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La Traque

De Vaanne, Grendelor, Exodus(...),

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5 nov. 2015 - 14:04

De Vaanne a dit :

- Une idée ? Mais de quoi parles tu ? demanda De Vaanne en regardant fixement son collègue.

- Je te dis qu'on ne peut pas arriver chez Grendelor sans une bonne excuse. Cherche donc, boîte de conserve rouillée !

Et Exodus de se mettre visiblement à réfléchir, se pinçant tout d'abord le nez en prenant l'air pénétré, puis mettant son poing sous son menton à la façon du Penseur. il en était à essayer une nouvelle position de yoga (au grand dam des coutures de son habit de cuir) formellement déconseillée à toute personne sensée que l'Illumination lui vint, au grand soulagement de De Vaanne qui regardait avec une exaspération croissante les contorsions exotiques et hystériques de son collègue.

- J'ai trouvé ! Grendelor voulait discuter avec Rumulus, n'est-ce pas ?

- Certes, répondit l'enarmuré d'un ton polaire.

- Eh bien, il suffit de l'embarquer avec nous et de dire à la Dame que nous lui ramenons de la compagnie !

De Vaanne se massa les yeux un instant et leva ensuite un regard immensément las.

- Il y a un problème de taille à ton plan. Rumulus a disparu, espèce d'incapable ! hurla-t-il devant l'air d'incompréhension de son interlocuteur.


Celui-ci tourna la tête de tous côtés et s'élança vers la dernière position connue du président en criant qu'il fallait absolument le rattraper. Sa chevauchée fantastique fut malheureusement promptement écourtée par une lourde chute dans un laurier, chute causée par De Vaanne qui avait adroitement lancé un heaume dans les pieds d'Exodus. Ramassant tranquillement la pièce d'armure, il l'épousseta avant de relever le répurgateur d'un geste.

- Tu m'écoutes, maintenant, ou faut-il que je m'énerve sérieusement ?

Exodus, suffoqué d'indignation, se préparait à émettre une série de doléances et de récriminations d'un ton de mégère mal embouchée quand il croisa le regard de De Vaanne. Et changea instantanément son fusil d'épaule.

- Oui ?

- Depuis quand a-t-on besoin de se casser la tête ? Ceci a plus de pouvoir que toutes les excuses du monde. Surtout les tiennes, d'ailleurs.

- La dernière phrase était basse, mesquine et totalement superflue, dit Exodus en reconnaissant l'objet que son compère venait de sortir de sa poche.

Une rosette de l'Inquisition.
Le petit sceau qui donnait à son juste détenteur le droit de vie et de mort sur toute personne croisant son chemin. La dernière chose que voyait un hérétique transformé en être pitoyable et hurlant juste avant son exécution. La dernière chose qu'oublierait un membre de l'Inqusition. Exodus préféra rougir quand De Vaanne lui demanda où était la sienne.

- Ayant atteint les tréfonds de l'inutilité, tu ne peux que remonter. Et si tu ne le fais pas, je te sors la tête de l'eau pour mieux te noyer ensuite. Tu es arrivé avant moi : tu dois donc avoir commencé à emmagasiner des renseignements sur ce coin perdu. Où habite Grendelor ?

- Quelque part dans Sûl-nar, répondit Exodus. je n'en sais pas plus, mais il suffira de demander notre chemin à un tavernier ou à quelqu'un d'a priori bien renseigné. Mais auparavant, j'aurais besoin de retourner à Belthil. Pour récupérer mes armes.

Quelque temps plus tard, un poing armuré s'abattait rudement sur la porte d'une maison discrète de Sûl-Nar


Grendelor

Le coup résonna lourdement dans l’atmosphère avant de retomber dans un silence pesant. Au bout de quelques minutes sans autre bruit que celui de la respiration des deux inquisiteurs, le poing cogna à nouveau, plus fortement. Un sentiment d’incompréhension envahit un instant les deux hommes avant de refluer. Un mouvement se fit entendre à l’étage avant de se rapprocher. La porte s’ouvrit, largement.

Exodus, DeVaanne, que se passe-t-il ?

