va plus jouer avec les accents sur des notes et des phrasés plus simples avec répétition/scansion de notes (le vocabulaire est autant une mélodie que l'utilisation du rythme, durée des notes, emprunts harmoniques, types de gammes etc...). Ca pour comprendre un peu l'esprit. Les grand zikos de jazz on les reconnait souvent en qqs notes, si on les a un peu écoutés. Et ils ont souvent des signatures, genre poser qqs notes de "oh when the saints" ou autre comptine, tirer sur les aigus ou faire vibrer de longues notes à mi volume, pousser des bruits ou sons d'animaux... Miles Davis, Parker, Armstrong, etc... ont des styles très reconnaissables. Et qq part, plus que le morceau lui même c'est vraiment cette "voix" ou le jeu d'interaction entre zikos qu'on va écouter. La manière dont l'histoire est racontée, ou dont on construit les phases narratives, le suspense, l'explosion etc... On écoute un chant de l'instantané plus qu'une chanson. Et ce même si certains compositeurs ont par ailleurs laissé de très belles chansons et compositions. Et arrangements, en particulier à l'ère big band et swing. Chaque version est unique, en Jazz. Ca rend la reprise tout à fait créative, et il n'est pas rare d'avoir de nombreuses versions d'une reprise par un même artiste avec des groupes différents.
2) les formations
Ensuite, la formation instrumentale, on a eu droit au grand orchestre surtout durant l'ère swing, quand le jazz était LA musique de danse jouée dans les clubs à la mode de NY et qqs autres big cities, et peu à peu on est allé vers une section rythmique "batterie, piano, (contre)basse, guitare". La basse marque le pulse, souvent sur le temps (arpèges et chromatismes), ou en ternaire on joue souvent la croche en plus. La batterie à la base ct joué par plusieurs personnes sur des tambours isolés et le jeu s'est complexifié à partir de là une fois sur batterie moderne. Le piano a la charge de communiquer l'harmonie. On a souvent la main gauche qui fait la base de l'accord et la main droite qui improvise à moitié, au moins rythmiquement (ou en augmentant l'accord). Souvent avec le "question/réponse" qui vient des origines du jazz et du blues. La guitare a un peu le même rôle, et agrémente la progression avec des accords, souvent assez discrets, ou en "comping", une sorte de pompe pas très élognée de la pompe manouche. Charlie Christian à l'ère bebop, grand guitariste de Jazz en solo, se fait souvent simplement entendre ainsi sur les enregistrements de Charlie Parker (quand elle n'est pas l'instrument qui fait le solo).
Après la section rythmique, (quartets et quintets en restent souvent à cette formule simple et assez "rock" dans l'esprit moderne) on a la section de front, avec tous les cuivres. Traditionnellement si par exemple le trombone était plus utilisé comme une ponctuation dans le discours des cuivres, la trompette et le saxophone sont restés les solistes symboliques. Ils exposent donc la mélodie, puis improvisent et discourrent. Il va de soi que l'écoute est donc assez complexe (comme elle l'était dans le classique et l'orchestre symphonique, mais l'improvisation et le "chant" en plus...)
3) formes classiques
La composition, surtout dans les "classiques" d'avant les années 70 est souvent organisée autour de 2 formes, le blues, qui ne ressemble pas vraiment au blues le genre musical (les 4 accords,, la pentatonique et le son chicago blues on oublie), mais qui récupère la composition pour la complexifier harmoniquement. On retrouve les 12 mesures, mais c'est en fait 3 phrases de 4 mesures. La première et la seconde sont généralement identiques, et la 3ème constitue un "commentaire" après lequel on relance la boucle d'accords. "Everyday, Everyday i have the blues X2 because it's you i have to lose" (joe williams et l'orchestre de count basie).
L'autre composition classique c'est le AABA, A étant le même, B étant différent en général plus enlevé. En solo il est important d'arriver à "entendre" ce genre de carrures, pour s'y retrouver. Un "chorus" en jazz, c'est une unité de longueur qui se compte en mesures... 12 mesures pour le blues par exemple, ou 32 sur un AABA (16 mesures fois 2).
