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Une fleur deux sels

Lumeï et Cassiopée

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16 déc. 2015 - 16:54

Lumeï

Toujours de cette rapidité invisible à l'humain, le phénix arrive en effleurant la cime des arbres. La traînée multicolore dessine sont chemin parcouru. Comme cette histoire des petits cailloux que les grands humains racontent aux plus petits.
Le phénix sent la douce odeur de l'océan qui parfume l'air agréablement. Puis, l'odeur des fleurs sur le bord de la Terre chatouillent ses ailes, son âme. Phénix frisonne. Il volète en contrebas maintenant pour saluer les arbres et vient se poser aux racines d'un des plus anciens.

*Que par ta sagesse je me transforme.*

Le phénix regarde l'arbre.
Puis, sa forme s'allonge, se grandit progressivement en un flouté surprenant. Quelques lumières vont se perdre dans le jour sur l'océan sur le bord de terre. Sur les bords du monde qui grandit.
Dépassement de la taille initiale du phénix.
Les ailes se transforment en bras d'enfant et les pattes, en petits pieds nus.
Puis, la brise qui faisait danser les plumes de l'oiseau s'occupa alors des cheveux de l'être.
Du phénix, seules l'âme et la couleur des yeux demeurèrent. Mais ce détail imperceptible, peu d'humains avaient su le déceler.
L'enfant est vêtu d'une simple tunique beige.
Il lève la tête. Observe. Attend.
Il ramasse des cailloux et les place sur le sol de façon à donner forme à un phénix.
Ensuite, il se dirige vers les bruissements réguliers de l'étendue d'eau; là où se rencontrent le Ciel et la Terre.
Il s'assoit. Trempe ses pieds dans l'eau froide du petit matin. Puis, son regard.
Son regard se perd vers l'horizon. Dans le lointain qui a la couleur des bleuets.
Son âme survole l'eau.
En attendant.
En attendant la Dame-étoiles.
En l'attendant, il écoute le Monde qui parle des Choses et des Hommes.



Cassiopée

Dans les sous-sols des palais du Sang, Cassiopée avait œuvré à protéger les êtres, l’esprit en suspension vers un cheminement ensoleillé. Il n’avait pas failli dans le temps et avait conservé sa beauté attirante.

Seule, à présent, Cassiopée peut enfin se consacrer à la perception fascinante qui s’est attachée à elle. Elle n’a qu’à fermer les yeux pour sentir la longue trainée de lueurs. Elle s’ouvre à elle comme un long chemin à parcourir.

Et elle décide son départ.

Prenant son souffle, elle pénètre en elle-même jusqu’à atteindre les marques laissées par l’être venu tout comme elle des cieux. C’est un recueil au plus profond d’elle pour atteindre une porte de sortie. Celle qui lui ouvrira la voie pour suivre les lueurs tracées par Lumeï.

Son souffle est court lorsqu’elle entame la course. Le voyage est peut-être long ou peut-être très rapide. Elle ne perçoit que la douceur des étoiles sous ses pieds, elle poursuit les cieux.

Le chemin la mène tranquillement vers le rivage. Elle semble marcher sur l’océan pour se diriger vers l’enfant seul, les pieds dans l’eau.



Lumeï

Des pas, derrière, frôlent la Terre puis les petits cailloux. Clapotent dans l'eau.
La Dame-étoiles s'assied à la droite de Miel puis elle observe à son tour l'horizon d'eau et d'air.

Dans un murmure Miel lui glisse :

- Tu as fait vite. Comment fût ton voyage ?

Silence que le vent efface. La Dame laisse quelques instants se poser entre leur échange.

- Étrange petit garçon, étrange. Un instant. Tu es donc Miel.

L'enfant sourit. Une fleur nait quelque part.
La Dame est d'un calme olympien. Apaisée.

- Il m'a dit que tu me cherchais, explique-t-il.
Je ne suis qu'un enfant mais en quoi puis-je t'aider créature des Étoiles ?

Une lueur malicieuse s'ajouta à son regard comme un monde entre-ouvert.
L'enfant leva la tête et regarda au-dessus de lui puis la tourna vers la Dame. Il l'a regarda et attendit sa réponse. Sa demande ou son souhait. Une attente impatiemment curieuse de celles que nous avons, les yeux grands ouverts sur les Néantes. Toutes les Néantes. Sur l'insondable et le devinable. Les Humains appellent cela le Savoir. Miel appelle cela les hypothèses.

Quelques poissons semblent s'amuser de l'air en lui sautant dessus. Peut-être veulent-ils l'attraper pour lui faire visiter l'océan.



Cassiopée

Au moment délicat où Cassiopée toucha le sol, elle se sentit sortir d’un rêve. Le chemin qu’elle venait de parcourir n’était que songe ou déplacements inter temporel et spatial étaient le fruit d’une volonté dont elle n’était pas le maître. Elle n’avait fait qu’accepter emprunter une route qui s’ouvrait à elle. Elle en gardait l’impression brutale d’un retour à une réalité tout aussi surprenante.

Devant elle, un enfant était installé sur le quai le plus à l’Ouest de Galvorn. Un lieu assez sordide la nuit mais complètement déserté le jour.
Il était seul, les pieds dans l’eau, mains posées sous ses cuisses. Il contemplait les poissons qui venaient se frotter à ses doigts de pied.
Mais l’enfant l’attendait et se mettait à sa disposition. Or si la Dame du Sang se référait aux informations apportées par le Phénix, Miel était enfant de l’Univers et il avait la faculté de voir les choses aveugles aux Hommes.

Elle s’approcha de lui jusqu’à le toucher et sentir le doux velouté de la peau enfantine.

-L’être de Lumière, Lumeï, m’a assuré que tu étais enfant du Mystère et que peut-être tu accepterais de me conduire là où je ne peux aller seule.

Elle s’était tue avant d’aller plus loin dans ses explications. Son esprit attendait la certitude que l’enfant était bien le guide qu’elle espérait.

Mais elle n’eut pas à attendre bien longtemps. Miel s’était levé et avait enfoncé ses mains dans les profondes poches de sa tunique. Ses pieds nus avaient déposé des petites flaques d’eau sur les larges dalles en bordure du quai.
Il la regardait, la tête un peu de côté, sans s’impatienter. Une attente tranquille de celui qui sait que chaque chose vient à son heure.

Alors, Cassiopée formula son souhait :

-Peux-tu me conduire vers le Phénix ?



Lumeï

L'enfant reçu les paroles de la Damétoiles. Sa tête était levée de façon à ce que ses yeux puissent totalement communiquer en regard.
Un instant d'attente.


- Oui, il m'a dit que tu voulais le voir.

Un autre instant à écouter le vent se lever légèrement. En touches fines et douces. Nuage léger de pluie fine qui se déverse. Une minute s'écoule. Laissant les brins de soleil serpenter entre les gouttes.
D'un coup, le monde brilla plus.
Puis, la pluie fine s'arrêta. Soleil plein. Soleil partout. Le monde brille couleur neige. Qui fond. Fond.


- Je vais te répondre. Probablement seras-tu surprise de ce que je t'apprendrais. De la facilité avec laquelle nous pouvons le trouver, lui parler. Peut-être. Toi seule en jugeras, astre brillant.

La voix de l'enfant laissait supposer qu'il allait révéler quelque chose. Mais quoi ? Mystère suspendu qui chatouille la patiente. Ah, l'herbe frémit. Frémit comme eau qui bout. L'eau, l'herbe et le vent. Nos quelques gerbes de temps entre la Damétoiles et l'enfant.


- Je crois que tu peux te rasseoir. Je dois te raconter une histoire.

L'enfant n'attendit pas quant à lui. Il se dirigea de nouveau vers les vagues de mer et laissa glisser ses petits pieds nus en leur chair tantôt blanche, tantôt translucide.


- Damétoiles, je ne t'apprendrais rien en te disant que Lumeï est un phénix, être de couleurs de vies.

Miel regarda au loin, devinant le hochement de tête de Cassiopée.


- Bien. Te souviens-tu ce jour de ta première rencontre avec Phénix ? demanda l'enfant.

Cette fois-ci, il observa la réaction de la Dame, la fixant de ses yeux sans peur, curieux et sages. Dans son regard, il vit qu'elle se remémorait les images de leur premier contact tant inusité. Un sourire ébauché. Un fil de jour entre les feuilles d'arbres qui volent sur la bordure de mer entre Cassiopée, Miel, le ciel, la terre et l'eau.


- Oui, je m'en souviens, répondit-elle.


- Tu te souviens donc de la manière dont il s'est adressé à toi ainsi que tes compagnons. Afin de pouvoir parler aux êtres qui ne savent user du langage de l'univers, il doit emprunter leur voix et parler leur langue.

Silence. La mer chante le ciel.


- Ainsi s'exprime-t-il.

Miel regarde une mouette planer indolemment. Quelque part, la mer est la terre des oiseaux d'eau.


- Le phénix aime parcourir l'univers et les Néantes qui le compose. Il aime découvrir ces petits Néants parsemés d'êtres et de langages, de couleurs et de sons. Toutes ces différences, il veut les connaître toutes. Et toutes les ressemblances, quand les êtres meurent pour les construire. Le phénix observe. Il observe. Toujours. Il voyage. Beaucoup.

Qu'y avait-il dans les yeux de la lune quand le soir danse à retrouver les étoiles. Il en une de ceux qui connaissent la réponse : la Damétoiles.


- Peut-être vais-je t'apprendre quelque chose. De cette même manière, pour intégrer et observer les univers qu'il parcourt, Lumeï se transforme en être de Néante. Comprends-tu ?

Miel attendit afin que Cassiopée reçoive entièrement son discours.



Cassiopée

Un instant, le temps que deux regards se pénètrent, la Nature avait semblé plus grande, plus envahissante. Elle avait montré ses nuées, ses lumières ; avait dégringolé le ciel pour se déverser sans complexe aux pieds des deux êtres, curieux l'un de l'autre.

Puis les mots, presque brutaux, s'étaient chargés de communiquer. Ils étaient le retour vers la matière - le solide - Les mots matérialisaient une relation naissante. Ils cristallisaient ce que la mer chantait au ciel.

Le Vent, sans se presser, paradait sur les flots. Il caressait les épaules de Cassiopée et soufflait une douce brise des mers du Sud sur le cou nu de Miel.

Miel évoquait le phénix dont le voyage semblait la priorité.
Cassiopée suivait sans se perdre chaque détail exprimé. Quand elle prit la parole, elle dit :

- Je me souviens très bien de ma première rencontre avec le phénix. Nous étions égarés au fond d'un rêve qui n'en était peut-être pas un. Le phénix est alors apparu comme sorti d'un autre songe et s'est adressé à nous dans notre plus profonde intimité. Un instant, Sanz et moi avons été enveloppés par notre propre miroir et nos mots étaient ceux du phénix.
Tu sembles tout connaitre de Lumeï. Comment cela se fait-il ?


Elle s'était avancé jusqu'à dépasser les quais et Miel l'avait suivie.
Puis, elle avait quitté les contreforts de la cité pour escalader la dune. Elle avait tourné le dos aux flots et contemplait l'immense steppe qui se déroulait vers l'horizon terrestre.
La steppe aux couleurs orangées était parsemée de grandes auréoles d'un vert tendre et cernées de hautes herbes. Ces disques lumineux s'étalaient jusqu'à la forêt lointaine.

Vers l'Est, on entendait les remous de la Ville de Galvorn et des manutentions portuaires. Brouhahas lointains que recouvraient les pulsations lentes de la houle.

- Qu'appelles-tu : "Néantes", Enfant ?



Lumeï

Les bruits de la ville, des bateaux. Quelques rires et paroles criées les uns aux autres, très lointain que le vent leur portèrent.

Miel avait écouté cette impression très personnelle de la première entrevue de Cassiopée, de Sanz, de l'elfe avec le phénix. Puis Miel, qui était en quelque sorte ce phénix, s'amusa des yeux de la Damétoiles.
Cassiopée lui fit un signe de la main, l'invitant à la rejoindre en direction des terres. Miel laissa son regard se perdre encore quelques instants sur la a surface de la mer comme à glaner ses dernières couleurs puis se frotta les mains. Il la rejoignit. Dans ses pas silencieux emprunts de respect, il la suivit. La Damétoile se déplaçait avec une grâce surnaturelle. Chaque geste portant une pointe de maturité.

Miel continuait encore son observation terrestre. Un lézard qui court très vite. Image qui file devant les yeux de l'enfant pendant que lui-même ouvre ses oreilles à la Damétoiles.

Chaque merveille terrestre et extraterrestre se gravait dans la mémoire de l'enfant comme une sculpture dont les traits s’éclaircissent au fur et à mesure du travail de l'homme au maillet et au burin. Le monde est un artiste.
Les deux êtres magiques marchaient sur un sentier étroit. Il devait probablement être assez peu pratiqué par les humains. Merveille qu'ils manquaient sans doute à ne pas arpenter.

Brisant ce silence parolier, la Damétoile s'adresse à l'enfant aux pieds nus :

- Qu'appelles-tu : "Néantes", Enfant ?

Visiblement, Cassiopée réfléchissait depuis à cette notion particulière. Elle semblait avoir soif de chaque information qui pouvait la décrire. Comme si chaque fois que Miel lui en donnait de nouvelles, elles ne semblaient apaiser sa curiosité.
Sourire léger du coin des lèvres sur son visage aux traits simples.


- Les Néantes sont propres à chaque être qu'il soit humain, extra-humain ou magique. Ou un peu des deux, dit-il avec un rire léger derrière les mots. Chaque être a sa propre Néante, son propre monde dans lequel elle y place la profondeur de sa façon-d'être, son savoir, ses rêves, ses envies. Les Néantes sont les mondes de l'intimité. On ne peut y mentir. Nos âmes y sont vraies, toujours.

L'enfant réalisa trois grand pas pour se mettre à la hauteur de la Damétoiles. Il débordait légèrement sur les herbes qui bordaient le maigre sentier.

- La Néante de l'autre n'est accessible que dans le seul cas où celui-ci nous ouvre ses portes.

Respiration.

- La Néante est une profondeur d'âme qui s'apprivoise, un peu.

Les deux êtres étaient arrivés jusqu'à un coin d'eau. Un étang de petite taille. De magnifiques roseaux sortaient d'eau à caresser le ciel. On pouvait écouter le croassement d'une grenouille qui conversait probablement à convaincre les poissons de venir voir le soleil du bout de l'étang à l'air libre.
Miel se dirigea vers l'eau opaque. Elle avait la couleur chaude de la Terre. Une sorte d'entre eau-sol, intéressant mélange.


- Toi aussi tu as ta propre Néante. Je pense que tu le sais.

Ces paroles étaient destinées à Cassiopée.
L'enfant s'assit au bord de l'étang à contempler les plantes aquatiques nager, pencher, se noyer. La Dame le rejoignit à sa droite.


- Je dois chercher un livre. Souhaites-tu m'accompagner ? Il n'est pas trop loin d'ici.



Cassiopée

Cassiopée n’avait pas répondu à Miel lorsque celui-ci l’avait invité à considérer son propre monde. Elle était entrée dans ses Néantes le temps sentir son cœur battre au rappel de son intimité. Un bref instant, Miel avait disparu du champ de sa perception et était devenu une image lointaine tant la force de ses Néantes l’avait envahie. Oui, Cassiopée savait les conséquences du retrait sur soi et elle ne laissa pas la bulle mentale s’emparer de ses pensées. L’instant fut rapide et elle enchaina très vite en répondant à Miel :

- Un livre ? Ici ? Je suis surprise, mais pourquoi pas… Je t’accompagne Miel. J’aspire en ce moment à te connaître mieux. Que m’offres-tu ? Un voyage ? Une excursion ? Une tasse de thé dans tes appartements ? Quel livre recherches-tu ?

Elle s’arrêta là.
Elle aurait pu formuler des questions sans s’arrêter car sa soif de connaissance semblait stimulée par la présence de cet enfant et l’évocation du phénix.

Elle ajouta cependant :

- Pourtant, avant qu’on ne parte d’ici, je voulais te montrer le lieu où nous nous trouvons. Vois-tu ces cercles formés par la Nature au-delà des étangs ? Ils ressemblent à des traces circulaires laissées par un monstre. Vois-tu, chaque disque est recouvert d’une flore d’un vert tendre et sa circonférence s’est habillée pour l’occasion d’une chevelure bleutée qui vole sous l’effet de la brise. On les appelle ici les cercles de fées. La mémoire populaire se plait à évoquer des danses mortuaires les grands soirs d’équinoxe. Rares sont les personnes qui s’aventurent sur ces terres hantées.