La voix de Grendelor n’exprimait aucune surprise mais une fatigue intense. Ses longs cheveux étaient défaits, l’enserrant dans un voile turquoise. Ses yeux bleu étaient cernés de noir et recélaient une douleur qui n’était pas présente quelques jours auparavant. Elle semblait avoir déjà perdu toutes les formes de sa grossesse et bien plus encore. Sa silhouette d’ordinaire pleine et vivante paraissait menue et fragile. Son visage marqué racontait les nuits d’insomnie.
Le sentiment d’incompréhension qu’ils avaient senti quelques minutes avant apparu tout à coup aux inquisiteurs comme la marque d’un réveil en sursaut.

Rien de grave j’espère. Mais entrez, ne restez pas sous le soleil ou vous allez cuire.

Le fantôme d’un sourire s’esquissa mais n’atteignit pas les yeux de la guérisseuse qui s’effaçait pour laisser passer les deux hommes.


Exodus

Les deux hommes, surpris de retrouver la Dame turquoise dans un tel état d'épuisement et d'abattement, la remercièrent avant de la suivre dans le salon qui se présentait juste après l'entré. Enlevant son chapeau, Exodus accepta avec politesse la chaise qui lui avait été offerte tendis que DeVaanne préféra rester debout, son casque sous le bras. Tout deux regardaient tout autour d'un air plus ou moins intéressé, faignant de s'arrêter sur tel ou tel détail de la décoration. Mais leur regards revenaient régulièrement sur Grendelor qui semblait ne pas savoir où aller ni quoi faire, s'affairant à une tache avant de l'interrompre immédiatement, passant un bref instant devant le miroir pour se contempler d'un regard vide avant de repartir vagabonder dans la pièce.
Elle s'arrêta brusquement avant de se retourner vers ses deux invités.


- Je suis désolé, je fais honte à mon devoir d'hôtesse. Voulez-vous boire quelque chose, un rafraichissement?

DeVaanne se contenta de secouer la tête d'un air absent, et Exodus de répondre:


- Ce ne sera pas la peine, merci.

- Bien, bien... Si cela ne vous dérange pas, je vais me servir quelque chose de mon côté, je crois que j'en ai besoin. Je vous demande juste de patienter quelques instants...

Elle s'éloigna vers l'autre côté de l'habitation, laissant les deux hommes seuls.

- Son état a empiré depuis la dernière fois, commença DeVaanne. Elle semblait déjà fatigué au parc mais là il y a quelque chose d'autre.

- Hum... Et tu as vu son ventre? Elle semblait prête à accoucher il y a quelques jours et aujourd'hui, c'est.. comme si elle n'avait jamais attendue d'enfant. Ça peut être un effet d'Aspharoth, ou tout du moins de son contact.


- C'est tout a fait possible, et pour tout dire ce serait même favorable pour nous. Si le possédé a en effet eu un effet néfaste sur le terme de sa grossesse, elle devrait être plus encline à nous aider.

Exodus jeta un regard de biais à son camarade, soupirant légèrement.

- Je sais que tu dis ça par pur soucis technique, mais tache d'être plus délicat dans les instant à suivre ou son aide risque de durer le temps d'un soupir. Et essaye de...

Il n'eut pas le temps de finir car Grendelor venait de reparaître, tenant un grand verre entre ses mains. Son visage semblait avoir retrouvé une certaine contenance tandis qu'elle venait s'installer en face des deux inquisiteurs. Elle tenta d'esquisser un sourire plutôt réussi avant de prendre la parole.

- Alors messieurs,que me vaut le plaisir de votre visite? A voir vos tête sérieuses, je doute que vous veniez ici pour m'amener quelques lychees que j'aurais oublié lors de notre dernière rencontre, non?

Sa voix avait en partis retrouvé le ton espiègle qu'ils lui connaissaient, mais ses yeux restaient en revanche aussi terne que lorsqu'elle leur avait ouvert la porte.

- Et bien pour tout vous dire, nous ne venons effectivement pas pour vous parler de fruits et autre, et croyez bien que j'en suis le premier navré, répondit Exodus en tentant un sourire à son tout, sourire qui ne tint qu'un bref instant. Non, pour être honnête, notre visite a des raisons beaucoup plus officielles, si vous voyez où je veux en venir.

Il laissa passer un moment, croisant les mains l'une dans l'autre, avant de rependre. Grendelor les regardait l'un après l'autre, attendant que l'un développe. Elle n'avait toujours pas toucher à son verre.