Bien sur il y a beaucoup d'autres formes, ce sont des exemples "repères", en particulier sur l'histoire ce qui est une forme classique ou pas.
4) les zikos "jazz"
Les musiciens, eh bien les groupes se font et se défont, les jeunes font leurs premières armes auprès des grands etc... globalement, en piliers historiques, y'a dans les années 40 le groupe de Charlie Parker (bebop, saxo alto) qui verra passer pas mal des zikos des années 50/60 (dizzy gillespie(trompette), thelonious monk(clavier) et parker avaient joué pour earl hines et ont fait les pages du bebop ensemble, puis miles davis remplacera gillespie dans le groupe quand ce dernier fera sa carrière solo etc et ainsi de suite...)
Miles Davis (trompette, genres variés) ensuite (à partir de 50 en leader de groupes), qui enregistrera et jouera avec les stars des années 60 à aujourd'hui.
Coltrane dans les 60's qui créera quantité de vocations après une "illumination" en 57, la perspective mystique et le jazz se mêlant dans son discours, sa philosophie, et la recherche de "plus" de possibilités sur son instrument (on trouve le mysticisme chez qqs uns après, kenny garrett par exemple).

LES GENRES
I Années 40 à 80 et plus tard...

Hard Bop
Bref une fois ça un peu débroussaillé, le genre de jazz le plus accessible est probablement le "hard bop", qui se jouait beaucoup dans les années 50. C'est un jazz qui emprunte énormément au rythm and blues (le travail de la batterie), au gospel ou au blues (surtout les claviers, il donnera le "soul jazz"). Il est plus facile à écouter que le bebop des années 40 (charlie parker, dizzie gillespie écouter "Shaw Nuff" ou "salt peanuts" par exemple etc...) qui était une musique "extrême", pleine de notes et d'entrelacements de gammes à toute vitesse, tempos rapides, généralement le jazz que le grand public ne supporte pas (musique des "hipsters" de l'époque, sur fond de prohibition, drogues, et étudiants allumés, genre Kerouac qui en parle sans arrêt dans "sur la route" etc... Kerouac a chanté du "cool" aussi d'ailleurs... Et Vian était croner et trompettiste, pour montrer combien le jazz participa à l'histoire culturelle). En Hard bop on peut prendre l'exemple de "Moanin" de Art Blakey and the messengers (il est batteur), ou "Song for my father" de Horace Silver (qui est pianiste).
Cool Jazz
Il y avait de facile à aborder aussi le "cool jazz", souvent joué par des blancs, plus lent et "ambiance". Le "hard bop" fut d'ailleurs une réaction noire et soulful à ce marché parfois un peu factice. Quelques grands musiciens à écouter là dedans aussi cependant. exemple "take five" de Dave Brubeck (pianiste). Je conseillerais aussi Stan Getz, saxo ténor, qui se plongera ensuite dans les musiques brésiliennes et popularisera Astrud et Joao Gilberto (bossa nova) en 62. Chet Baker, un autre grand nom de la trompette, chanteur timide mais sensible quand il lâche la trompette. Crooner lover en gros, ballades et compagnie.
Et il est à noter que le cool est par tradition né en 49, "birth of the cool" un album écrit par Miles Davis (trompette) à 34 ans.