Déjà, Cassiopée s’était détournée du paysage féérique qui s’étendait par delà la lagune, toute à son attention pour l’enfant qui l’accompagnait.

-Je te suis Miel.



Lumeï

L'impatiente curiosité sembla d'un coup se précipiter aux bords des lèvres lumineuses de la Dame.

- Un livre. Il n'est pas trop loin. Mais pas si près non plus. Je pense qu'il faudra une vingtaine de jours pour parvenir au lieu précisément.

Cassiopée savait que le temps n'était pas un obstacle au phénix. Probablement sa patience provenait-elle de cette relation que cet être avait noué avec le grand Temps. Un mois. Une année. Qu'importe la durée, pour le phénix aux vies éternelles qui se réalisent les unes après les autres, le temps humain n'a pas cette signification au yeux, à l'âme du Phénix. Cela, Cassiopée le savait.
L'enfant se leva et partit derrière un long arbre planté à côté de l'étang. Il s'agenouilla et ôta feuilles et branches qui recouvrait très discrètement un trou à abriter. A abriter une sacoche. Le petit être s'en saisit et passa la bandoulière au-dessus de sa tête. Il se retourna vers la Damétoiles, un sourire aux yeux :

- Je suis prêt. Souhaites-tu que nous récupérions des choses en ville? Ou alors pouvons-nous entamer notre périple à ouvrage ?

Cassiopée lui jeta un regard. Elle mit la main dans son corps qui se perdait en lumière. Elle la glissa dans sa cuisse. La main sembla disparaître et pourtant elle la matérialisa à nouveau, accrochée à une trousse. La Damétoile la prit à deux mains.

- Voici déjà et cela me suffit à voyager sans crainte.

Cassiopée rangea la trousse de la même manière dont elle s'était emparée de l'objet en question.

- Partons, donc Amidétoiles, prononça-t-il, se permettant un ultime coup d’œil à contempler les cercles de fées.

Il entama le premier pas. A s'engouffrer sur les terres. A frôler un chemin invisible où pourtant brillait la détermination de Miel en son regard. Cassiopée le rejoignit, marchant au même rythme.

- Damétoiles cherchant à me connaître, tu seras servie. Car cet ouvrage que nous partons quérir raconte la naissance du Phénix. Tu sais que je suis une matérialisation humaine de celui-ci.

La Dame restait toute ouïe.

- Cet ouvrage est tombé entre des mains qui ne devraient tenir mon histoire. Je vais donc chercher un bout de moi pour le replacer en son socle supposé.

Miel lui avait révélé les raisons de cette recherche. Il lui semblait légitime de les lui partager, Cassiopée étant devenue son compagnon de voyage. Ce secret partagé lui sembla être une preuve de confiance et d'amitié. Et elle avait raison de le penser puisque c’en était.

Leurs deux silhouettes fines dansèrent au loin sur l'horizon déjà né. Le jour se prononçait alors. Et les oiseaux chantèrent un hymne au voyage de l'enfant-au-pieds-nus et de la Damétoile.
Dans l'univers, le Phénix poussa cri fin en son langage. Que d'autres êtres magiques parviendraient peut-être à écouter. L'âme ouverte.



Cassiopée

La marche avait un goût d’irréel pour Cassiopée. Elle se tenait aux cotés de Miel en silence. Ses pas s’emboîtaient dans ceux de l’enfant. Les mots étaient devenus inutiles car ses pensées rejoignaient le Phénix dans l’infini Cosmique.

Les deux êtres avaient leur point d’ancrage au-delà du monde terrestre et ils communiquaient par d’autres biais que la parole. Le Verbe n’est qu’évocation sommaires des véritables contenus. Leur langage n’utilisait pas les mots, il se modelait au travers des Vents sidéraux et des Lumières célestes.

En communiquant avec Lumeï, Cassiopée découvrait la créature dans son déploiement et elle-même oubliait la dépouille fragile de son corps d’humaine.


Elles avancèrent ainsi le long du jour sans s’interrompre pour manger, leurs pas étaient légers et s’enfonçaient peu dans le sol ameubli par les pluies de nuits passées. Le soleil montrait son nez derrière quelques nuages volages. La route était aisée.

Cependant les corps sont périssables et il ne fallut pas plus de ces quelques heures pour rappeler aux silhouettes frêles que prendre un repas était indispensable.

Constatant le chemin parcouru, Miel et Cassiopée prirent conscience qu’ils s’étaient profondément enfoncés dans la vaste plaine marécageuse. L’itinéraire qu’ils avaient suivi était un ancien talus qui surplombait la tourbe environnante. Mais à présent ils se trouvaient au pied d’une colline surplombée d’un tas de pierrailles.

En arrivant au sommet, Cassiopée sentit le vent frais glisser sur ses épaules en même temps que la pénombre. Quelques passes adroitement formulées du bout des doigts la revêtit d’un manteau nuageux qu’elle partagea avec l’enfant. Mais la faim commençait à lui crier son existence.

Observant la nature qui les environnait, elle attendit et Miel s’assit en tailleur dans la même position patiente.
Attirés par la présence des deux êtres, un lapin curieux fit une apparition, trop courte pour être envisagé comme repas. Mais il revint un moment plus tard et cette fois-ci le bras de Cassiopée se déplia d’un geste si prompt qu’un simple éclat fut lisible. La Dame du Sang se leva tranquillement et alla cueillir les fruits de sa patience. Miel attisa le feu et l’odeur du gibier rôti excita leur appétit.



Lumeï

Le dîner portait le goût du monde : sa force et sa tendresse.


Cassiopée ouvrit ses yeux sur les cheveux du soleil envolés. Miel avait rangé le peu d'affaires éparses sur le sol qu'ils avaient utilisées la veille. Les cendres formaient un cercle qui décorait la pleine verte. La chaleur de l’hiver qui rencontre celle d'été.
La fraîcheur du matin ravivait les couleurs du visage de l'enfant.
La Damétoile se releva puis roula la couverture sur laquelle elle s'était reposée. Une fois placée dans sa trousse puis sa cuisse ; d'un commun accord, les deux êtres repartirent.
Marcher n'était plus si aisé. A chaque pas, de la boue s'accrochait à leurs chaussures. Puis à chaque autre, la boue se rajoutait comme une construction de carte sur laquelle on loge une nouvelle pièce. Mais quand tombera le château de boue ?
Ce pas puis l'autre. Ces pas de l'autre. Pas d'autres qu'eux sur le chemin. Comme fui des Hommes.
La couleur s'était ternie de marron englué sur les arbres plus rares. Plus frêles. Plus résistants. L'air était tiède, légèrement moite. Il donnait comme l'impression d'un nuage qui entoure, qui protège en chaleur.
Miel leur faisait traverser le nuage, pour mieux voir. Pour mieux chercher. Se débarrasser des travers superficiels.
L'objectif demeurait. Trouver ceux qui avaient dérobé l'objet.


Arriva un moment où le chemin parcouru s'arrêta, devenant trop mou. Cassiopée lança un coup d’œil à l'enfant :

- Hey, tu pensais que nous pourrions traverser entièrement le Pays de la Boue ? C'est impossible ! Vois comme le sol s'écoule sous nos pas. Vois comme il est profond !

L'évidence pouvait être. Ainsi ou autrement. Ainsi et autrement.
Il y avait à voir autre chose cependant.
L'enfant acquiesça pour la traversée en bouée.

- Pourquoi ne pourrions-nous pas ? lui répondit-il.


Miel rit devant l'air décontenancé de la Dame.
Il marcha ensuite droit vers le sol en bouillie de terre. Son corps fondit progressivement jusqu'à disparaître totalement.


L'enfant traversa le le Pays de la Boue.
Et, de l'autre côté, il attendait probablement la Damétoile.



Cassiopée

Cassiopée avait, un court instant été déstabilisée par l’enfant qu’elle ne connaissait pas. Comme elle ne connaissait pas Lumeï. Et l’inconnu surprend souvent celui qui n’est pas sur ses gardes. Non seulement l’enfant qui la précédait dans cette quête détenait des connaissances indispensables sur leur but, mais en plus, il détenait une magie qu’elle n’avait pas soupçonnée un moment plus tôt.
Elle avait oublié que Miel était l’incarnation de Lumeï, ce phénix dont elle recherchait la trace afin d’en mesurer la puissance.
Il s’était enfoncé dans la boue comme un nageur pénètre dans la mer. Comme si tout lieu était son domaine.

Cassiopée n’aimait pas la boue, cette eau trop chargée de terre. Imaginer s’immerger dans la gadoue ne lui plaisait pas. Elle sentait déjà ses narines envahies de ce liquide gluant et ses oreilles s’emplir jusqu’à étouffer son souffle intérieur.
Mais elle prit son courage à deux mains et insuffla une longue aspiration afin de gonfler au maximum chacune des alvéoles de ses poumons. Dans le même temps, elle ralentit au minimum son rythme cardiaque, ferma les yeux et perçut le chemin lumineux que les pas de Miel avaient tracé à sa suite.
Elle s’engagea dans le flot lourd et massif d’une terre trop humide pour en faire un jardin.
Ses pensées suivaient celles de Miel et utilisaient l’enfant comme un point magnétique sur lequel elle avait ancré son azimut de marche.
Ses pas étaient lents bien qu’elle fendit la masse boueuse sans difficulté. La sensation était désagréable. Elle n’aimait décidément pas la boue.


Lumeï


La Damétoiles n'aimait pas cette traversée. Troublée. Le phénix emprunta alors sa voix pour lui insuffler en langage d'univers :

-* Conseil. Ne laisse pas les impressions t'être un obstacle. *_ lui transmit Lumeï, s'exprima la voix de la Dame.

Miel sentit l'emprunte de l'âme de Cassiopée qui s'accrocha à un pan de la sienne. Elle avait compris comment suivre les âmes dans l'univers. Déjà, elle l'avait réalisé une fois en suivant la créature volante aux plumes de soleil.
Miel sentit son pas affirmé. Les yeux fermés. Guidée par l'âme. Ce, uniquement. Elle marchait sans crainte sur ce sentier d'inconnu et rejoignit assez rapidement le petit enfant.

Son sourire illuminait ses yeux.

- Bienvenue de ce côté de l'univers, l'accueilla-t-il chaleureusement.

C'est alors que Cassiopée vit à quel endroit ils se trouvaient alors. Les deux êtres étaient apparus au beau milieu de petits vallons entremêlés. Liés les uns aux autres, ils semblaient en fusion fraternelle millénaire. Mais qui saurait dire que les éléments vivent ?
L'enfant sourit.
Ces vallons étaient clairsemés de verdure profuse. Parmi les brins d'herbe, des fleurs de couleurs innombrables. Le parfum délicat de cette riche flore vint défier leur narines de parcourir ces champs de nature déployée.
Nul homme ne semblait avoir gravit ces terres depuis longtemps.
Était-ce à eux de poser quelqu'empruntes de pieds dont la terre autoriserait un bout de sa mémoire à leur souvenir. Il fallait doucement lui parler, à la terre fine de cet endroit sauvage.

- Ce lieu n'a pas de nom, expliqua Miel à la Damétoiles. Certains peuples l'ont parfois traversé. Mais peu ont demeuré longtemps. Et jamais un nom humain ne lui a été attribué.
Pourtant, c'est magnifique.


Il n'y a rien à comprendre. Souvent, les humains ne savent cueillir ce qui leur est offert.
Soupir de l'enfant.

- Maintenant, Nous devons traverser ces vallons. Lorsque nous parviendrons à la lisière, nous pénétrerons une forêt dans laquelle se dissimule un petit village d'humains.

La Damétoile se demanda comment l'enfant connaissait pareil lieu minuscule et probablement assez peu fameux.

- Nous trouverons une première réponse.



Cassiopée

Ils avaient émergé du lit de boue recouverts d'un suaire de terre. Miel ne semblait pas s'en soucier. Seule la vue de ce monde nouveau la captivait. La boue séchait rapidement sous le soleil éclatant d'une journée d'été. Elle se fendillait de fines crevasses et peu à peu la terre asséchée se détacha des commissures des lèvres alors que l'enfant parlait. Puis son visage se matérialisa à nouveau et secouant les bras, il se débarrassa des résidus boueux, comme un chien s'ébroue en sortant du bain.

Cassiopée, de son coté, s’était dépêchée de retirer sa gangue terreuse en formulant une courte incantation.
Constatant que les paysages alentour paraissaient charmants, elle souriait en écoutant Miel lui parler. Le monde qui les environnait avait des allures d’Eden et Cassiopée se méfiait de tout monde inconnu malgré les propos rassurant de son guide.

Elle le suivit pourtant, bien décidée à découvrir le livre que recherchait Miel.
Ils marchaient hors sentier car aucun chemin n’avait été pratiqué. Quelques sentes empruntées par quelque animal sauvage leur simplifiaient parfois la progression. Mais le plus souvent, leurs pas s’égaraient au milieu de bruyères sous des arbres centenaires.

L’enfant suivit sa route sans soucis de direction. Il paraissait reconnaître une voie tracée.
Tout à coup, Cassiopée aperçut un éclat lumineux au milieu d’un enchevêtrement de ronces en bordure de leur route. Soulevant délicatement une branche, elle découvrit une broche finement travaillée, sertie d’une pierre de rosée.
Comme elle était derrière l’enfant, elle l’encouragea à stopper son avancée.

-Miel ! Regarde donc le bijou que je viens de découvrir ! Je n’ai plus vu de tels ouvrages depuis le déclin des immortels. Ce bijou est une véritable antiquité.



Lumeï

Le regard de Miel dévorait les paysages, c'est alors que la Damétoiles l'interpella pour lui faire note de sa mystérieuse découverte. L'enfant s'agenouilla de façon à mieux voir. Il sentit la terre meuble s'affaisser légèrement sous son poids. L'herbe se froissa. Le bijou était de facture ancestrale et d'une finesse impressionnante. Chaque courbe était gravée de dessins mettant en scène différents animaux. Le sens échappait aux deux contemplatrices, curieuses, qui n'avaient pu découvrir complètement l'ouvrage qu'en l'observant avec leurs yeux rapprochés.


- Tu as raison, c'est un objet plus vieux que Monde.

L'enfant posa son regard perplexe sur Cassiopée. Il essaya de déceler si, dans ses yeux, une sorte de savoir quelconque, une information faisant surface transparaissait.


- As-tu une idée de qui a pu construire pareil objet ? la questionna-t-il.

Son regard. Droit de sincérité dont le but se lit sans peine. Et la réponse, la réponse qu'il attend patiemment.
Miel laissa du temps à la Dame qui lui était probablement nécessaire afin de farfouiller dans sa propre mémoire aussi ancestrale que l'univers lui-même car la blanche créature n'a pas vraiment d'âge. Ou alors, l'enfant dirait plutôt qu'elle en a plusieurs. Plusieurs ères. Plusieurs strates de vies démêlées.
Miel réfléchit.
Il fallait avancer sur le périple et suivre le chemin. Là-bas il y aurait des âmes humains qui donneraient quelques informations. Eux, savaient-ils mieux ce qu'il en était de cette broche de temps d'inconnu faîte de légendes et de couleurs ?

Marcher à trouver.
Marché d'objets.
Les ouvrages en image.
Marcher à trouver ce sentier.


- On a trouvé le chemin, tu sais. On devrait le suivre pour aller visiter les Hommes. Ils sauront peut-être quelques choses.

L'enfant sortit de son sac abîmé un bout de papier légèrement replié. Il se munit d'un crayon de bois pour dessiner l'objet. Sous le regard de la Damétoiles, il expliqua en réalisant avec le plus de réalité possible le croquis :


- On doit plutôt le dessiner que sortir l'objet. On ne sait jamais ce qui pourrait arriver. Alors je procède avec prudence. Je crois qu'il est sage de le faire.

L'enfant avait simplement parlé gardant à l’œil avec méticulosité le tracé du crayon. C'est qu'il était un enfant et qu'il voulait bien faire.



Cassiopée

Une broche comme une épingle dans une botte de foin, perdue en pleine lande. Loin, semblait-il de toute vie, dans un Eden aux couleurs de Paradis.