- En fait, nous venons vous poser des questions à propos d'une de vos connaissance. Si on ne trompe pas, il s'agit d'Aspharoth, le...


- Le monstre que vous avez secouru dans l'oasis de Sûl-Nar.

Un son sec retentit dans la pièce lorsque la main de Grendelor gifla violemment le visage de DeVaane, presque trop rapidement pour être perçu à l'œil nu. Elle s'était levée en un bond pour se retrouver face à lui et malgré la taille de l'inquisiteur, se tenait en posture de défis, les yeux animés d'une froide colère.

- Je vous interdis de l'appeler ainsi. Ni lui, ni aucun de mes amis.

DeVaanne, dont le visage était encore figé de stupeur, posa son regard enflammé droit dans les yeux de la Dame turquoise.

- Porter la main sur un représentant de l'inquisition, c'est porter offense à l'Unique en personne. Je vous excuserais votre ignorance pour aujourd'hui, mais ne refaite plus jamais ça.

Exodus intervint pour tenter de calmer la situation, reconnaissant dans les yeux de son collègue un feu qu'il valait mieux éteindre au plus vite. Grendelor aussi l'avait surprit: en temps normale il était sûr qu'elle n'aurait jamais réagis aussi violemment mais la phrase de l'inquisiteur semblait lui avoir fait perdre le contrôle. Il jeta un bref regard d'avertissement à DeVaanne avant de s'approcher de Grendelor.

- Calmez vous, je vous en pris, lui dit-il doucement, posant un bras sur son épaule et l'invitant à se rasseoir. Ce que mon collègue a essayé de dire, avec un manque évident de tact, c'est que nous avons de très bonne raison de croire qu'Aspharoth représente un danger non-négligeable pour ce pays et pour ceux qui le côtoient en particulier...


Grendelor

Grendelor tenta de calmer l'agitation qui la parcourait. Sous l'effet de la colère, elle avait crié et elle écoutait avec une angoisse grandissante les bruits de la maison et particulièrement ceux de l'étage. Alors qu'elle prenait enfin une gorgée de son verre, le liquide qu'il contenait dégageant une forte odeur de plantes, les paroles d'Exodus parvinrent jusqu'à son esprit. Son regard douloureux passa sur DeVaanne avant de revenir sur le gardien d'Adelarin.

Insulter ma famille n'est pas vraiment la meilleure chose à faire quand on vient frapper à ma porte. Aspharoth n'est pas un monstre, c'est un Gold. Et quand bien même j'ai entendu des histoires affreuses sur l'Inquisition, je ne vous crois pas encore assez atteint de folie pour brûler les gens parce qu'ils ne sont pas de la même race. Ou alors vous pouvez brûler tout Ter Aelis, en commençant par Ramrod et Dounette. Reprenant son souffle en même temps qu'une gorgée de sa décoction, l'éclat de colère qui brillait dans ses yeux s'adoucit quand elle reprit. De plus, il n'est plus un danger, je m'en suis occupée.

Des pleurs éclatèrent au dessus de leurs têtes. Utilisant son empathie, une onde de réconfort se propagea dans la maison, calmant la voix criarde.

Excusez-moi, avec tout ça, il s'est réveillé. Je dois le nourrir, je reviens.

Dans sa voix, tout l'amour qu'une mère porte à son enfant, toute la douleur aussi face à son destin. D'un pas où perçait l'épuisement, Grendelor monta l'escalier. Des murmures de réconfort parvinrent jusqu'au salon, accompagnés d'un babille joyeux, puis le silence.


De Vaanne

- Elle n’est pas en forme, cela se voit. Mais l’enfant a l’air sain et en bonne santé à en juger par ses cris, fit remarquer Exodus.

- C’est un soulagement, mais cela ne me suffit pas. Je suis prêt à laisser passer beaucoup de choses, mais pas un cas de corruption aussi tristement évident.

De Vaanne se tut au retour de Grendelor, qui arborait un sourire certes fatigué, mais heureux d’avoir passé un instant avec son fils. Sans un mot, l’inquisiteur lui tendit son verre qu’elle accepta sans rien laisser paraître. Il attendit dans un silence pesant, qu’elle en boive quelques gorgées. Exodus, mal à l’aise devant la tension devant la tension qui régnait dans la pièce, ouvrit plusieurs fois la bouche pour ajouter un de ses réparties spirituelles, mais un regard assassin de De Vaanne le coupait immédiatement dans son élan. Celui-ci reprit la parole, d’une voix plus douce qu’au départ.