Miles Davis
Après être devenu célèbre dans le bebop comme musicien de charlie parker, dizzy gillespie, Charlie Mingus (contrebassiste, dont le groupe sera intéressant, à cheval sur toutes les influences durant les 50/60, compositeur de morceaux complexes et narratifs, chef d'orchestre talentueux écouter par exemple le disque "mingus ah hum", la chanson "fables of faubus", la reprise de "moanin"etc...) Après l'épuisement les drogues etc... il a voulu faire "son" propre jazz, et a formé un nonette (9 musiciens, entre big band et formule rythmique du quartet) avec Gil Evans aux arrangements (c'était un talentueux et sensible arrangeur...). Mais l'album n'est sorti qu'en 57, et le groupe dissolu assez vite (on y retrouve gerry mulligan, saxo baryton, qui a eu de super moments avec chet baker). Le genre "cool" met du temps à s'imposer, entre temps Miles Davis a découvert Paris, Juliette Géco qui a failli être sa femme (mais aux states ct impensable et l'océan séparait leurs carrières). Après l'impression d'être traité comme un être humain à Paris, il retombe dans l'héroïne à NY. Il joue pas mal à cette époque avec Sonny Rollins (saxo ténor), Cannonball Adderley (saxo alto et parfois soprano) (je les recommande, c'est souvent du hard bop). Bill Evans, un jeune pianiste hyper talentueux et au toucher très sensible, qui a un style un peu à part, et John Coltrane qui deviendra un icone à la décennie suivante.
Jazz Fusion
Miles à partir des années 60 (après des formations de groupe le temps d'un album en général) a à ses côtés les grand noms du futur "jazz fusion" des années 70 80; Herbie Hancock qui fera du jazz funk (piano, exemple l'album head hunters) et qqs "cantaloupe island", Wayne Shorter(sax, a joué avec Art Blakey, et le groupe weather report 70's/80's), Chick Corea (piano, le groupe return to forever, jazz rock et latin jazz), John MacLaughlin (guitare, groupe mahavishnu orchestra), Keith Jarrett (multi instrumentiste, mais surtout célèbre pour le piano et son style très mixte, genre "koln concert", super disque), Joe Zawinul (claviers, Weather report), Kenny Garrett (sax, en leader cepuis 84, tu peux écouter l'album "song book"). Miles fut très influencé par Hendrix (légende qu'ils allaient former un groupe...) et se dirigea vers le rock fusion et les expérimentations sonores très diverses. Après les années 80 il touche vraiment à tout, fait des reprises pop, touche au rap sur le dernier album etc...
Miles conclusion
Miles après ses débuts bebop (on le reconnait déjà en fait) il faut écouter l'album "Kind of blue" de 59 (reconnu comme son chef d'oeuvre, bill evans au piano, Coltrane au sax etc...), la musique de ascenseur pour l'échaffaud pour le style et le son, la manière de poser des ambiances même au ciné, milestones de 58 pour le jazz modal (le morceau notamment, ou "so what" dans kind of blue, un morceau célèbre articulé sur 2 accords, chacun durant plusieurs mesures), "bitches brew" de 70 pour la curiosité, "great expectations"ou "lonely fire" dans l'album "big fun" sorti en 74 (sitar, tablas etc... y'en a aussi dans "orange lady" de bitches brew, toujours par curiosité) et pis au feeling pour la suite.
Free Jazz
Le "free jazz" a été développé surtout par Ornette Coleman ("Free jazz: a collective improvisation" en 1960) ; et influencera beaucoup une grande partie de la scène à venir. La tendance dans les 70's est au jazz fusion et les sonorités de claviers etc (parfois de bons trucs inspirés funk ou latin)... ou au free, qui sert un peu de toile de fond au révolutions sociales étasuniennes. Le "free" se déleste librement du carcan du tempo et de l'harmonie. Toute dissonance est permise, les notions de base de la musique sont mises de côté selon humeur ou besoin d'expression etc... C'est donc une autre tendance du Jazz qui est peu accessible à certaines oreilles délicates ou formatées. Et honnêtement on trouve de tout, la scène a eu un peu tendance à devenir fatice dans certains cas.
Coltrane
Coltrane, qui s'est intéressé au free (et adorait ravi shankar, il a nommé un fils Ravi), qui joue énormément de notes en général, discours très "plein", on va retenir par exemple "giant steps", 59, "my favorite things", 60, et "a love supreme" en 64, reconnu comme un des plus grands albums, et déjà dans un esprit différent du jazz qui précède. Plus traditionnel, "ballads", ou "Duke Ellington and John Coltrane" avec Duke Ellington en 62.