Une broche dont l'artisanat était à n'en pas douter d'une facture si fine et méticuleuse qu'elle rappelait à la Dame des Etoiles le travail réalisé par les ouvriers d'Ashgrö. La cité brisée de l'ancien continent. Souvenir d'autres temps et des guerres ancestrales.
Si le bijou provenait des temps anciens, Miel était sage de ne pas vouloir le mettre sous le nez de marchands sans foi ni loi.

-Tu penses vraiment trouver un marché dans ces territoires sauvages ?

Cassiopée n'avait pas jugé utile de dire ses doutes à l'enfant. Elle le regardait tracer avec justesse les contours méticuleux des animaux. Le sanglier central, aussi cornu qu'un buffle, rappelait à Cassiopée un motif mural aperçu lors d'une visite en territoire Van'shi. Par contre l'oiseau à quatre pattes et le hérisson volant ne lui évoquaient aucun souvenir.

Quand Miel eut achevé son croquis, Cassiopée enfouit la broche dans les replis brumeux de son vêtement.
Ils reprirent tout deux leur marche, sans se presser mais avec l'envie d'arriver au plus vite, si bien que leurs pas s'enchainèrent rapidement.
Miel semblait savoir où il allait, à moins que l'odeur fut son guide...
Le silence s'était imposé à eux afin d'écouter le monde qui les environnait.
Miel le brisa soudain, comme si la pensée avait suivi un long fil avant de pouvoir s'exprimer :

-Nous arriverons bientôt sur les rives de l'Orn. Nous y trouverons ce que nous cherchons.

En effet, bientôt, la vue s'ouvrit à perte de vue. Ils se trouvaient tous deux sur les bords d'un promontoire dont le plateau qu'ils venaient de traverser était la continuité. Sous leurs yeux, la brume caressait une vaste plaine dans laquelle circulait un fleuve aux couleurs de diamant qui scintillaient sous les rayons solaires. En contrebas, un village plutôt conséquent se logeait dans le creux d'un méandre. Il gagnait sur l'eau par une série de constructions sur pilotis et les toits rosés des maisons cachaient l'activité incertaine de la population à cette heure du jour.

- Ce village s'appelle Dreessor. Je te conseille de tenter de passer inaperçue autant que faire se peut. Dreessor est réputé pour sa populace hargneuse.


Lumeï

La Damétoile et l'enfant avaient pris quelques précautions avant de s'avancer trop près du village. Ils avaient caché la broche ainsi que quelques pièces dans une couture lorsqu'ils étaient encore dans le bout de forêt verdoyante.

L'Orn était une région où la pluie ne se faisait pas prier pour rencontrer les terres. Cela donnait une certaine profusion de fleurs, d'arbres immenses. Un vert décliné dans toutes ses formes d'expression au monde qui le regarde. Et le fleuve, ce joli fleuve le fil de vie qui permettait aux maisonnées de flotter. De vivre sur des îles-maisons. Comme ce peuple devait être joyeux !

Dreessor était le premier village de l'Orn que rencontraient les voyageurs s'il leur était bien entendu permis d'aller au-delà. La fidélité de la populace à sa région établissait sa réputation jusque dans les contes les plus vieux qui décrivaient cette douce région. Leurs valeurs se savaient.
D'un commun regard les deux compagnons franchirent la porte principale. Cela était facile, c'est ensuite qu'il fallait jouer pour traverser la ville.


Un soldat s'approcha et lança bruyamment :

- Un enfant et une Dame, tiens donc ! Comment peuvent-ils voyager ? Petit, tu ne t'es pas encore fait mangé ?

- Nous venons de loin et nous sommes fatigués, répliqua la Damétoile dans l'espoir d'écourter la conversation et le ton désagréable de l'homme.

L'homme se prit d'un rire sans égard à ceux auxquels il s'adressait. Sans le moindre respect.
Miel sentit le sang magique de la Damétoile se glacer. Sa mâchoire se contracta.

- Si vous veniez de loin, vous seriez morts depuis longtemps. La vermine n'épargne pas ! continua le soldat.

Il semblait s'amuser et ne le cachait pas.
Soudain, Miel qui avait la tête baissée depuis le début de la conversation s'approcha de l'homme. Il leva haut la tête afin de pouvoir distinguer son visage et s'exprima en ces mots :

- Les faibles n'épargnent pas.

L'homme eut un moment d'hésitation à ne savoir quel sens poser puis quelle réplique offrir. Cependant, à pein eut-il entrouvert les lèvres que Miel prit le pas :

- Inutile ne nous offrir vos bons mots, nous trouverons une auberge tout seuls ainsi que nous sommes arrivés jusqu'ici.


Miel continua son chemin avec Cassiopée, les battements de leur cœur légèrement moins à l'affût.
Le soldat ne les interpella pas lorsqu'ils se dirigèrent vers le marché permanent, là où se regroupaient tous les forgerons et les joailliers du village. Parfois s'y greffaient quelqu'artisans ambulants. Probablement pourraient-ils trouver les réponses nécessaires à leur quête.



Cassiopée

Miel et Cassiopée débouchaient sur la rue dîte "des valeurs" quand le ciel s'obscurcit dangereusement. De gros nuages se bousculaient au dessus de leurs têtes et très vite les premières gouttes de pluie s'abattirent sur eux. Grosses comme des billes, elle tombaient droit vers le sol en grandes éclaboussures et quand elles faisaient mouche la goutte choquait la peau mieux qu'une claque bien sentie.

Les deux compagnons se précipitèrent vers la première boutique venue. Leur seul espoir à ce moment de l'averse était de s'abriter.
Ils étaient tous deux fort occupés à se secouer énergiquement quand un regard fixe posé sur eux les obligea à oublier l'humidité.

Un homme de très petite taille, le teint aussi gris que l'asphalte, la peau ridée comme une vieille pomme, se tenait derrière un comptoir surchargé d'objets variés. Toutes les choses exposées sur les murs, les étagères ou en vitrine étaient d'or serti de pierres précieuses, certains étaient entassés en un magnifique échafaudage. Les cabochons finement ciselés, enchâssés dans le métal ornaient des petites pendules posées près d' un coffret sculpté, lui-même déposé sur un meuble moulé et travaillé dans le métal précieux.

Le regard du petit homme était intrusif et paraissait traverser toutes les défenses des nouveaux arrivants dans sa boutique.
C'est Cassiopée qui se décida la première à briser la glace qui s'était installée après la pluie.

- Bonjour brave homme, pardonnez notre arrivée si intempestive mais elle convient si bien au temps qu'il fait au dehors !

L'homme ne broncha pas, sondant l'âme des deux personnes qui lui faisaient front.

-Nous ne sommes pourtant pas rentrer dans votre boutique par pur hasard, nous sommes à la recherche de joailleries anciennes. Et je vois que disposez d'un étalage magistral !

Cassiopée s'extasiait ainsi devant les magnifiques fioritures , ciselures, incrustations présentes sur chaque pièce qui les entourait. L'homme se décida enfin à parler.

-Que désirez-vous exactement ?

Le ton était plus doux que le visage.

-Nous recherchons des bijoux datant des temps anciens. Auriez-vous quelque broche ou bague sculptés d'animaux extraordinaires dans votre antre digne des Trésors de Calisha ?


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Message posté le 17:02 - 16 déc. 2015

Lumeï

- Que désirez-vous ... ?

L'artisan soupira. Encore des clients compliqués qu'il ne saurait réellement satisfaire. Quand l'échange commençait de cette manière, il se terminait souvent de façon infructueuse. Sa boutique était pourtant emplie d'une certaine diversité de renom en cette terre mais il existerait toujours des insatisfaits de toute manière. Qu'y pouvait-il.

- Bijoux... des temps anciens.

Et voilà ! Il l'avait pressenti... des gens compliqués... qui demandent l'impossible. Faîtes ceci, faîtes cela, vous ne savez construire un objet dont les plans n'ont jamais été retrouvé ?, ressuscitez les morts voyons ce n'est pourtant pas compliqué, et quoi !
Le petit homme passa d'une teinte légèrement burinée tendant sur le rose un peu rougi.
Une dame, qui déboucha d'une salle par le fond - l'atelier contre toute vraisemblance, s'approcha de dos à l'artisan et lui asséna entre les omoplates une frappe énergique. L'homme frissonna légèrement et reprit probablement ses esprits.

- Pour trouver des broches anciennes, il en existe de différentes sortes donc plusieurs possibilités. Soit vous me donnez le nom exact de l'objet j'imagine spécifique de votre recherche, soit on passe vous et moi un bon mois à feuilleter tous les livres d'objets anciens que comportent ma bibliothèque - si vous voyez ce que je veux dire, imposa-il l’œil plissé.

La Damétoile et Miel observaient le bonhomme sans broncher. Il faut dire qu'il n'avait pas l'air commode et plutôt impulsif. Mieux valait ne pas trop l'irriter.
Le garçon lança un regard à son compagnon de route qui hocha la tête.

Miel fit un pas pour se rapprocher du petit homme franc et honnête.

- Juste le temps que je sorte quelque chose.

Ses lèvre se remuèrent d'entre ces mouvements de bras qui fouillaient sa besace. Après quelques instants de tournoiement des objets dans tous les sens, il en sortit un carré de toile noirci de traits. L'artisan ne voyait d'un amaglio d'obscurités étalées mais lorsque Miel lui tendit la toile, il aperçut que c'était plus que cela. L'obscurité avait un sens. Ces traits n'étaient pas des hasards de saleté ni des hasards de teinture, non. Il distingua alors aisément le dessin léger d'une broche qui devait dater de l'ancien temps.
Mais, l'artisan avait-il bien vu ce qu'il voyait ? Ses yeux ne lui faisaient-ils pas faux bon ?
Il saisit de ses deux mains la toile qu'il rapprocha de son visage. Plus près. Tenant le dessin fermement comme si des pattes allaient lui apparaître et le faire s'en aller ou des ailes lui pousser et le faire s'envoler ou bien même autre chose.
Ses sourcils, froncés.

- Alors ? s'enquit la Damétoile. Cela vous rappelle-t-il quelque chose ?

L'artisan leva sa tête cachée par le dessin et regarda de côté la Dame. Il réfléchit mûrement à ses mots, Miel observa, avant de les prononcer. Il choisissait.

- Eh bien, cette œuvre d'art (car oui, c'était un objet rare et si ancien et si subtilement réalisé qu'il pouvait être ainsi qualifié) date quand même du début de l'Ancien Temps. Je ne sais pas où vous avez trouvé ce dessin mais je pense que l'objet a disparu dans la Nature. Je n'ai jamais vu le dessin de cette broche dans mes ouvrages mais j'en ai vu avec des décorations l'approchant.

Un sourire.

- Mmmh, c'est intéressant.

Rire dément.

- Haaaaa !

Il les regarde étrangement. L'homme est un peu fou.

- Êtes-vous des chasseurs de trésors ? demanda-t-il avec hésitation.

Cassiopée rit. Eux, des chasseurs de trésors ? Ils partaient à la recherche du livre du Phénix, volé. Ils étaient plutôt des récupérateurs de trésors probablement objet dérobé par les chasseurs de démons eux-même. Ils étaient au moins sûrs d'une chose, le petit monsieur n'était vraiment pas devin.

- Non, répondit-elle simplement.

Ils n'avaient pas à se justifier, ni à raconter leur périple, son pourquoi, ni leur(s) vie(s). Cet homme semblait gentil mais ils ne pouvaient faire confiance à personne. Ils ne devaient. Par simple mesure de sécurité. Cette magique devait impliquer le moins d'humains possible et si implication obligeait, alors les informant le moins possible.

- Ah.

L'homme était déçu. La flamme qui s'était déclenchée dans ses yeux était sur le point d'atteindre son apogée mais cette simple réponse l'avait effacée. Efficacement. Durement.

- Vous avez pu reconnaître l'époque de construction et nous vous sommes vraiment reconnaissant, Monsieur.
Que pouvez-vous nous dire de plus ?
tenta la Dame.

Le petit homme haussa les épaules.

- Je ne sais pas. Pour vous répondre il faudrait que je vérifie certaines choses dans mes livres. Le délai de deux jours, pour être exact. J'ai besoin d'au moins cela pour trier et rassembler les informations nécessaires. En attendant, vous pourriez vous reposer en ville et même visiter notre cité. Elle est charmante.

Il leva un doigt parce qu'il avait oublié de transmettre vraisemblablement un information importante.

- Ne vous frottez pas trop aux gardes. Ils sont... particuliers. Je vous conseille de les éviter le plus possible, les prévint-il, la mine assombrie.



Cassiopée

Après quelques hésitations mesurées par des échanges de regards entre Miel et Cassiopée, ils avaient fini par abandonner le croquis de la broche à l'antiquaire. Celui-ci avait eu un regain de joie quand il avait reçu le document entre ses mains.
Ils avaient convenu de se retrouver deux jours plus tard. Le petit homme espérait avoir alors trouvé quelque indice.

Lorsqu'ils remirent le nez dehors, la pluie avait cessé. De minces copeaux de ciel bleu faisaient leur apparition au dessus de leur tête et le soleil commençait activement son travail de séchage.

Pourtant, il commençait à se faire tard et il était temps de chercher à trouver un hébergement.
La pluie avait grossi la rivière et les quais n'étaient plus qu'à quelques bras de la surface de l'eau. Une eau boueuse et tumultueuse.

Alors qu'ils s'apprêtaient à passer le pont, Cassiopée questionna Miel :

- Dis moi Miel, qu'en est-il du livre ? Est-il loin encore ?

Mais Miel n'eut guère le loisir de répondre. Ils furent cernés par une régiment de gardes équipés de longues lances qui leur barraient le chemin.

-Halte là ! Vos papiers !

S'il est une chose que Cassiopée et Miel ne connaissaient pas en ces Terres c'est l'usage de papiers. Jamais encore, la Dame des étoiles n'avaient eu à certifier son identité. Quant à Miel, nous dirons simplement qu'il était trop jeune.

-Je crains, Capitaine, de ne point en posséder. Mais je peux vous donner les marques de mon identité si vous le désirez.

La réponse avait déstabilisé l'assurance du garde peu habitué à une telle prestance. Même si celle-ci était alliée à la naïveté perceptible dans les propos de celle qui ne semble rien craindre sauf elle-même. Mais le capitaine de la garde se reprit.

-Nous allons vous conduire au poste, veuillez nous suivre.

Miel et Cassiopée se regardèrent et d'un commun accord se placèrent entre les deux rangées de gardes qui se préparaient à les escorter.


D'un mince filet de voix, Cassiopée dit à Miel en se penchant sur son épaule.

-Au moins nous saurons où dormir ce soir...



Lumeï

Ce n'était pas réellement ainsi que Miel et Cassiopée avaient entendu visiter ladite charmante ville mais du fait de ces papiers qu'ils ne possédaient pas, le chemin radical s'était dirigé vers la cellule auprès des gardes.
Celle-ci était plutôt étroite et ne possédait pas de banc en dur. Les deux personnes étaient donc assises sur le sol, le dos longeant le mur. Une minuscule fenêtre perçait entravée de barreaux de fer. Le brouhaha de la ville et des chariots la traversant remontait jusqu'à leurs oreilles mais demeurait un fourmillement incompréhensible. Cette immense fourmilière était comme une guirlande qui au moins, paraît cette affreuse cellule.
Du crépis se détachait par morceaux et certains bouts juchaient déjà le sol. Il devait également y avoir des fuites puisque de fins filets d'eau ruisselaient le long du mur. L'humidité donnait un air moite à l'air quand il touchait la peau.
La condition des prisonniers dans cette ville n'était pas chose souhaitable mais qu'en était-il des soldats de la ville qui se regroupaient dans ce même bâtiment, endommagé.

Miel grimaça.
Sur le visage de l'enfant se peignait une mine déçue.
La Dame et l'enfant eurent tout de même droit à un bouillon de légumes ce qui les réchauffa allègrement. Le repas se dégusta silencieusement puis une fois la nuit déployée bras devant sur la ville, Cassiopée glissa son regard d'entre les barreaux pour y glaner une ou deux étoiles à mirer. Miel jouait avec la tasse d'émail qui lui avait servi d'assiette.
L'enfant était agacé. Il attendit le soir que les soldats soient dans un autre monde, leur propre Néante pour pouvoir communiquer des informations importantes et confidentielles à la Damétoiles.

- Lorsque les mots s'échappent du Manuscrit, leur image tombe dans le réel. Ils deviennent vrais.