- Je me doute bien que vous avez entendu des histoires terribles sur l’Inquisition et ses modes d’action. Cependant, je crois que vous n’avez pas compris la nécessité de notre mission.
Ter Aelis a la chance d’être une terre protégée par on ne sait quel pouvoir supérieur des tumultes qui agitent et mettent à bas les empires du dehors. Ter Aelis a la chance de ne pas avoir à lutter pour sa survie, ce qui fait logiquement de ses habitants des êtres plus doux qu’ailleurs.
Dans les terres de la juridiction de l’Inquisition, notre travail est nécessaire, indispensable ! Ne venez donc pas émettre de jugement de valeur, car il n’a pas lieu d’être.


- Mais vous n’avez pas de « juridiction » ici, fit remarquer Grendelor.

- C’est exact, sourit froidement l’inquisiteur. C’est heureux d’ailleurs car il me répugnerait d’y appliquer l’absolue rigidité des règles du Credo : « Prenez garde à l'hérétique, haïssez le xenos, craignez le démon. »
En substance, ces règles ont été données par l’Unique aux Hommes pour les protéger des dangers de la magie et de la déviation. Un homme possédant des pouvoirs magiques devra passer par un entraînement éprouvant et souvent mortel pour prouver qu’il n’est pas un danger pour lui ou pour les autres… Qu’il a le droit de vivre.


- Et qu’est-ce que cela a à voir avec Aspha ? Vous n’avez pas le droit de l’opprimer. Vous n’avez aucun pouvoir sur lui !


- Faux, en partie. Je ne me serais pas lancé de moi-même dans une entreprise zélote ici, en partie devant l’ampleur de la tâche et parce que je n’ai rien à y faire. Vous possédez d’ailleurs, vous-même, des pouvoirs magiques, dit De Vaanne en fronçant légèrement les sourcils.
Le problème principal vient de la possession. On pourrait accepter la présence d’un sorcier non assermenté si  le problème des autres plans d’existence et de leurs habitants ne se posait pas dès qu’un sorcier lance un sort. Un formule lancée de travers et c’est un habitant d’un plan qui, au mieux, considère une pince hypertrophiée pour membre comme une marque de beauté, et au pire une ce sera entité maligne qui va prendre possession et contrôler le corps du sorcier pour l'Unique sait quel but infâme !
Cela seul est une raison d’agir, pour la menace et la danger qu’il pose pour l’ensemble des communautés vivant sur cette terre. Nous savons comment intervenir : nous le devons.

- Mais j’ai guéri Aspharoth ! Il n’y aura plus de problème, intervint Grendelor d’une voix blanche de colère. Il n’y a plus de danger.

- En êtes-vous si sûre ? Avez-vous extirpé de sa chair toute atteinte de la possession, et ce même s’il a fallu le priver d’un de ses membres ? Le démon possesseur s’est-il évanoui dans l’air en hurlant, en jurant de se venger ? L’avez-vous réellement exorcisé ? Pouvez-vous réellement me certifier qu’Aspharoth, puisque c’est ainsi qu’il s’appelle, est complètement vierge de toute infestation ? Est-il vraiment sans aucun danger pour vos amis ? Enfin, ajouta De Vaanne en se penchant vers Grendelor, lui confieriez-vous votre enfant sans hésitation ? Lui confieriez-vous sa vie ?

De Vaanne alla se placer à côté d’Exodus, laissant planer ainsi ses question dans l’air.

- En vérité, nous doutons que vous puissiez répondre par l’affirmative à toute ces questions. C’est notre rôle de le savoir, et si la réponse est négative, de prendre les mesures qui s’imposent. En vérité, dame Grendelor, pour le bien de tous ceux qui vivent tant en Ter Aelis qu’à Rhéan ou ailleurs… où est Aspharoth ?


Grendelor

Bien que troublée, ce qui était bien évidemment le but recherché elle en avait conscience, Grendelor ne se laissa pas démonter. Sargas s'était rendormi et, bien qu'elle apprécia les 2 hommes, elle avait hâte qu'ils s'en aillent. Ces derniers jours avaient été très difficiles et la suite de sa vie n'annonçait rien de simple non plus. Elle avait déjà bien à gérer sans qu'en plus une chasse aux sorcières soit lancée contre sa famille. Elle dut se mordre la langue pour ne pas leur jeter tout cela à la figure. Sa fatigue, tant physique que morale, lui faisait perdre le contrôle de ses émotions et même si la guérisseuse ne dit rien, une vague de colère vive gifla les inquisiteurs avant de s'évaporer.