SYNTHESE
Bon pour ces 40 ans d'histoire, je conseille le hard bop (sonny rollins, art blakey, cannonball adderley, horace silver etc...) et le cool jazz en premier (stan getz, chet baker, dave brubeck etc...) qui sont les plus "faciles" à écouter, avec de jolis morceaux et mélodies. Forcément ça fera écouter Miles Davis avec "birth of the cool" et les albums des années 50 (milesstones, kind of blue etc...). Je ne pense pas que le bebop te séduise au premier abord, ni spécialement le free jazz ou le jazz fusion des années suivantes (qui prend autant au funk qu'aux sonorités éclectriques, nouveaux claviers, dissonances etc... et d'un groupe à l'autre varie bcp... on aime ou pas, y'a de tout et faut tester quand on est d'humeur... les noms cités sont quand même à connaitre et ont laissé des trucs sympas parfois). Au pire tu peux tomber amoureux d'un son particulier, comme bcp y sont passés en suivant coltrane par exemple, ou miles.

Il y a beaucoup de branches de jazz, j'ai cité celles qui semblent les plus importantes et influentes.
On peut aussi noter le "third stream jazz" (fusion classique/jazz qui fait un peu suite à des travaux de debussy, bartok ou stravinsky), pour faire le lien avec l'europe et son influence intellectuelle sur une musique qui née de la rue est devenue poésie et objet intellectuel des Etats Unis.

Enfin on peut noter que la tendance moderne est soit de suivre sur des expériences plus ou moins classiques ou hasardeuses, de la pop au free le plus horripilant en passant par des disques super doux et intimistes(des figures modernes et très prolifiques: par exemple michael brecker, saxo, ou pat metheny, guitare, 2 piliers 90's à aujourd'hui).
Soit la recherche de la tradition, le Jazz Néoclassique, qui reprend les origines fidèlement mais en "propre", du New Orleans dixieland aux grands standards en orchestre du swing. (l'impressionnant trompettiste Wynton Marsalis qui joue aussi bien les concertos de bach que le son spécifique de louis armstrong (2 albums de reprises/imitations du maitre, avec un son moderne...) ... outre le fait d'être le directeur de l'orchestre de NY, il a enregistré un disque de classiques avec clapton et orchestre par exemple...)
Ensuite il faut être conscient de la scène Européenne... Où les emprunts musicaux à divers genres pullulent avec de petits chefs d'oeuvre. Jan Garbarek le saxophoniste par exemple a de supers morceaux, des enregistrements avec anouar brahem avec tablas et oud, ou la chanteuse nordique Mari Boine etc... Erik Truffaz à la trompette qui fait du jazz imbibé de touches électros ou de fusions world (en france on a aussi magik malik à la flute qui est délirant, ou ibrahim maalouf qui est peut être plus producteur/compositeur parisien que jazz mais joue une trompette à quart de ton pour les gammes arabisantes que son père avait inventé, vient de sortir un opéra jazz avec Oxmo Puccino, philippe catherine, super guitariste, etc...), Krakauer qui joue du répertoire klezmer (juif traditionnel europe de l'est) et parfois introduit des beats hip hop et joue avec un rappeur, A l'époque les "jazzmatazz" du rappeur Guru avec divers musiciens jazz etc... (sans compter les figures comme django, ou nougaro qui prend tout dans le jazz, par exemple son hommage "herbie hancock" c'est la grille de cantaloupe island... ). Ou les autres scènes, par exemple Mulatu Astatke en éthiopie, la bossa nova brésilienne etc... Et les dérives pop ou électro "jazzy": L'électro swing(caravan palace), l'ambient "lounge" jazzy (une partie des "buddha bar" et "café del mar"), le rap cool jazz de nujabes, une certaine influence trip hop (tricky, goldfrapp...), le smooth jazz à la Sade etc...

Prochain épisode, les origines et l'ère Swing.

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