Un des gardes assoupi sur sa chaise interrompit un instant sa forte respiration. Il avait les bras croisés. Peut-être pour les empêcher de tomber lorsqu'il était véritablement dans les bras de Morphée. Mais sa respiration, calme, d'entre ses mille rêves de nuit reprit son cours normal. La lune le gardait, de toute façon.

Miel l'observa quelques instants.

*Les humains sont tous des enfants lorsqu'ils dorment.*

L'enfant lui-même reporta à nouveau son intention sur Cassiopée puis continua en ces termes :

- Les mercenaires qui ont dérobé le Manuscrit vont vite comprendre le phénomène des mots qui tombent. Cette broche qui date de l'Ancien Temps possède une valeur monétaire déjà incroyable. Imagine un instant tout l'argent qu'ils peuvent tirer de l'ouvrage du Phénix ! Il serait tout à leur avantage d'ouvrir une page chaque heure comptée. Chaque minute, même !

Un léger instant.

- Mais ils n'ont pas encore compris pour l'instant. On a trouvé la broche, souviens-toi. Il faut profiter de cet avantage pour les rattraper et récupérer le livre. Dès qu'ils sauront, les choses se compliqueront. Il faudra forcément plus de temps pour trouver des indices de leur passage.



Cassiopée

Les voix n'étaient même pas un murmure dans le vent. Elles n'étaient qu'un souffle à peine ébauché dans le silence de la nuit, dans un coin de cellule où les deux corps s'étaient rapprochés pour rester cote à cote. Miel, tout à ses inquiétudes, avait placé ta tête sur l'épaule de la Dame.

-Ainsi... Tu es en train de me dire que la broche que nous avons trouvé est un mot matérialisé, tombé du livre que tu recherches ? Tu le savais depuis le moment où nous avons trouvé le bijou dans la lande ? Pourquoi n'as tu rien dit avant ?

Cassiopée songeait au dessin abandonné à l'antiquaire et à coup sûr aux recherches que celui-ci avait entreprises depuis qu'elles l'avait quitté.... Pourquoi, dans ce cas, Miel avait-il convié le spécialiste à rechercher l'origine de la broche ?

L'enfant ne répondit pas tout de suite, comme s'il avait besoin de longuement réfléchir à la question posée ou comme s'il n'avait pas envie de répondre. Sans doute était-il déjà parti mentalement à la recherche du livre.

-Depuis quand n'es-tu plus en possession de ton livre ?

Trop de questions tournaient sans relâche à présent dans la tête de la Dame du Sang. Trop de questions sans réponse.

-Et si tu te décidais à tout me raconter ? Comment as-tu pu perdre ou qui t'a volé un livre aussi précieux ?



Lumeï

-Ainsi... Tu es en train de me dire que la broche que nous avons trouvé est un mot matérialisé, tombé du livre que tu recherches ?

Le petit enfant acquiesça.


- Tu le savais depuis le moment où nous avons trouvé le bijou dans la lande ? Pourquoi n'as tu rien dit avant ?

Miel soupira, il avait trop tardé à l'expliquer à Cassiopée :


- En réalité, je n'en étais pas tout à fait sûr. Ce sont les observations de l'artisan qui m'ont confirmé ce fait. J'ai préféré ne rien te dire avant de peur de nous mener tous deux droit dans une fausse piste.

L'enfant jouait en effet la prudence mais désormais qu'ils avaient cette affirmation. Ils devaient se dépêcher, le temps serait précieux.
Cependant, il était important de répondre aux questions de son compagnon. Deux têtes à penser permettraient de mieux réfléchir or, pour ce faire, il était nécessaire que Cassiopée aie un maximum d'éléments.

- J'avais caché le livre il y a de cela très longtemps dans une grotte pour Phénix. Un merle est venu siffler l'air du danger. J'ai donc cru comprendre que le livre était détruit ou emporté ou que sais-je encore comme autre possibilité. Une chose demeurait sûre pour moi : le livre n'était plus en sécurité. C'était un peu après que tu rencontres le phénix Lumeï. Tu te souviens ? A quel moment exact fût-il dérobé, cela en revanche, je ne peux l'affirmer. Je n'ai l'assurance que de l'appel du merle.

Le regard de Miel se détacha de la Damétoiles pour observer comme au loin. Pourtant, le mur de la petite cellule barrait complètement toute vue et seule la fenêtre offrait quelques brins de voix, de lumières, sans image réelle.

- Je ne sais pas du tout pourquoi les Mercenaires ont dérobé le livre. Je pense qu'ils ont dû tomber dessus par hasard. C'est une contrée peu arpentée par les humains, sais-tu ? La nature domine un peu par ici. Mais ce sont des mercenaires. Ceux-là n'ont peur de rien et surtout leur statut de hors-la-loi les oblige à parcourir des terres que nul, parfois, n'a arpenté. Ils sont condamnés à l'errance. Demeurer trop longtemps dans les cités serait le risque de se révéler.

Je pense qu'ils sont allés au bon endroit au bon moment pour eux - car mauvais pour le phénix, et qu'ils ont voulu tirer profit du vieil ouvrage : un acheteur à qui le vendre à prix fort.

Soupir.

- Vient le moment où l'un des mercenaires par curiosité peut-être, par envie de lire, à ouvert le livre et feuilleté les pages. Là commence le vrai problème. Car le livre a plus de valeur qu'ils ne le croient et marchander le livre sera bien compliqué. Nous devrons donc leur prendre de force, ce que je n'aime pas du tout.



Cassiopée

Pour une raison que les dieux seuls connaissent, Cassiopée avait confiance dans la parole de Lumeï. De même, elle se sentait presque contrainte par un lien indicible à l'aider dans sa quête.
Mais, il lui manquait encore des informations cruciales.

- Tu ne m'as pas dit ce qu'il y a dans le livre. J'ai besoin de connaitre son contenu pour mesurer l'importance de sa perte et ses conséquences.

Le visage de Miel se fait sévère. baissant la tête, il s'époussette discrètement. Il a besoin de s'offrir une contenance pour annoncer le plus important.
Avant de laisser les mots sortir de sa bouche, il écoute avec attention et scrute les ombres. Sa voix n'est qu'un mince filet audible de la seule Dame des Etoiles.

-Le livre volé est un des manuscrits du phénix. Il retrace la longue vie du phénix. Il est donc un véritable trésor pour ceux qui l'ont en sa possession et une redoutable perte pour le phénix. Mais il est une arme potentielle dans les mains de ceux qui sauraient l'utiliser...

- Alors, partons.

Cassiopée s'est levée et déjà elle appelle.

-Garde ! Garde ! Venez vite ! Venez vite ! L'enfant ne bouge plus !!! Je vous en prie venez vite !!!

Rien n'avait été formulé ou présagé entre les deux compagnons. Mais Lumeï est à présent couché, immobile sur le sol de la prison, aussi raide qu'un cadavre.
Le garde traine un peu la patte et grogne qu'il n'a pas que ça à faire. Mais en voyant l'angoisse de la femme au charme envoûtant et le corps rigide allongé au sol, il sort un gros trousseau de clés pour choisir la bonne.

-Que lui est-il arrivé ? Dit l'homme en se penchant sur l'enfant.

Mais il n'a pas le temps d'en dire plus, Cassiopée ne l'a pas touché, mais l'homme est tombé sous la pression devenue trop forte de l'air qu'il aspirait, coincé dans un cône pressurisé qui l'abat dans un comas un peu essoufflé.

- Il va faire quelques mauvais rêves, mais il se réveillera quand nous serons loin.

Leurs pas sont aussi légers que le vent et les deux compagnons sortent sans encombre sur la rue. Une brume les recouvre le temps qu'ils s'éloignent de la prison.

- Faut-il récupérer le dessin confié à l'antiquaire avant de partir ?



Lumeï

- Faut-il récupérer le dessin confié à l'antiquaire avant de partir ? le questionna-t-elle.

L'enfant eut un sourire malicieux et un petit rire étouffé. Il regarda Cassiopée :

- Oh non ! Tu peux être sereine, vois.

Il passa la main sur ton torse par l'ouverture de la tête et sembla attraper quelque chose sur son épaule. La petite main à nouveau mise à jour sous les rayons lunaires révélèrent le fameux dessin.
Cassiopée, les yeux ouverts, resta à contempler le bout de tissu. Quand Miel avait-il récupéré le croquis ? Elle ne l'avait pas observé œuvrer. Il possédait probablement un talent de discrétion impressionnant pour qu'elle ne le remarque, elle, la Dame des Étoiles.

- On peut partir tout de suite et c'est d'ailleurs ce que nous devrions faire de ce pas ! Hâtons-nous.

L'enfant glissa sa petite main menue dans celle plus grande, plus fine de Cassiopée. Il avait rapidement récupéré sa sacoche dans la pièce collée à leur cellule sans attendre.
Ils se mirent en chemin sans problème. Ils n'avaient pas passé beaucoup de temps dans la cellule finalement et le seul repas qu'ils avaient consommé était bien suffisant pour les faire marcher loin hors de la ville.
Miel guidait la Damétoiles. Ils arpentèrent un sentier qui sortaient à l'opposé de la cité. Évidemment ils marchaient sur le côté, dans les herbes plus loin mais suivaient, l’œil aux aguets, ce chemin. C'était là qu'ils étaient partis.
Miel avait saisi les propos de villageois qui passaient tout près de la fenêtre de leur cellule. Il avait été attentif à chaque passant, ce qui lui avait valu d'identifier la destination des Mercenaires.
D'ailleurs, pour le faire comprendre à la Damétoiles, l'enfant lui transmit une image par le chemins invisibles (ou trop) des Néantes. L'âme de Cassiopée la reçut sans encombres.



Cassiopée

Il était si simple finalement de ne plus utiliser les mots pour communiquer. Les images livraient leurs couleurs, leurs passages mieux que les conseils. Les odeurs parfois venaient compléter l'information donnée par Miel. L'enfant était plus volubile via l'esprit que par la parole et Cassiopée anticipait leur voyage à venir.
Ils avaient quitté la cité sans encombre, évitant les lieux populaires à cette heure de la nuit et les gardes en patrouille.

Ils s'étaient engagés dans la forêt. Miel savait où il allait et Cassiopée enchâssait ses pas discrets dans les siens. La forêt bruissait dans le silence. La lune éclairait à peine le chemin qu'ils empruntaient. Ils marchèrent longtemps sans être plus alertés que par quelques craquements de branches quand un animal fuyait sur leur passage.

Quand l'aube se leva, la forêt s'imprégna de l'humidité du petit matin et la brume se répandit entre les arbres cachant à leurs yeux les nouveautés du jour. Les arbres s'espacèrent pour ne laisser place qu'au sol plat et herbeux sous leurs pieds. Soudain, ils émergèrent du brouillard comme on pénètre dans un autre monde.

Ils s'arrêtèrent pour contempler la plaine devant eux. Une plaine herbeuse, à peine boisée, qui aboutissait à un mur de montagnes abruptes. Aucune colline n'annonçait cette apparition. Elles semblaient sorties de terre pour leur barrer le passage.

Miel s'exprima par la voix pour annoncer :

-C'est ici que nous devons aller.

Cassiopée fut soudain assailli par une grande lassitude. Ils avaient marché sans se rendre compte que leur corps n'avaient pas dormi depuis des jours. Le futur annoncé avait simplement eu l'effet de les ramener au présent.
Ils s'enveloppèrent dans la chaleur de leurs vêtements, recroquevillés sur eux-mêmes sous la tiédeur des rayons de soleil naissant. Ils étaient deux petits monticules humains déposés devant l'assaut d'une montagne.



Lumeï

Le repos fût nécessaire et leur permit de recouvrer totalement leurs forces basiques et plus spécifiques. Lorsque les rayons commencèrent à chauffer légèrement leur visage, les deux êtres s'éveillèrent à cette vie qui continuait, à cette vie nouvelle qui leur apprendrait d'autres choses encore que pas un humain ne soupçonnait. Pas une once.
Les yeux qui se mouvent de la conscience qui refait surface. La peau, tiédie par le soleil de l'aurore. Le besoin d'étirer ses muscles comme pour les préparer à cette future journée de marche. A la journée simple, juste pour elle et pour soi. Les yeux s'ouvrent et les yeux, à peine nés du matin observent le bleu du ciel répandu par pinceau, par seaux entier dans le ciel. Parfois du blanc, qui l'adoucit plus encore. Plus encore que n'est le bleu du ciel lui-même.
Il y a l'odeur de la rosée qui vient surprendre leur nez. L'odeur des végétaux contre lesquels ils se sont blottis pour leur sommeil. Confiance extraordinaire.


Miel, l'enfant aux yeux de couleurs différentes, se relève. Prend le temps. Le temps de voir et ressentir.

Il regarde la Damétoiles. Attend patiemment son réveil qui ne tarde pas tant. Les deux êtres emprunts de magie n'ont besoin de trop de repos. 

Enfin, après s'être partagés un lapin qui avait la nuit couru dans la plaine et ainsi avait repu les estomacs, Cassiopée accompagnée de Miel débutèrent la suite de leur périple. Il leur faudrait la journée entière pour arriver jusqu'à la pousse des montagnes. Ces bouts de terre sortants figés par le temps.

- Bientôt, dit l'enfant à la Damétoiles. 

Un simple mot suffisait parfois à comprendre une myriade d'éléments. Celle-ci, la Damétoiles la saisit.


***


Ils avaient arpenté la longue plaine sans interruption toute la journée d'une marche régulière. Pas de fatigue dans les gestes, pas plus que dans le regard,  les voix. La détermination se dégageait. Semblait leur donner une force presque inégalable. Qui savait.
Arrivés au pieds de ces montagnes, la Damétoiles ainsi que Miel eurent ce réflexe commun de relever la tête aussi haut que leur propre corps le leur permettait afin de contempler l'immensité du paysage. Cette nature aussi large que haute.
Ils ne voyaient d'ici mais peut-être un peu de nuages parsemaient le sommet des montagnes.

Miel aurait voulu prendre les bouts de nuage, les sentir fondre entre ses doigts. Un instant.

- Nous devrions trouver une entrée, un chemin naturel.


Un silence de pensées.

- Il est aussi possible que les Mercenaires aient eux-même creusé un chemin dans la roche mais cela, je ne le sais pas.



Cassiopée

La montagne formait une barrière naturelle à la marche des deux voyageurs. Ce mur paraissait infranchissable, mais il était aussi leur but à atteindre et se positionner à son pied sans savoir comment et où l'aborder était déstabilisant.

Cassiopée cherchait du regard une faille dans la roche, un passage pour poser le pied sans avoir à escalader. Mais là où le chemin les avait menés, le mur ne s'ouvrait pas. Il s'abattait, frontal et presque lisse. Leur progression était bloquée nette.

Ils passèrent le restant de l'après-midi à longer la muraille, espérant la trouée qui leur apporterait les traces précieuses ce ceux qu'ils poursuivaient . Mais la masse rocheuse se dressait devant eux comme un rempart infranchissable.
Femme et enfant se frayaient un chemin avec difficulté parmi les broussailles et les épineux qui longeaient la façade. Leur progression était lente et incertaine et le soleil descendait jusqu'à toucher la cime du plus haut sommet. Lentement il commença sa chute au delà des monts et se cacha complètement aux yeux de nos vagabonds.

La masse noire de la montagne écrasa alors les deux silhouettes et seul le ciel gardait encore la clarté d'un jour en déclin.

Soudain, un rayon de soleil perça à travers la paroi. Il semblait sorti de nulle part mais il se glissait par un mince goulet qui aurait pu passer invisible aux yeux inondés de lumière. Mais, le soleil simplement caché derrière la masse montagneuse cherchait à faire un clin d'œil à Miel et Cassiopée. Complice des cieux.

Un large sourire se figea un long moment sur les deux visages qui se faisaient face, heureux de la découverte qui venait à point.
D'un même mouvement, les deux alliés s'engagèrent sur un petit chemin à peine ébauché par quelque animal familier du coin mais qui suivait parfaitement la direction du rai en provenance de l'horizon pointé.

Lorsqu'ils arrivèrent près du mur, un long couloir très étroit coupait la montagne et permettait son franchissement. Le chenal était si mince qu'ils durent s'y engager l'un derrière l'autre. L'enfant précédent la femme.