Le silence sembla s'éterniser pendant que la jeune femme finissait lentement son verre, son effet énergisant commençant à se faire sentir. Elle en était réduite à ça, se droguer de décoctions afin de tenir. Accueillir un enfant est déjà une lourde charge à deux, alors seule et dans les circonstances qui étaient les siennes c'était une gageure. S'étant enfin quelque peu calmée, Grendelor reprit la parole d'un ton plus posé, même si sa voix restait lasse.

Bien évidemment, je ne peux répondre à l'affirmative à toutes vos questions. Cependant, je le peux pour les plus importantes. Oui, je l'affirme sans danger pour ses amis. Oui je lui confierais ma vie et celle de mon fils, ce que j'ai déjà fait d'ailleurs. Ce qui est, tout de suite, bien plus que je ne pourrais affirmer pour vous deux.

Elle était réellement heureuse que les chambres soient à l'étage. Ils n'approcheraient pas de Sargas, surtout pas en ce moment.

Quant à savoir où est mon beau-frère, je n'en ai strictement aucune idée. Il est libre d'aller où bon lui semble et de part ses fonctions de Gardien il est très occupé.

Ce qui était totalement vrai. Mais incomplet. Elle était capable, si elle le souhaitait, de savoir exactement où se trouvait chacun des membres de sa famille ainsi que ses amis. En cherchant bien, elle pouvait le faire de chaque aelissien qu'elle avait croisé.


Exodus

Exodus sentait la patience de la Dame s'effilocher rapidement, sa colère de plus en plus difficilement maitrisée. C'est tout juste s'il ne sentait pas son aura qui le repoussait lentement, sensation désagréable qui lui intimait de quitter l'endroit au plus vite. Mais la mission avant tout, songea-t-il. Les nombreux regards que Grendelor portait en direction de l'étage trahissaient son appréhension et sans doute redoutait-elle que l'un des inquisiteur décide de monter, saisi par quelque doute.
Toutefois, cette inquiétude pouvaient jouer en leur faveur.


-Je crois ne pas me tromper en affirmant que vous refusez de nous aider pour l'instant, dit-il de but en blanc. Mais, encore une fois, comprenez bien ceci: vous êtes la seule personne ici que nous connaissons assez et qui a les moyens de nous aider, aussi nous n'hésiterons pas à vous harceler pour obtenir nos réponses, s'il faut en arriver là. Ce n'est pas que par médisance que l'on nous considère comme les "chiens" de notre Église.

Rien qu'à l'évocation de ce surnom détestable, on pouvait sentir la fureur de DeVaanne monter en flèche. Toutefois, il fallait reconnaitre sa justesse sur un point: une fois la proie identifiée, l'Inquisition ne la lâchait plus. L'air indigné de Grendelor ne l'empêcha pas de continuer.

-Mais je ne désire pour ma part pas en arriver à ces extrémités. Aussi vais-je me contenter de souligner un détail: vous nous avez affirmé avoir "soigner" Aspharoth. Mais la possession n'est pas une maladie, je pense ne rien vous apprendre. L'entité parasite son hôte, de manière plus ou moins prononcée, affermissant son contrôle sur son corps et amenuisant sa propre perception par l'esprit de l'hôte.

Grendelor lui lança un regard d'impatience et de lassitude mêlée.

-Je suis déjà au courant de tout cela. Comme l'a si gentiment souligné votre collègue, je suis moi-même pratiquante de magie et par conséquent suis consciente des dangers que représente ce genre de chose. Et c'est justement en connaissance de cause que je puis vous affirmer qu'il n'y a plus de danger.