Lumeï

Miel marchait prudemment entre les deux parois qui le frôlaient. Parfois, des protubérances rocheuses étaient plus pointues et acérées et l'écorchaient un peu. Mais il en fit bien fi. Cela lui importait peu. Et la Damétoiles plus grande et plus large que le petit enfant avait pour elle une réaction pour le moins identique.
Ils progressèrent avec patiente, avançant toute la journée droit devant eux sans savoir où allait déboucher ce chemin de mystères. Quelques mulots parfois leurs glissaient habilement entre les pieds et courraient comme des gouttes glisseraient sur la peau. Leur aise fit sourire l'enfant qui aimait contempler ces détails, ces traits d'humour de l'univers. Jolis petits trésors terriens.

Cassiopée proposa en début de d'après-midi une pause pour se rafraîchir car le soleil qui était arrivé à son pic les avait malignement coincé. L'énorme étoile jaune diurne commençait à les griller sans vergogne. Ils s'assirent donc tout deux et attachèrent sur le dessus de leurs cheveux des écharpes de tissu pour parer le soleil. Ensuite, Miel sortit de son sac une gourde de cuir qu'ils avaient rempli d'eau près d'un petit ruisseau entre la ville et les montagnes. Elle était fraîche et pure car elle descendait des monts. Le cuir avait permis de conserver toute sa température. Miel sentit le liquide couler dans sa gorge. Il en devina le trajet à l'instant même grâce à sa fraîcheur.


Cependant, ils reprirent leur chemin sans trop tarder car l'affaire était relativement urgente. Il ne fallait pas trop prendre son temps, aurait pu vous dire l'enfant-phénix.
Quoiqu'il en fut, leur marche était plus désagréable avec le soleil qui tapait dans le chemin de pierre. Des gouttes de sueur perlaient leurs visages.

Puis, le chemin vira soudainement sur la droit : un virage en épingle. Miel regarda Cassiopée avant de s'y engouffrer. Suivi par cette dernière, ils se retrouvèrent dans un lieu plus large, bien plus large mais aussi plus inquiétant, peuplé d'hommes, de femmes et d'enfants.

*La Cité des deux M* pensa l'enfant.

Si ce village caché portait ce nom c'était d'une part parce qu'il était situé dans les Monts et d'autre part car il appartenait aux Mercenaires. Le fameux "deux M" s'expliquait donc de façon très logique et pas spécialement originale. Cependant, du monde des hommes, seul le M des Mercenaires était entré dans le savoir général et l'autre même lettre était source de nombreuses fables ou discussions dans les tavernes pour en trouver la possible signification.



Cassiopée

Cassiopée ne connaissait pas le lieu qu'ils abordaient. Une large plateforme occupait l'espace, bordée par des bâtiments constuits à même la roche. Ils s'inséraient dans le décor aussi naturellement que si la montagne en était elle même l'architecte.
Leur arrivée était encore passée inaperçue car un gros rocher les cachait à la vue des passants qui se regroupaient sur la grande place.
Voyant tant de monde. Ils eurent tous deux le réflexe de s'accroupir afin de rester incognito.
Une scéance était en préparation car tous les habitants de ces étranges logis sortaient de leur rocher et se dirigeaient vers une sorte de petit promontoire.
Bientôt, l'esplanade fut recouverte de monde et Cassiopée, surprise que tant d'habitants puissent vivre si isolés en haut de ces montagnes, se fit tout ouie, ouvrant ses sens à toutes les informations qui lui seraient diffusées.

Les hommes étaient sans conteste les plus nombreux du groupe. Mais parmi la bonne centaine de personnes présentes, elle pouvait compter un tiers de femmes et d'enfants.
Tous, hommes, femmes et enfants après 10 ans avaient à la ceinture une, voir plusieurs armes. Il s'agissait pour la plupart de coutelats assez grands. Certains portaient des arcs courts ou des arbalètes sur leur dos. Ils étaient tous vêtus de couleur très sombre, couleur de terre ou de forêt.

Pourtant, l'homme qui ouvrait une voie sur son passage vers le promontoire dénotait totalement du lot.
Il était habillé d'un long fuseau ocre qui contrastait avec les lourds pantalons des hommes, et d'une chasuble blanche fort élégante ornée de broderies dorées. Son port, purement elfique, lui faisait dominer d'une tête tous les gens rassemblés pour l'entendre.
Une fois en place sur son pied d'estale, il haranga la foule venue pour l'écouter.

-Ah ! Garda paril de g'mer  !
Il est temps mes amis !
Nous avons depuis trop longtemps attendu. Si nous restons inactifs, votre force ira en diminuant. L'heure est venue.
Je vous conduirai vers la grotte de l'être suprême et là, enfin, vous pourrez recueillir le fruit de tous vos efforts.
Voyez !


Il sortit de sa poche une boule grise qui sous l'emprise solaire se mit à étinceler et le gris devint arc en ciel. Tous se cachèrent les yeux et se prosternèrent au sol en appelant :

- Garden parils de g'mer.



Lumeï

La Damétoiles et l'enfant-phénix ne perdaient mot du discours. Ils burent avec patiente et discrétion pour comprendre qui était le groupe, leur culture imprégnée. Quelle était l'origine de cette mystification de l'Être suprême ? Qui cela concernait-il ? Qu'était cette grotte ? Tout autant de question qui faisaient naître un tourbillon de mystères à rencontrer.

Miel sentit un souffle, une respiration contre sa nuque provenant de la droite.
Il ne bougea pas.
Il avait senti cet homme se mouvoir avec l'agilité d'un prédateur et la discrétion d'un fantôme. Nul homme n'aurait pu le voir. Trop aveugle, pas assez de travail.
L'enfant-phénix avait vu l'éclat de son âme. Cela, il n'avait su le camoufler.
Miel ne bougea pas.
Il attendait que l'homme veuille bien leur manifester sa présence et au bout de quelques instants, sa voix grave et chaude se mit à susurrer :

- C'est la boule de givre, la clef, les informa-t-il dans une attitude de guide.

Cassiopée ne sursauta pas. Elle avait en effet regardé chaque objet, chaque recoin avant même que les deux corps compagnons n'avancent. En revanche, la réponse de l'homme la surprit. La Damétoiles avait pensé à un objet sacré dont l'utilité vénérable ne servait qu'à être exhibé pour les grands jours de fête. Sa supposition n'était pas tout à fait fausse. Mais un autre sens se rajoutait, une autre utilité qui rendait l'objet précieux, voire nécessaire au peuple. Mais pourquoi ? Sa curiosité lui fit reprendre immédiatement le fil se son attention. Son regard se posa sur celui qui venait de parler à leurs côtés, camouflés de la foule. Il était de taille moyenne, son teint était buriné et ses yeux, noirs contemplaient l'humain qui élevait ostensiblement la boule grise luisante. Les rides de ses yeux étaient creusées de façon à lui donner un air naturellement chaleureux et gentil.
Mais peu s'en fallait. Miel et Cassiopée étaient suffisamment expérimentés pour ne jamais se fier aux apparences. L'homme portait à sa taille une petite dague rangée dans un fourreau de composé cuir et de métal blanc. L’œuvre était simple mais solide.

Puis, l'homme réveilla à nouveau sa jolie voix :

- Par-delà les Gardens, Kalys ne se souvient pas quand vous avez intégré le village. Et votre retrait, me semble-t-il, est plutôt suspect.

Ainsi s'appelait-il Kalys. Un nom qui venait des contrées lointaines. Miel pensa à l'origine de ce prénom qui tirait sa source d'un peuple nomade dans le désert vers Ar'hal. Le Phénix avait une ancienne histoire avec cette région qui datait d'une autre époque. Pour Kalys, il était question de ses origines qu'il ne devait probablement pas connaître ou alors de façon superflue.

- Peut-être, répondit Miel sans quitter des yeux l'orbe rayonnante.

Cassiopée enchaîna :

- Nous ne sommes pas d'ici en effet. Comme chacun de vous, nous avons commencé notre histoire ailleurs.

L'homme semblait peser chaque mot prononcé, essayant visiblement d'en dégager le sens, plus profond que celui, apparent. Mais il ne pouvait savoir d'où venait Miel, qui il était, réellement. Il ne pouvait pas mieux connaître la Damétoiles.

- Pourquoi n'êtes vous pas avec les autres croyants ? N'êtes-vous pas. mêlé à eux ?

Son regard était franc.
L'homme lui sourit.



Cassiopée

L'homme se fit bourru.

-Je ne sais pas qui vous êtes, mais si vous vous cachez d'eux, peut-être que vous pourrez m'être d'une aide.

L'homme semblait pourvu d'une capacité de déduction qui lui était propre mais le rassurait dans le choix de ses décisions.

-Toi, le petit, tu parais bien vif. Et tu as raison de ne pas quitté la boule de givre des yeux car c'est elle qui est la cause de tout.

Après un temps de réflexion pendant lequel ses yeux voyagèrent rapidement de Miel à Cassiopée, puis à l'homme portant l'orbe pour revenir à Cassiopée :

- Vous, vous êtes magicienne ?

Mais sa voix s'était faite souffle et il avait entrainé ses interlocuteurs dans un grand geste les forçant à s'accroupir car l'orbe iradiait à présent d'une aura dont Cassiopée ressentit les premières ondes avant qu'elles n'atteignent leur corps.
Ces longs doigts se posèrent sur ses lèvres et s'écartèrent dans le frémissement des mots exprimés comme un râle, imprononçables pour tout inculte.
Un masque les enveloppa tous trois avant que l'onde ne parviennent à eux, mais elle la sentit parfaitement chercher les êtres vers lesquels elle se destinait.
L'effet sur les hommes, femmes et enfants accroupis fut instantanné. Tous se levèrent d'un seul corps en levant leur arme qu'ils avait sortis de leur étuis et qu'ils brandissaient en appelant la mort.
Un homme tourna son visage vers sa compagne tout en hurlant des cris de guerre et les trois protégés purent voir ses yeux injectés de sang qui frolaient la folie.
En entendant la vague de haine, Kalys avait porté ses mains à sa bouche, totalement effrayé par ce qu'il découvrait. Mais quand il vit le visage empreint de fureur et les yeux habités de l'homme qui avait été son ami. Il se cacha les yeux pour ne plus rien voir.

-Je savais que la boule était la cause mais je ne savais pas ce qu'elle nous faisait. Je voyais les morts, mais je ne savais pas d'où ils sortaient. Lorsque nous ne sommes plus sous son effet, nous sommes entourés de morts et nous ne comprenons pas d'où ils viennent.

Il se répétait, comprenant soudain tous les massacres que les siens avaient réalisés sans le savoir. Sans le vouloir.



Lumeï

Son âme sembla voyager, traverser de nouveaux méandres ayant débloqués les mystères de ces derniers temps. De ces dernières années. Toutes ces années gâchées, fichues en l'air pour une satanée boule de magie qui finalement était à l'origine des morts de leur propre peuple créé, nouveau, emprunt d'espoirs.
Les Mercenaires avaient perdu leur but premier. Celui de se révolter contre un monde de pouvoirs auxquels les pauvres n’accédaient pas et eux, avant paysans, maigres marchands, petits artisans ne pourraient jamais prétendre. Ils se voulaient dissidence. Ils voulaient faire comprendre à ce peuple qu'ils avaient la capacité de donner naissance à une nouvelle façon d'être et de concevoir le monde. Leur montrer ce possible. Non, l'élaborer. Être ce possible.

Kalys était terriblement déçu et en colère car son nouveau peuple s'était perdu emportant avec lui des morts dont il était l'auteur. Il n'en avait même pas conscience. Et Kalys lui-même venait seulement de se réveiller, les yeux écarquillés comme un enfant qui découvre que le mensonge existe et se coince parfois en habitude entre les dents des adultes.

Kalys avait une voix triste, maintenant. La mine un peu sombre.
Il devait digérer l'amertume pour la transformer en force mais il ne le savait encore. L'enfant-phénix lui sourit.

- Vous êtes pris par surprise. Et vos propres mots vous ont révélé l'ampleur du travail de votre "nouveau peuple", Kalys.

L'enfant pencha la tête.

- Mais soyez indulgent, c'est humain après tout.

Kalys fit une moue à demi-froide à demi-sèche comme les roches que le soleil a tanné. Il ne répondit pas car sa blessure nouvelle était trop récente.
En revanche, il s'adressa à la Damétoiles en ces termes avec espoir qui fleurit sur le bout des lèvres et attente extrême :

- Si vous m'acceptez, je peux vous aider. Je n'ai nulle part ou aller. Je ne suis lié à personne. C'est la seconde fois que le peuple auquel je crois dégringole monstrueusement. Acceptez-moi, je vous prie. Et emportons cette orbe avec nous, pour la faire disparaître à jamais. Ne gardons que la clef, elle est dans le coeur de l'orbe de toute façon. Elle sera à nouveau à découvert mais c'est prendre moins de risques, moins d'issues fatales.

Un instant.

- Je vais aller dérober quelques outils au forgeron dans sa réserve pour qu'il le remarque le plus tard possible. Ne bougez pas, je reviens tout de suite.

Et le voici qui partit à la dérobée sans laisser le temps de lui répondre.
Il connaissait l'histoire de ce peuple et mieux encore, le fonctionnement de la clef. Il serait un élément important pour le Livre de l'histoire du Phénix.



Cassiopée

Cassiopée avait écouté Kalys attentivement. Elle écoutait ses paroles et chacun de ses gestes. Elle était attentive aux petits plissements d'yeux, à la ride qui marquait brutalement le coin de la bouche quand le dégoût s'éveillait. Les mots comme le corps ne mentaient pas.

-D'après toi Miel , cet homme est-il prêt à se mettre en danger pour empêcher son peuple d'agir sous la contrainte ?

Miel sourit tristement, l'air lointain.

-Il est bien plus en danger quand son esprit n'est plus à lui ? Tout homme est en danger sous le charme de cette boule de givre.

L'orbe avait fait son œuvre et le chef tenait maintenant la sphère dans sa main droite et se dirigeait vers un cheval que lui présentait un gros homme. Il monta sur la bête avec sveltesse. Ainsi installé, il avait l'air d'un prince, éclatant de lumière dans ses habits blancs qui luisaient sous l'effet de l'artefact.

-Nous pourrions agir maintenant, mais je voudrais connaître le but de cet homme et quelle est sa cible. J'aimerais les suivre.

La Dame du Sang avait maintenant l'air farouche. Ses yeux se plissaient sous l'effet de la colère sombre qui s'était éveillée en elle.

- Je voudrais savoir qui il est et comment il a été en possession de l'orbe. Viendras-tu avec nous ?



Lumeï

L'enfant-phénix plissa ses yeux. Il observait comme la Damétoiles, calmement, le chef des Mercenaires s'affairer en discours et en parade.

- Bien sûr que je viens. La même curiosité nous anime, dit-il d'une voix presque imperceptible, plongé dans des pensées qui ne semblaient pas de ce monde.

Son regard ne se détachait pas du groupe de fanatiques.

Soudain, l'enfant reconnut derrière eux les pas de Kalys précipités s'approcher. Il se prostra devant eux, un sourire malicieux fendant son visage doré. Son regard désigna le sac en bandoulière qu'il portait à son épaule gauche.

- J'ai tout ce qu'il nous faut, s'adressa-t-il à ses deux nouveaux compagnons. Par contre, il faut vous dire...

Il s'arrêta afin de vérifier que personne d'autre n'écouta ce qu'il avait à dire. Il ne fallait pas révéler sa traitrise tout de suite ou s'en était fini d'eux avant que l'orbe ne soit en leur possession. Alors, rien ne serait plus possible. Tous, seraient perdus.
Il reprit en baissant la voix de quelques tons :

- .. il faut vous dire que nous devons attendre que le rituel se réalise. A ce moment, le chef est seul dans une salle de l'autel plus loin, dans la montagne creusée par nos mains. Alors, nous devrons remonter un peu plus haut et échapper une corde bien accrochée à la roche. Nous descendrons jusqu'à la tente et là, il cogna soin poing droit contre sa paume gauche, PAF ! Nous aurons raison de ce fou !

Sans attendre, Cassiopée et Lumeï échangèrent un regard entendu : ils pourraient là, en profiter pour questionner cet homme sur les raisons qui le poussaient à agir ainsi, sur l'origine de l'obtention de cette orbe. Là, toutes les questions seraient possibles.
Tout cela, sans attirer l'attention de toute la troupe qui l'accompagnait sans cesse. Or leur nombre provoquait inévitablement la vigilance prudente du duo aux provenances un peu magiques.

Cassiopée acquiesça.

- Combien de temps dure le rituel ?

* Cela sera notre compteur *
pensa-t-elle.



Cassiopée

-Faut que je les prévienne à temps, pas trop tôt, pas trop tard.

Kalys marmonnait dans sa barbe, le corps prostré entre deux roches. Dans l'angle de vue qui était le sien n'apparaissait que la porte de l'autel dans lequel se tiendrait le rituel. Pour l'instant, seul lui venait le brouhaha de la foule qui scandait la prière devant le Sanctifus.

Lorsque que le silence se fit, Kalys leva le bras pour prévenir de l'imminence du l'instant crucial.
Il se recula vivement lorsqu'un semblant de mouvement s'ébaucha devant la porte. Il ne devait en aucun cas être vu.

C'est ce moment que Cassiopée choisit pour entamer sa descente vers l'autel. Il s'agissait en fait d'un petit sanctuaire à ciel ouvert, creusé à même la montagne dont l'entrée était strictement limitée à la porte gardée par Kalys.

Cassiopée n'avait pas vraiment besoin d'une corde pour rejoindre l'autel, mais il n'était pas question de mettre en avant un quelconque pouvoir devant Kalys ou tous ces mercenaires illuminés.
Elle s'appliqua à descendre d'un pas souple le long de la corde que Miel avait soigneusement nouée autours d'un gros rocher et qu'il surveillait en même temps que sa progression.

Le chef était entré dans l'autel le visage baigné de la luminescence de l'orbe. La tête penchée et l’âme totalement impliquée dans l'acte magique l'avaient empêché de sentir la présence de la Dame des étoiles juste au dessus de lui.
Il déposa l'orbe sur l'autel et s'agenouilla à ses pieds, les bras levés.

Cassiopée profita de ce moment pour sauter prestement sur l'autel, barrant ainsi toute possibilité à l'homme de s'approprier l'artefact. Avec adresse, elle fit glisser l'orbe dans sa main tout en formulant l'incantation qui freinerait l'énergie que l'objet pourvoyait au guerrier. Mais elle n'eut pas le temps de l'accompagner de la passe compliquée à réaliser d'une main qui devait lui intimer l'ordre de se taire.
Son cri poussé fut comme une alarme dans la nuit. La porte s'ouvrit vivement et il sembla à Cassiopée qu'une foule entrait dans un si petit sanctuaire.



Lumeï

Aussitôt Cassiopée eut elle le pied à terre que Miel sembla comme glisser agilement le long de la corde. Sa descente, discrète, ne se remarqua même pas des faucons qui vivaient dans ces montagnes. Nulle créature volante ne s'envola à son passage.
Miel fut rapide, grâce notamment à sa petite taille d'enfant fluet.
Ses deux pieds nus sur la terre ferme, il lança un regard à la Damétoiles pour s'assurer que tout se déroulait selon leur plan. Mais ce fut trop tard ! Son cri fin avait déjà percé et déjà, des hommes entraient et défilaient sans fin de l'immense porte d'entrée de l'autel. Tous s'engouffraient et se dirigeaient tout autour afin d'encercler la Damétoiles et son petit complice. Les hommes étaient ces fameux mercenaires qu'ils avaient voulu éviter mais leur plan avait vraisemblablement échoué.

La Damétoiles jeta un rapide coup d'oeil à Miel sur le côté, le questionnant intérieurement. Où était donc passé Kalys, s'était-il fait prendre au piège également ?
Ils le virent bâillonné sur un côté de la salle encadré par deux gardes grands et forts. Il ne s’échapperait pas de si tôt. La salle était bondée de gardes et de mercenaires civils. Leurs armes et leurs âmes s'entrechoquaient, trop proches les uns des autres.
La température dans la salle creusée dans la roche s’accentua.
Personne ne parlait. Miel s'éclaircit cependant la voix afin de s'exprimer, ce grâce à quoi la foule entière se tut  :

- Nous sommes ici car vous nous avez poursuivi et volé. Assumez plutôt votre méfait.

Sa voix de jeune enfant était douce et calme.
Il attendit que quelqu'un lui réponde et une voix se distingua dans la foule. Un cercle le laissant apparaître se forma :

- Tous les autres, tous ces hommes de loi qui nous ont volé et rien a été fait. Nous avons vécu pour certain les trois quarts de notre vie ainsi, jeune enfant.

L'homme était un peu âgé. De belles rides décoraient son visages. Ses yeux cependant étaient curieux car ils semblaient pleurer toujours. Comme si son âme était d'une tristesse immuable.

- Ils nous ont volé et dire ces hommes, ces rois, ces princes, ces hommes de lois divins comme mensonge ou voleur, c'est signer sa propre mort sur ses terres, jeune enfant.


Miel fit pencher sa tête à droite et fronça les sourcils.

- Alors, vous vous êtes enfuis pour reproduire la même chose ? le questionna-t-il.

Alors, tout le monde se tût et réfléchit.



Cassiopée

La réflexion fut cependant de courte durée. Car il apparaissait à ces hommes en rage, et usés avant l'heure par la rudesse de la vie, que  cet enfant les prenait bien de haut.

La réaction ne se fit pas attendre, les hommes les plus proches s'emparèrent de l'enfant en vociférant des mots devenus incompréhensibles dans le brouhaha qui accompagnait le mouvement de la foule.

Cassiopée comme Miel furent ceinturés, bousculés et extraits de la salle. L'homme en blanc qui s'était empressé de reprendre l'orbe leva la voix  au dessus du tumulte ambiant :

-Tuons ces infâmes voleurs ! Ces détenteurs de magies sournoises ! Que par l'Orbe, la force soit avec nous à jamais !

Ces derniers mots, émis d'une voix gutturale et rauque rendit le silence aux guerriers.  A ce moment l'Orbe se mit à briller et l'orateur poursuivit avec des yeux si grands ouverts et brillants qu'il semblait pris de folie.

-O Orbe du miracle ! Soumets à la volonté de notre Révélé Phénix ces deux être sacrilèges.

C'est alors que Miel, comme Cassiopée aperçurent dans la luminescence du globe les ailes majestueuses d'un Phénix. Il apparaissait les ailes déployées dans un immense brasier qui embrassait la foule.

Dans l'esprit de Cassiopée, le cri intérieur  que poussa l'enfant accompagna le sien.

-C'est moi !!
-Le Phénix !!

Mais le Chef continuait sa Prière au supplice :

-O Révélé Phénix, fais que ton Feu brûle le coupable. Que par ta flamme hurle le corrompu.

Déjà, quelques mercenaires plaçaient des fagots de bois sous les pieds des prisonniers.

Cassiopée regarda Miel.


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Message posté le 18:28 - 16 déc. 2015

Lumeï

Miel sentit le regard de la Dame le toucher. Il tourna la tête et la regarda à son tour. Il haussa les épaules.
Les deux êtres sentaient leur fin dans le monde humain approché à grands pas. Miel tâta du regard parmi la foule afin de distinguer où l'on avait mené leur nouveau compagnon mercenaire. Cependant, il ne parvint pas à le voir. Ils avaient dû l'amener ailleurs, dans une tente de bric et de broc ou une cellule improvisée. Son heure viendrait certainement plus tard.

*Les humains d'une même communauté ont tendance à pratiquer une certaine perversion envers ceux qui les trahissent. Quelle étrange coutume*

Le son de la voix de l'enfant s'immergea dans l'esprit de la Damétoiles. Miel sembla d'un coup vouloir la rendre témoin du fil de ses réflexions et ses constations.
Il était clair qu'ils n'étaient pas portés dans le cœur des Mercenaires ainsi que dans celui de ce Moine Fou.

Puis, soudainement, l'enfant éclata d'un rire joyeux. Un rire d'enfant.
C'était probablement la première fois que Miel donnait l'impression à Cassiopée qu'il était réellement un enfant. La sensation lui fut étrange.

- Nous ne pouvons pas mourir, c'est impossible, susurra-t-il à la Damétoile en penchant la tête de son côté entre deux éclats.

Les sourcils de Cassiopée se foncèrent.


Quant au Mage Fou, il proférait ce qui semblait des incantations rituelles afin de réveiller l'âme de l'orbe. Le phénix en image semblait un spectre violet dont la lumière, de cette même couleur mêlée à des reflets bleutés, semblait voler pour s'évanouir un peu plus loin. La foule était fascinée par le phénomène et rivait ses grands yeux sur l'orbe, toute ouïe. Puis le rire. Le rire, tout en même temps.
Après sa longue tirade religieuse, il répéta cette phrase :

- Ô Révélé Phénix, fais que ton Feu brûle le coupable. Que par ta flamme hurle le corrompu.

Le mage fou proférait avec passion et la folie valsait dans ses yeux brûlants. son regard se porta alors sur les deux intrus. Le phénix violet bleuté de l'orbe se détacha totalement de l’œuf comme si le cordon avait été coupé. Il vola un peu plus haut et grossit jusqu'à obtenir sa taille véritable.
Puis, comme le phénix le faisait pour communiquer, il emprunta la voix de son interlocuteur pour parler le langage des humains. Celui que seul ils comprenaient. Il usa donc de la phonation du Mage Fou pour parle-penser :

_* Comment oses-tu demander au Phénix de se tuer lui-même. Crois-tu qu'il le peut ? *_

Il parle-pensa avec une pointe de faux courroux qui se devinait aisément. Car si l'on penchait un peu l'oreille pour bien écouter, on décelait dans les mots et la manière de les lier, les prononcer, une pointe d'amusement qui fit sourire la Damétoiles. Elle commençait à connaître le Phénix, et Miel, une de ses formes humaines.



Cassiopée

Saisi d'entendre le phénix parler par sa voix, le chef écarquilla les yeux. Jamais encore la divinité ne s'était adressé à lui. Entendre sa propre voix sortir du corps du phénix le confortait dans son sentiment d'être l'élu.
Il se jeta à genoux aux pieds de l'entité lumineuse, le visage empli de passion.

- Je suis ton prophète, je suis ta parole !

Le rire de Miel résonna à nouveau dans le sanctuaire. Ses yeux moqueurs regardaient l'homme. Il était ébahi d'entendre l'homme professer une telle croyance.
Le mage se retourna sauvagement vers l'enfant. Son visage était chargé d'une cruauté mauvaise.

-Tais-toi, sale voleur !

Il se redressa de toute sa taille et fonça sur les prisonniers pour frapper Miel à toute volée.

-Mets-toi à genoux devant le Phénix qui se présente à toi !

Miel accusa le coup pendant que les hommes le forçaient à s'agenouiller en usant de leur poigne de travailleurs et de guerriers exercés.
Les genoux de l'enfant cognèrent le sol avec force, écorchant son jeune corps fragile.
Au moment où la plaie s'ouvrait au contact de la pierre tranchante, l'orbe s'embua d'une brume rouge et le Phénix perdit sa couleur violette pour s'empourprer d'un écarlate vif.
Celui qui se prenait pour le prophète se précipita vers la sphère magique la face catastrophée.

-Vois, tu l'as mis en colère.



Lumeï

- Mets-toi à genoux devant le Phénix qui se présente à toi !

*Ils veulent que je me mette à genoux devant moi-même* pensa l'enfant que l'on forçait à plier les jambes.

Cependant, il se laissa faire et malgré tout, la violence des gardes provoqua la naissance d'écorchures désagréables à ses deux genoux qui avaient tapés dans un bruit mat le sol rocailleux. Il ne grimaça pas. Mais il observa le Mage Fou, sourcils haussés.
Comment la folie pouvait-elle autant faire tourner la tête des humains ? L'enfant-phénix n'était pas dupe. Mais un sourire jaune naquit au coin de ses lèvres. Cela ne l'empêchait pas d'être déçu. Déçu par cet humain immonde.
Lumeï, le Phénix avait parlé à ce dément au travers de l'orbe. Il n'avait rien compris. Ou plutôt, il avait appliqué le sens qu'il voulait aux paroles de l'oiseau.

Miel sût.
Miel sût alors que parler au Mage Fou ne servirait à rien.

L'enfant avait la tête baissée. L'un des gardes appuyait lourdement sa main sur le côté arrière de son crâne afin qu'il puisse contempler le sol en punition. Mais le garde avait surtout peur de ce qui lui arriverait s'il ne parvenait pas à faire respecter le Grand Mage - comme on l'appelait, ici - par cet enfant insolent qui riait de façon indécente.

Malgré la pression, l'enfant parvint à tourner la tête vers sa droite afin de voir la Damétoiles entre ses cheveux qui pendaient par petite mèches. En effet, ils avaient poussé depuis le début de leur voyage et l'enfant ne s'était certainement pas occupé à s'encombrer de ciseaux. Un cheveu n'importait pas pour le voyage qu'ils entreprenaient. Et la scène qui se déroulait aujourd'hui, ici, le lui confirma.
Miel lança un regard à la Damétoiles et lui dit en ce langage qu'eux seuls pouvaient utiliser soit, la pensée commune :

*Nous devons penser à fuir très vite. Phénix nous aidera sûrement mais cet homme devient encore plus fou de minute en minute.*

Il l'aperçut acquiescer de la tête. Puis :


*Nous devons trouver un moyen de nous libérer des gardes qui nous collent au sens propre du terme. Il faut impérativement leur glisser entre les doigts. Alors, Phénix pourra déjouer la réalité, c'est-à-dire transformer et maquiller l'espace en illusion pour eux. Tu as déjà vu ce procédé, d'ailleurs. Il va faire la même chose pour nous permettre de récupérer l'Orbe. Quand nous l'aurons en main, déjà, j'aurais plus de pouvoirs et surtout, nous aurons les mains libres.*


Comme affirmation, les yeux déroutants de Miel, multicolores brillèrent un peu plus intensément.



Cassiopée

Mais avant même que Miel n'agisse, le « grand mage » prit l'orbe dans ses mains. Il la tint entre ses doigts près de son visage passionné dont le regard agrandi par l'adoration ne quittait pas le phénix. Dans sa contemplation, il cherchait à voir les messages des dieux. Il y entrevoyait des futurs opaques et des bribes de lumières d'un monde pour lui inconnu mais tellement attirant. Pris d'un élan amoureux transi, il serra l'orbe contre son cœur entre ses deux bras serrés  avec force contre lui. Pendant ce temps, tirés et poussés à la fois, les prisonniers furent traînés à l'extérieur de la crypte.

Dans la crainte de perdre de vue l'orbe magique, Cassiopée chercha à se défaire de la poigne ferme qui lui étreignait la nuque et les mains. Mais son gardien réagit violemment à sa tentative et la frappa de son arme sans ménagement, brisant son arcade sourcilière.
A moitié étranglée par l'homme de main, elle jugea que le jeu avait assez duré.
Il lui suffit d'un mot prononcé si bas que le garde eut pu croire à un juron pour que le vent réponde à son appel. C'était un vent froid chargé de cristaux aussi tranchants que le gel.

La réponse des hommes fut aussi instantanée que le changement climatique.  Tous s'arrêtèrent net, presque gelés sur place. Leurs dents s'entrechoquaient dans un réflexe involontaire d'auto-protection. La poigne qui tenait les deux prisonniers se desserra inconsciemment.
Miel et Cassiopée eurent le regard entendu des êtres dont le rayonnement intérieur a pour origine les feux fervents des cieux.
Autour d'eux, le froid glacial semblait avoir statufié le monde.

Cassiopée put alors redresser la tête. Juste à temps pour voir le chef réchauffé par la sphère miraculeuse, se glisser en dehors du sanctuaire les bras chargés d'un trésor. Il avait le visage éperdu de celui qui ne comprend pas. Il fuyait les lieux comme le voleur se sauve en emportant son butin.

L'âme stellaire de la Dame du Sang entra alors en contact avec la brillance intérieure de l'enfant :

- Veux-tu que j'arrête cet homme ou t'en chargeras-tu dans l'instant ? Je voudrais que tu me montres le pouvoir du Phénix. C'est pour le rencontrer et le connaître que je suis ici.
Montre-moi comment la couleur peut changer le monde.



Lumeï

Miel regardait le mage s'enfuir pendant que la Dame lui exposait sa requête. Il acquiesça de la tête mais ne sachant si elle l'avait vu, il enchaîna :

- Je peux et je vais.

La mine de l'enfant était songeuse, grave. Comme si montrer le Phénix n'augurerait rien de bon ici.


- Je dois te dire que peu d'humains doivent voir le Phénix. C'est une des raisons pour lesquelles nous existons tous les deux... L'enfant marqua une pause légère. En réalité si tu le vois maintenant, avec tous ces Mercenaires, tu ne pourras pas lui parler.

Il y avait une légère pointe de déception dans son ton. Il haussa les épaules puis s'élança.