-Sur ce dernier point je suis obligé de vous contredire. L'Inquisition seule peut affirmer si oui ou non le danger est écarté. D'après ce que vous dite, Aspharoth serait libéré. Donc soit l'entité a été définitivement chassé de ce monde, soit il a juste changé de "domicile". L'affaire devient alors plus compliqué dans le sens où un démon quitte son hôte, en dehors du décès de ce dernier, uniquement lorsqu'il en trouve un plus à même de satisfaire ses désires. Et je doute que, dans l'état où vous étiez lors de votre intervention, vous eussiez été en mesure de chasser définitivement un être capable de posséder une puissance comme celle de votre beau-frère. Aussi il y a deux possibilité: soit il est encore présent dans le corps d'Aspharoth, et dans ce cas je suis attristé que vous refusiez de nous aider à le localiser et encore plus que vous estimiez la chose sans danger, soit il s'est implanté dans un hôte différent, auquel cas Aspharoth ne serait plus la seule personne à qui nous nous intéresserions.

DeVaanne, jusque là adossé à un mur, se redressa et prit la parole à son tour, tout en fixant Grendelor qui commençait à comprendre où les deux hommes voulaient en venir et ce avec une pointe d'inquiétude.

-Étiez vous seule lorsque vous avez prodigué les soins à Aspharoth? L'être qui était en son corps a-t-il eu une occasion de passer dans un autre hôte que vous lors de l'intervention? Nous pouvons penser, à la vue de votre état, que vous ne portez pas vous-même le démon , car ce genre de créature tient en général à ce que son hôte reste en bonne forme. Mais à part vous, qui d'autre se trouvait aux côtés d'Aspharoth?

Grendelor reprit constance devant l'agressivité à peine contrôlé de DeVaanne.

-Personne. J'étais seule durant toute la durée des soins. Personne à part moi n'a eu de contact avec lui avant que je ne libère de l'emprise.

-Si, il y avait au moins une personne...

Le regard des deux inquisiteurs se porta alors doucement en direction de l'étage, tandis qu'un pic de frayeur assaillit Grendelor lorsqu'elle comprit celui auquel ils faisaient allusion.

-Non. NON! Je vous interdis d'insinuer telle chose, je vous interdis ne serait-ce que d'y penser! Elle s'était levée en direction des deux hommes, rempart entre son trésor et eux. Il n'a pas pu s'en prendre à lui, il...

-Réfléchissez-y un instant: quoi de mieux qu'un enfant sur le point de naître, une enveloppe prête à porter, sans aucune capacité de défense face à l'intrusion? Le ton de sa voix se fit plus dur au fil des paroles. Cessez de vous mentir, il est impossible que vous n'ayez pas songé que cela puisse arriver, que vous n'ayez imaginé la menace pour votre enfant!

-Aspharoth vous fait tout aussi peur que son potentiel de destruction nous effraie! Et peut-être est-ce même trop tard, peut être l'entité est-elle déjà installé dans le petit corps qui somnole à l'étage en cet instant même!

-TAISEZ-VOUS!

La vague de colère et de rage ne fut contenu qu'à grande difficulté, les deux hommes la recevant de plein fouet, ce qui les força à reculer de quelques pas. Grendelor s'était laissé retomber sur son siège, la tête entre les mains, dans l'attitude de celle qui ne savait plus en quoi croire.

-Le... l'entité... Elle est toujours en lui. Nous l'avons enfermé dans le sceau, j'en suis certaine.

-On ne peut être sûr. Il est capable de cacher en partie sa présence, surtout à vous. Vous êtes la mère, il est plus facile de vous inciter à croire dans le cas échéant, que l'enfant est sain.

-Si, il reste un moyen d'être sûr, dit Exodus sur un ton plus doux, en se rapprochant de Grendelor jusqu'à pouvoir poser sa main sur son épaule secouée de soubresauts. Si vous avez en effet contré l'entité, vous devriez pouvoir reconnaître sa trace, celle de son énergie. Utilisez vos pouvoir, comme nous étions venu vous le demander, mais sans chercher Aspharoth: il suffit maintenant de chercher le parasite lui-même. Et alors vous saurez.


Grendelor

C'était avec une fureur grandissante que Grendelor avait écouté les 2 inquisiteurs. A grand peine, elle s'était retenue de les attaquer, comme une lionne défendant sa famille. Seulement, elle n'avait plus le choix. Évidemment qu'elle savait que l'entité du roi-démon était toujours dans le corps d'Aspharoth, comme elle savait qu'il n'aurait pu atteindre le corps de son fils, déjà promis à un autre destin, peut être plus sombre encore. Mais elle détestait devoir leur répondre, rien qu'à cause de la manière dont ils présentaient les choses. Un danger. Aspha. C'était eux le danger, oui.