Aucun des gardes ne le vit : l'enfant sembla comme disparaître dans la foule de Mercenaires. Il s'était élancés entre leurs jambes et son jeune âge lui permettait un atout de discrétion fabuleuse !

Soudain, un phénix s'éleva d'entre le foule. On ne savait pas d'où il venait ni pourquoi il était là. C'était l'oiseau vénéré par le Mage et ses Mercenaires, celui-là même qui était apparu dans l'orbe violette.
Le Phénix grimpa l'air bien mieux qu'un escalier de nuages. Il était plein de couleurs. Il semblait être une créature de fête, de vie. Il brilla dans le ciel.

Lumeï, qui était ce Phénix, regarda longuement la Damétoile pour en suite s'en détourner. Puis, la réalité se déforma. Le temps semblait comme arrêté. Les Mercenaires donnaient cette impression de ne plus voir Cassiopée. C'est pour cause que le Phénix l'avait caché d'eux en jouant les réalités. Et les hommes ignorants de l'univers ne la virent pas se glisser dans cette autre réalité.
Un fil de rouge, d'orange et de bleu mêlés partaient de Cassiopée et se dirigeait vers le minuscule orifice par lequel le Mage maléfique s'était glissé. La Damétoile comprit que l'oiseau-aux-trois-cent-couleurs lui montrait le chemin. Elle s'empressa alors de suivre les couleurs mariées.



Cassiopée


Autour de Cassiopée l'immense feu que le Phénix avait allumé dans le ciel réchauffait le cœur des hommes qui tous tombaient à genoux les uns après les autres.
Un chœur de voix mâles et graves chantaient les louanges de celui qui leur apparaissait, plus grand, plus beau que dans leurs prières les plus folles.
Au dessus de ces basses qui rythmaient la Parole, s'élevait le chant du Phénix. Il était la flamme. Il était la vie. Il racontait le monde aux couleurs infinies. Alors, bientôt, les hommes se turent, les visages levés et les faces épanouies dans l'écoute.
Le chant s'élevait au delà des sons. Le chant les élevait.

Pendant ce temps, Cassiopée n'avait pas perdu le sien. Elle avait suivi le chemin lumineux tendu par le Phénix. Ce lien coloré disparaissait au fil de son avancée. Les couleurs la précédaient dans le labyrinthe de couloirs du passage souterrain qu'avait emprunté le voleur.
La voie était libre, facile, et Cassiopée n'eut aucun mal à arriver devant une porte close sous laquelle passait un rai de lumière dont le Phénix n'était pas la source.
Elle posa son oreille sur la porte et entendit les bruits d'objets que l'on déplaçait. Alors, elle poussa le lourd battant de bois. La porte s'ouvrit sans un bruit. Si l'homme se retourna, la raison en fut sans doute que l'air frais du couloir entrait en même temps que la Dame du Sang.
Il était en train de fouillé dans un coffre qu'il ferma d'un coup sec en voyant Cassiopée si proche de lui. D'un réflexe rapide, il prit l'orbe qu'il avait déposé à ses côtés dans ses mains et se releva d'un bond.

-Que faîtes-vous là ? Le ton était autant agressif que surpris.

Comme l'homme n'était pas armé, son regard se posa vers l'épée accrochée au clou sur le mur opposé.

-Ne cherchez pas à vous défendre. Vous ne pourriez pas agir contre moi. J'ai des questions à vous poser. Peut-être accepteriez-vous de vous asseoir tranquillement afin de me répondre.

Le ton se voulait tranquille et rassurant. Mais il n'eut pas l'effet escompté. L'homme bondit sur son arme tandis que Caph, l'étoile variable de Cassiopeiae, habillait sa reine d'un œuf protecteur, simple précaution pour faire face à celui qui se positionne ennemi.

Quand l'homme, tenant la sphère d'un bras se jeta sur Cassiopée. Elle ne bougea pas. Elle ne chercha même pas à éviter le choc. L'épée cogna l'air devenu plus dur que le roc et brisa net la pointe.

Il regarda le moignon d'arme qui lui restait entre les mains, et d'un regard furtif visualisa la porte encore ouverte.

Cette fois, ce fut vers la sortie qu'il s'élança. Mais comme par miracle, avant qu'il n'ait pu franchir le pas, la porte se ferma violemment devant son nez.

Alors, d'une voix revêche, il dit :
-Que voulez-vous ?



Lumeï

Miel se dirigea donc vers le coffre que le vieux fou avait regardé lorsque la Damétoile l'interrogeait. Même si l'enfant était arrivé après, il y avait une telle symbiose des âmes quelque soit l'univers, que les êtres magiques n'avaient nul besoin de poser des mots, parfois, pour se comprendre ou se dire certaines choses.
Ainsi, l'enfant avait lu dans son âme. Et il avait également effleuré celle du grand fou dont les vêtements somptueux étaient tout de violet peint en adéquation avec la couleur de l'orbe. Le feu dans la petite cheminée d'appoint crépita. Les reflets du vêtement faisaient briller leurs yeux.

Miel ouvrit la malle de bois sombre dont il sentait remonter les effluves jusqu'à son nez. Ce que l'enfant aimait cette odeur de bois ! Ce bois était vieux. Il avait un peu pris la poussière et sa forme générale était par endroit gonflée. L'humidité avait travaillé le bois.
Il faut dire qu'ils 'étaient dans une étrange petite montagne et que de la neige poudrait encore quelques cimes rocailleuses.
Miel n'avait pas à se baisser pour attraper les objets qui peuplaient la malle mystérieuse.  Il était petit et toute sa taille était nécessaire afin qu'il plonge ses mains dans l'immensité cachée.

- Je suis un pirate chez les pirates. Quel trésor trouverons-nous-là, petit grand monsieur ?

Il eut un soupçon de rire derrière une barbe qui un jour se formerait. Mais l'enfant était encore trop jeune pour avoir même un léger duvet. Alors, il faudrait se l'imaginer.

Dans la malle, ses mains faufilées dansèrent dans l'obscurité. Puis, elles rencontrèrent quelque chose. Une tranche dure et rêche de livre. Dessous et à côté, il y en avait également d'autres.
Alors, Miel décida qu'il fallait ouvrir la malle baillant en très grand afin que la lumière du feu ou d'une bougie éclaire le coin entassé de livres.
Il allait falloir vérifier les dires du vieux fou tyran car il avait une vile préférence pour les mensonges plutôt que la véracité.
Le coffre de la malle s'appuya à son maximum contre le mur de la salle qui était en fait, une parois de la montagne. Ceci fait, l'enfant s'accapara une lampe à huile qui servait probablement au tyran lorsqu'il restait dans cette pièce pour travailler à ses folies furieuses.
L'enfant le regarda :

- Il n'y a plus d'huile. Où puis-je en prendre ?

Le mage fou était tout tremblant. Il désigna de la tête un carton sous un des bureaux. L'enfant y récupéra une des gourdes remplie d'huile pour remplir la lampe. Il s'approcha du feu pour faire naître une deuxième lumière dans cette salle.
Ainsi y verraient-ils mieux.
Cassiopée surveillait le mage fou de près, Miel revint pointer le bout de son nez au-dessus de la malle littéraire : et là, dessous, il vit briller la tranche d'un livre d'une lueur multicolore. Ces couleurs étaient celles du phénix, comme nous le savons déjà. Même si par l'orbe, il se manifestait plutôt avec une couleur majoritaire : le violet.
Alors, l'enfant écarquilla les yeux. Son petit visage s'illumina d'un merveilleux sourire.

- Damétoiles, notre sieur nous a encore menti sur un point, dit-il tout content.

Ils avaient trouvé le livre !
Miel allait pouvoir raconter de nouvelles choses sur le Phénix à la Damétoile ainsi qu'il lui avait promis.
Mais aussi, allaient-ils d'abord devoir sortir d'ici sans trop de déboire, le livre sous le bras. Et surtout, ils allaient devoir trouver un autre endroit, plus sûr pour cacher à nouveau ce fameux livre précieux qui avait été l'origine même du voyage de l'enfant et de la Dame.
Ils allaient aussi devoir retrouver Don Cardero. Car si le mage fou avait menti sur un point, il n'avait pas menti sur celui-là. L'enfant avait vu l'image très nette de cet homme dans son esprit. Ils allaient devoir effacer le Phénix de sa mémoire, de son âme.

Aussitôt le livre rangé dans sa besace, méticuleusement refermée, Miel prit un air grave et regarda fixement le Mage Fou.

- Il est temps, dit-il à la Damétoile.

Il se rapprocha, légèrement pressé.

- Par les vents qu’Éole m'a porté, nous devons nous faire nos adieux Mage Fou.

Cela semblait une sentence.

- Les vents et la lumières ne sont pas très contents de vos actions et pour réparer votre erreur, il faut rétablir le cours des choses. Adieu, Mage Fou. Car jamais vous ne nous reverrez.

Alors, l'enfant sembla happer l'âme du Mage par son regard curieux. Les couleurs tourbillonnèrent dans ses yeux et luisirent encore plus que d'habitude. Arriva alors l'apogée : des pupilles du Mage Fou sortit une sorte de fumée violette qui étaient attirée par celles de l'enfant. Il le happait toujours de son regard et non pas en ce sens plus réaliste de l'expression car c'était ici, réel. Il le happa tout entier. Dans le moindre de ses souvenirs de  la Damétoiles et surtout, du Phénix sous toutes ses formes.
Il n'y eut plus qu'un mince filet violet qui réintégra les pupilles de l'enfant puis, plus rien.  Cet instant-là ne dura que quelques secondes avant que la Mage Fou ne s'évanouisse et s'endorme d'un sommeil paisible.
Il fallait bien combler tous ces souvenirs arrachés.

La Damétoiles, effarée, contemplait la fin de la scène quand l'enfant s'était déjà dirigé vers la porte. C'est qu'il ne perdait pas de temps, celui-là.

- Mais... dans la salle, il y a tous les autres ? avança-t-elle avec prudence.

Et elle n'avait pas tort.

- Ils sont encore endormis. Et si tu veux mon avis, ils risquent de dormir longtemps, le temps de se remettre !

L’œil de l'enfant, malicieux et satisfait disparut de l'encadrement de la porte. Il avait déjà filé.



Cassiopée

Abandonné au fond du souterrain, l'homme dont les souvenirs avaient été remodelés, reposait dans un sommeil d'enfant heureux. Miel et Cassiopée avaient rejoint l'air libre et avaient enjambé les corps écroulés qui  jonchaient le fond du val encaissé. Ils dormaient comme des bébés, le sourire sur les lèvres, perdus dans des rêves enchanteurs.

La Dames du Sang et l'enfant phénix regardaient la nuit sombre sans lune où pas une étoile ne perçait. Ils s'étaient arrêtés sur le piton rocheux et surplombaient la vallée qu'ils s'apprêtaient à descendre.

Miel dit de sa voix enfantine :

-Ce Don Cardero ne peut être loin. Il connaît la valeur du livre et doit chercher à le retrouver.

Cassiopée scrutait l'horizon cherchant dans la nuit les lumières des villes. Elle s'inquiétait, cependant.

-As-tu vérifié que ton livre était au complet ?

Miel regarda la Damétoile en plissant le sourcil, dubitatif.

-Tu penses que certains objets pourraient avoir été subtilisés ? Que Don Cardero aurait pu réussir à ouvrir les clés de certaines formules historiques ?

-Je ne sais pas du tout ce dont ces hommes sont capables. Mais tu m'as bien dit que l'orbe envoûtante sortait de ton livre. Alors, je crois que rien n'est impossible.

Calmement, l'enfant s'assit sur un rocher et ouvrit le livre qu'il tenait encore sous le bras. Il prenait le temps de tourner chaque page, plongeant son regard dans les profondeurs d'un contenu abyssal.
Cassiopée n'avait pas bougé. Ses yeux s'attachaient à un carré de ciel sur lequel perçaient quelques points brillants. Ouverture vers l'infini.
Mais sa contemplation fut interrompue par la lueur orangée qui s'échappait de la page que Miel venait de tourner.

-Le orange est couleur de colère. Le Septon a été subtilisé. Le Septon est unique et son pouvoir est grand.

-Tu ne l'as pas vu la salle de cet homme que nous venons de quitter ?

-Oh, non. J'aurais perçu sa présence s'il avait été dans mon environnement ! C'est sans aucun doute ce Don Cardero qui se l'est approprié. Mais il l'a fait sans que son acolyte le sache car il n'apparaissait pas dans ses souvenirs.

Miel était contrarié. Son mince visage exprimait une sévérité que Cassiopée ne lui avait jamais vu depuis qu'elle était en sa compagnie.

-Dis-moi, qu'est-ce que le Septon ? Quel est son pouvoir ? Tu sembles si inquiet tout d'un coup...



Lumeï

Miel sérieux, expliqua à la Damétoile :

- Le Septon est un médaillon précieux dont les ciselures magnifiques seraient reconnues comme un travail méticuleux perdu. Parfois, des informations se perdent au fil des hommes, des fils, des filles et certains humains éteignent des pratiques et des savoirs majestueux, précieux. Cet art est mort. Ancien. Il a bien sûr été source d'inspiration pour d'autres arts mais celui-ci a emporté avec ses ouvriers ses techniques bien spéciales pour faire ce type de travail manufacturé.

En même temps que Miel parlait il faisait apparaître des faisceaux lumineux au dessus du sol malléables auxquels il donna forme : le fameux médaillon, la pièce principale et sa chaîne. Le médaillon était très finement travaillé en effet et les ciselures semblaient de minces fils collés adroitement sur le métal. Pourtant ce n'était pas le cas. Ce travail était manuel et Miel, l'avait vu se concevoir puis se fabriquer par le regard du Phénix.
L'enfant soupira. Il allait, dans son explication, toucher le point sensible, inévitable pourtant. Cette raison pour laquelle leur chemin avec le retour de l'orbe dans le livre de L'Histoire du Phénix ne faisait que le début du chemin de Cassiopée et lui.

Le regard contrarié, Miel s'exprima :

- Le problème le plus important dans cette histoire, c'est que même si Don Calderon ne réfléchit pas très bien ou tout du moins de façon maladroite, alors nous sommes vraiment, vraiment, vraiment dans une fâcheuse posture, Damétoiles ! Je vais t'en dire plus sur le pouvoir du Septon.

L'enfant pesa ses mots :

- Lorsque tu portes le médaillon à ton cou, tu deviens invisible aux yeux du monde. Mais ce point n'est pas très important car il ne concerne que le monde des humains. Nous ne serons donc pas embêté par ce petit détail.

Cassiopée acquiesça, toute ouïe. L'atmosphère, malgré leur maîtrise générale de leur émotions, commençait à se tendre bien plus qu'elle ne l'avait été pour l'orbe et le livre.

- Le plus inquiétant, c'est que cet objet reproduit de façon physique une image mentale lorsque le détenteur de l'objet est sous l'emprise de la colère.

Les deux êtres magiques frissonnèrent.

- Tu comprends donc la dangerosité de la situation. Le simple fait qu'une telle magie soit dans des mains humaines rend complexe le repos du Septon. Les humains ne maîtrise pour ainsi dire que rarement leurs émotions. Et je rajouterais que le problème de base de ce Don Calderon est sa frustration. Il l'a bien montré, vu comme il s'est comporté en filou avec le Mage Fou. Emportant le plus important.

Une pause.

- Sais-tu pourquoi cet objet plus qu'un autre ?

- Non, répondit-elle pensivement.

- Parce qu'il a lu le livre entièrement. Et qu'il sait que c'était l'objet le plus effectif dans les mains d'un humain, lui apprit-il, amer.

Miel était vexé. Ils avaient résolu un problème qui leur semblait bien gros qu'ils n'avaient pas vu venir pointer un autre bien plus important.
Il regarda le ciel, perdu dans ses pensées puis :

- Nous allons devoir nous hâter, nous n'avons pas de temps à perdre ! Constata-t-il.



Cassiopée

User de la magie n'est pas sans conséquences dans le monde vivant. En abuser crée des bouleversements parfois délicats pour l'humanité et tout magicien sait que son Art doit être méticuleusement entretenu.

C'est ainsi qu'après d'âpres pourparlers, Miel et Cassiopée avaient opté pour poursuivre leur route à pied. Cassiopée aurait volontiers user d'un souffle de vent et le courant porteur les aurait menées jusqu'à Vandcimes. Mais la sagesse voulait que l'effort soit au rendez-vous de leur quête.

Alors que la route s'ouvrait longue est droite devant eux, les deux acolytes allongeaient le pas et Cassiopée en profita pour confier ses craintes à son jeune mais si puissant ami.

- Es-tu certain que le livre te guide dans la bonne direction et que Don Calderon se trouvera bien au bout de la route ?

- Tu m'as déjà posé cette question trois fois, sais-tu ? Que puis-je te dire de plus ? Le livre est notre seul guide possible. Si tu veux porte-le, tu sentiras le vide et l'attirance qu'il produit sur lui.

- Non, non ! Je te fais confiance ! Tu sais mieux que moi comment t'y prendre. J'ai seulement l'impression d'avancer sans trop savoir où je vais et cela m'est désagréable. De plus, je dois dire que m'aventurer en territoire de l'Unique ne me plaît qu'à moitié. Nous allons devoir jouer finement.

- Tu n'en as plus pour très longtemps l'abbaye est en vue, regarde !


En effet,  l'Abbaye de Vandcimes montrait à présent sa célèbre flèche qui se dressait au lointain au dessus des arbres. Le haut de la coupole centrale était à peine visible et se perdait dans la brume.
Quelques heures de marche les menèrent devant les portes de la grande bâtisse. Le soleil décroissait sur l'horizon et la nuit ne tarderait pas à tomber.

Cassiopée s'était pour l'occasion vêtue de la laine sombre et nuageuse des jours de pluie et avait recouvert ses blancs cheveux d'une longue écharpe de nuit noire. Entrer dans un temple de la religion de l'Unique rigidifiait sa posture et son esprit fermé vidait son regard de ses tâches de Sang.



Lumeï

Arrivés devant l'Abbaye de Vandcimes, les deux êtres s'arrêtèrent pour contempler son architecture. Beaucoup disaient que la bâtisse datait de l'époque des Vikorms*, peu savaient réellement et Phénix riait dans ses plumes de couleurs.
Les vieilles pierres étaient usées, polies par le vent qui soufflait fort en hiver. La coupole centrale, de près, semblait s'étendre tel l'immensité d'un lac, grisonnant. Elle devait probablement refléter avec merveille la lumière en journée. Cependant, cette coupole semblait avoir perdue de sa couleur. Les pierres avaient-elle également porté un jour, de la couleur sur leur surface ? Quelle mystérieuse question !

La Damétoiles regarda à nouveau la grande porte de bois du côté du pont levis. Une flamme léchait une torche pendue en l'air comme par magie. Évidemment, c'est qu'un garde la tenait bien en main. Et il semblait aussi s'ennuyer un peu puisqu'il la faisait danser.

Ils avaient besoin que le pont levis soit abaissé.
Dame Cassiopée baissa son capuchon sombre et lança loin son regard en direction de la lumière minuscule.

- Hé ! Ho ! Nous sommes des voyageurs, nous avons marché pendant des jours et nous cherchons un abri pour la nuit !

La flamme dansait toujours. C'était à se demande si le garde les avait même entendus.
La Dame retenta :


- Oé !??

Rien ne changeait.
Miel posa sa petite main sur le bas du dos de la Dame.

_* Je vais vérifier quelque chose. *_ parle-pensa l'enfant-phénix.

Son regard se perdit dans une Néante. Il fallait voler vite pour suivre sa pensée. Poursuivre le chemin. La Dame regardait les yeux de l'enfant briller de différentes couleurs plus intenses qu'à leur accoutumée. Des plumes de ces mêmes couleurs à demi-transparentes apparurent sur le joues d'enfant, illuminant l'obscurité puis soudain, disparurent.

_* La torche est tenue par une ancienne magie redoutable. Nous devons trouver le souterrain de secours. Crois-moi, c'est un vieil édifice qu'il en existe une autre entrée. *_

_*Acc-ord. Hât-ons   -   nous.*_ parle-pensa-t-elle à son tour.

La Damétoile comprit à quel point ils étaient en danger. Ils devaient en apprendre un peu plus sur cette abbaye avant de se déplacer à couvert. Elle se concentra donc pour créer une brume efficace qui ne permettait que de voir pas plus loin que le bout de son nez. Elle était Dame des étoiles et voyaient donc à travers les intempéries. Quant à Miel, qui sait donc ce dont cet enfant est capable !

Ils reculèrent jusque dans la forêt, aux abords de l'abbaye et se mirent à en faire le tour.


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* Epoque des Vikorms : une des plus vieilles années du monde. Il y a plus de 200 000 mille ans. On dit qu'à cette époque, une forme d'humain très évoluée existait. Le nom de ce peuple était d'ailleurs Vikorm. Cependant, pour une raison oubliée, la plupart ont disparu, leurs savoirs avec eux. Les humains actuels sont au demeurant leurs très lointains descendants mais peu savent leur existence. Et ceux qui la savent ne sont généralement pas humains.

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Cassiopée

Ils firent le tour de l'Abbaye à distance respectable, mais ils ne trouvèrent aucun signe pouvant les mener vers une sortie de souterrain. Ils mirent pourtant en œuvre leur talent afin d'exacerber leurs sens. Ils décidèrent donc de se rapprocher et se couvrirent d'ombre pour ne pas être repérés.
Le moindre son ou souffle d'air incongru était analysé, surveillé. Mais aucune résonance caverneuse évoquant les longs percements du sol ne fut repéré. Aucun souffle d'air aux odeurs de renfermé ou teinté de la vieillesse d'un bois travaillé ne fut détecté.
C'est la trace régulière d'une sommité convexe sur quelques mètres dans un clair bois qui appela leur attention. En cherchant bien, la sonorité sous leur pas, lorsqu'ils se trouvaient au sommet de cette protubérance, les guida vers une grosse pierre posée sur de plus petites.
Ils firent rouler la pierre sur elle-même et constatèrent qu'ils ne s'étaient pas trompés. Ils avaient sous leurs yeux l'entrée d'un tunnel . Il n'y avait plus qu'à espérer qu'il les conduirait vers l'Abbaye. Mais il y avait fort à parier que le chemin serait celui-ci.
Le tunnel était réduit et Cassiopée devait se courber pour avancer. Ce n'est qu'au bout d'une trentaine de mètres qu'il s'élargit afin de permettre une marche normale. Les deux amis pouvaient à présent marcher de concert côte à côte.
Le souterrain n'avait pas servi depuis bien longtemps. Une poussière très fine et légère s'était déposée sur le sol et soulevait des nuages sous les pas légers de Miel Cassiopée.
Ils se faisaient le plus silencieux possible et s'est sans un murmure que la Dame Étoile s'enquit auprès de l'enfant :
* Nous serons bientôt arrivés. Mais le lieu est un peu effrayant. As-tu une idée du lieu où nous mène ton livre ? Il pourrait nous mener dans la gueule du loup que nous irions tout droit pour nous y faire dévorer. Et je t'avoue que je n'aime pas ça du tout.*
L'enfant-phénix n'eut pas le temps de lui répondre que le livre les poussaient à s'arrêter net.



Lumeï

Le livre magique s'était élevé des petites mains de l'enfant pour nager en l'air comme un petit oisillon. Ses pages étaient ouvertes telles de grandes ailes et bruissaient curieusement dans le tunnel creusé. Le son rebondi était étouffé, sourd. Puis soudain, du livre naquit une lumière fluorescente de dorés mêlés à un bleu si froid qu'il en glaça le sang des deux compères.

_* Les couleurs du Septon ! La couleur de son âme ! *_

Dans cette obscurité, cette vive lumière exulta l'ébahissement de leurs visages. Chaque détail paraissait comme grandit et les deux créatures en plus d'être magiques donnaient ainsi l'impression d'être surnaturelles.
Puis des fils bleus s'ébrouèrent dans le vide pour former à ce qui ressemblait à des symboles. Cassiopée et Miel penchèrent la tête.
Non, c'étaient en fait des lettres ! Le médaillon les appelaient !

V.A.S.C.E.

Les lettres étaient apparues chacune leur tour. Miel n'avait pas tout vu mais en rassemblant ce qu'il avait réussi à distinguer avec la Damétoiles, ils purent reconstituer le mot. Surtout que le Septon n'avait pas été très cordial en leur affichant les lettres dans le désordre.
Ils devaient donc se rendre dans les caves de l'abbaye.
Cela voulait dire plusieurs choses : d'une part, il y avait plusieurs caves, ils n'étaient donc pas arrivé au bout de leur recherche ! D'autre part, c'était pour cette raison que le livre s'était illuminé ainsi à cet endroit... Géographiquement, le médaillon devait être situé sous leurs pieds.

La Damétoiles tenta un sourire pour se rassurer, tous les deux. Rester le moins longtemps ici aurait mieux valu. Qu'il aurait été plus simple de pouvoir creuser à même la roche un trou direct. Cependant, même si la Dame avait les capacités de le réalisé, ils seraient immédiatement découverts. Or, déjà qu'ils étaient en infériorité numérique mais de surcroît, Don Carderon était malicieux et maléfique. Une magie terrible régnait ici, alors il fallait ne pas trop user de celle qui défendait des causes tout autres. C'était là toute la perfidie de ce genre de magie qui faisait que lorsque vous lanciez un sort de votre côté, que les soldats morts se relevaient aussi secs et multipliés.
Non, non, décidément, il valait mieux s'aventurer dans le tunnel sans lumière. C'était moins dangereux, moins effrayant et souvent moins triste, aussi.



Cassiopée

Miel avait maintenant pris la tête du duo. L'ouvrage à la main, il restait à l'écoute des signes que le livre leur enverrait pour les guider. Cassiopée marchait derrière l'enfant, mais son esprit n'était pas tranquille. Elle sentait un mal puant derrière les ombres sur les murs du tunnel.

Soudain, une souris surgit de nulle part et se glissa entre ses pieds et passa devant Miel puis s'installa contre la paroi comme pour les attendre. Une fois dépassée, la même scène se renouvela. La souris semblait vouloir les précéder, comme si elle voulait les mener. Elle poussait quelques piaillements délicats quand les deux amis passaient devant elle.
Cassiopée, absorbée par l'observation du rongeur et son comportement énigmatique, se détendait.
Sans s'en rendre compte, elle relâchait la tension qui durcissait les muscles de sa face à lui en faire mal. Elle se surprit à soupirer et à fermer un court instant les yeux tout en maintenant la cadence rapide de leur marche.

A ce moment crucial de la perte de son attention, elle se sentit littéralement recouverte et bâillonnée à la fois. Stoppée net dans sa progression. Elle se retrouvait pieds et poings liés derrière le dos sans pouvoir réagir. Les ombres s'étaient détachées du mur et sans un bruit, comme les ombres qu'elles étaient, l'avaient isolée de Miel sans qu'elle n'ait pu esquisser le moindre cri. Au même moment, sa bouche s'était remplie de terre et elle avait peine à reprendre son souffle. De la terre battue, des racines avaient jailli avant qu'elle ne parvienne à lancer un quelconque contre-sort et lui avaient lié les mains au dos et les pieds au sol.
Elle était prisonnière avec pour seule porte de sortie le cri d'appel mental qu'elle hurla dans la tête de Miel.



Lumeï

Miel avait senti que quelque chose n'allait pas et pour une fois, il n'avait pas remarqué la disparition de la Damétoile. Son enlèvement avait été d'une discrétion telle qu'il n'avait pas même détecté l'emprunte âmique qui avait procédé à cette séparation. Cependant, il lui avait semblé étrange que la Dame reste sur place, d'un coup, sans le prévenir. Et il aurait dû se poser la question dès la première milliseconde.
L'enfant s'en voulait et son visage était devenu plus sérieux encore qu’auparavant. Ils étaient restés précieusement ensemble pour ne pas se faire découvrir et surtout parce qu'ils ne connaissaient nullement ces lieux ni l’éclaircissement qui planait au-dessus de ces profondeurs et de ce château étrange.
Miel soupira intérieurement. Il fallait rassembler ses esprits pour se concentrer tout à fait et retrouver la trace de la Damétoile.
Il ferma les yeux et sa silhouette commença à s'entourer de lumières différentes et vives. L'enfant débutait sa communion avec l'univers pour ne sentir que l'espace et les pleins d'ici, pour s'oublier totalement. Au fur et à mesure qu'il brilla plus intensément, il pût déceler une légère emprunte de l'âme de Cassiopée. Elle était sous les catacombes du château, dans les profondeurs.
Miel pensa qu'il devrait redoubler d'efforts car, en étant silencieux et très prudents, ils s'étaient fait découvrir. De plus, Miel n'avait pas senti Cassiopée bouger et encore moins la personne qui l'accompagnait. Ce genre de chose était fort rare pour le petit enfant-phénix. Miel avait dit que cette magie noire qui dominait le château était ancienne et maléfique. Il ne s'était pas trompé. Ça semblait même pire que ce qu'il avait pu imaginer.

L'enfant ne perdit pas de temps. Dès qu'il localisa la Damétoile, sa silhouette brillante se modifia jusqu'à ressembler à celle d'un phénix. Il n'utiliserait pas son pouvoir pour traverser le temps et l'espace car, il était fort probable que cette magie noire en détecte quelque chose. Or, il ne pouvait même pas se permettre d'offrir le moindre doute à ce lieu malfamé et les gens qui l'habitaient. Des personnes certainement plus humaines depuis longtemps.
Le phénix se contenta donc de se concentrer pour cacher son emprunte âmique et se confondre totalement dans l'univers puis il se mit en route et vola doucement pour provoquer le moins de bruit possible. Il suivit le trajet nécessaire, un trajet long. Il vola pendant deux heures pour se rapprocher. Il était donc clair que la Damétoile avait été victime de magie pour être menée sous le château aussi vite.
L'oiseau de couleurs dût s'arrêter promptement lorsque deux voix percèrent les cavités souterraines. Le phénix gomma sa présence physique. Un simple tour de passe-passe grâce à un accord avec l'univers. L'oiseau disparu.
Il ne pouvait discerner les visages qui parlait à cause de l'obscurité qui régnait. Cependant, à leur voix, l'enfant devina que ces êtres étaient magiques. Des voix éraillées et d'un grave inhumain comme si leur souffle venait de profondeurs jamais atteinte par les hommes ou même des nains.

"Les partisans ont dit au Suprême que l'attente était trop longue." dit la première voix.

"Comment ont-ils osé devant le Maître ! Il mérite d'être détruit à jamais, ils se sont pris pour des humains !"

"Grave erreur, Golm."



Cassiopée

Comme à chaque passage dans le néant, son cœur fut étreint et ses sens chavirèrent. Elle sut ainsi par où la conduisait son geôlier. Il empruntait une faille temporelle pour l'emmener là où elle serait sans doute prisonnière en attendant pire.
Comment sa vigilance avait-elle pu être abusée de la sorte ?

On ne lui retira pas son voile d'ombre tout de suite. Sa perception si fine pouvait sentir un étrange pouvoir autour d'elle, mais rien d'autre. Quand la lumière lui fut redonnée, elle se trouvait dans une cave obscure parfumée de moisissure. Mais elle n'était pas seule. Quatre êtres la cernaient. C'étaient des êtres étranges, entre homme et mollusque. Leurs yeux globuleux l'observaient avec attention, prêts à agir à la moindre alerte.
Cassiopée n'esquissa pas un geste. Sa pensée furetait partout, visitait chaque recoin, chaque cellule. Et de toutes parts, elle ressentait la magie cruelle qui circulait. C'était un ensemble de flux d'énergie lents et lourds, mais d'une extrême puissance.  Les courants magiques convergeaient sur un point au fond d'un long couloir. Le point était mobile et semblait se diriger dans sa direction.
Plus le point grossissait, plus le flux s'intensifiait. Aux sens de Cassiopée, ils formaient une immense toile noire dans laquelle elle se sentait empêtrée.
Elle était à ce point agglutinée dans le magma de tensions qu'elle prit conscience que jamais elle ne s'en sortirait seule. Miel lui paraissait être son seul espoir et en Miel, Lumeï.
Alors que ses pensées engluées cherchaient à se démêler, le point de force avait pris forme en s'approchant d'elle. Cachée derrière un long drap noir, la silhouette flottait en rasant le sol. Quand il ne fut plus qu'à quelques mètres d'elle, la trame ligotait Cassiopée aussi bien qu'une gaine. Seules ses pensées pouvaient se rendre mobiles. Sa bouche, ses bras, ses jambes étaient liées.

Derrière le drap, elle pouvait entendre l'être rire.


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