La guérisseuse étudia quelques instants les deux hommes en face d'elle avant de pousser un long soupir. Elle n'aurait pas la force de les combattre et elle n'avait aucun moyen de les convaincre. C'était le genre à ne croire que ce qu'ils voyaient. Et détruisaient.

Puisqu'il le faut... Sa voix était un murmure imperceptible et pourtant toute l'amertume qu'elle contenait se distilla dans le cœur des inquisiteurs.

Son regard bleu se fit lointain sans pour autant quitter celui d'Exodus, ni se départir de la froideur déterminée qui l'avait envahi.

Il est quelque part dans les monts d'Echoriath. Je ne saurais vous expliquer où. Maintenant partez avant que je perde totalement patience.


Elle ne leur offrirait pas plus d'aide. Ils pouvaient bien se perdre dans les monts enneigés et y tourner des années. Elle avait d'autres choses à faire que de s'occuper du sort de ces deux hommes. Et quand bien même ils la menaceraient pour qu'elle les emmène, la jeune mère ne quitterait pas son fils un instant et elle n'était même pas sûre d'avoir l'énergie nécessaire à leur transport jusque là-bas.
Ses yeux glacés ne les lâchaient pas.


De Vaanne

- A Echoriath ? murmura Exodus. On n’est pas rendus s’il nous faut retourner le coin pierre par pierre. N’y a-t-il vraiment aucun moyen d’être un peu plus… précis, dame Grendelor ?

Le regard en réponse fut tellement froid, méprisant et dépourvu d’humanité que le deux hommes firent un pas en arrière.

- Euuh, on va se débrouiller autrement. Viens, De Vaanne, je crois que nous commençons à la déranger.

- Ce n’était pas difficile de le deviner, répondit celui-ci d’un air absent, comme profondément absorbé dans ses pensées.

Il ne fit d’ailleurs aucun mouvement vers la porte et il revint à Exodus de le tirer dehors par son gantelet armuré. Grendelor, toujours aussi terrifiante de mépris, claqua la porte derrière eux sans ménagement. Le répurgateur rajusta son chapeau sur sa tête pour échapper aux mordants rayons du soleil et jeta un coup d’œil aux alentours.

- Tu sais, collègue, je crois que nous voilà persona non grata pour un moment, ici… Bon, qu’est-ce…

Il ne termina pas sa phrase lorsqu’il se rendit compte qu’un heaume doré le regardait fixement, laissant seulement filtrer deux yeux brûlants d’une rage telle que le soleil de Sûl-Nar sembla perdre instantanément toute sa force. Une rigole de sueur glaça traça son chemin en suivant la ligne de son échine.

- On se calme ! dit-il en rassemblant tout son courage. Qu’est-ce que j’ai fait encore ?

- Tu prononces encore ce qualificatif immonde devant moi, ne fût-ce que pour appuyer ton propos, et je te fais passer d’allié à ennemi. Avec tous les désagréments que cela comporte.

- Tu n’es pas drôle, tu le sais au moins ?

- Bien sûr que je suis drôle, tu ne sais juste pas quand. Sur ce, je t’annonce que j’ai une idée pour la suite.

- Demander aux hérétiques de rang terminal emprisonnés au Château de conjurer une légion titanique ? D’accord, d’accord, elle était nulle, ajouta-t-il rapidement devant un regard meurtrier accompagné d’un geste vers la zweihänder. Je t’écoute. Religieusement.

- Quels sont les éléments que nous a donnés explicitement Grendelor ?


Exodus réfléchit un instant.

- Aspharoth est à Echoriath, quelque part dans ces montagnes pelées et couvertes de neige. Mais elle a du dire autre chose, puisque tu me le demandes… Ah oui ! s’exclama-t-il. Il est de la race des Gold. Mais où ça nous mène ?

- Les cours de possession non chaotique, tu t’en rappelles ?

- Et pourquoi ce ne serait pas chaotique pour toi ?

- Parce qu’Aspharoth est apparemment encore vivant… et pas seulement son corps.

- Pas faux. Alors, le cours disait… pfff, je l’ai bachoté tellement il était barbant… que les possessions suivaient le plus souvent un but ?

- En gros oui. Et même, les possessions étaient souvent réalisées par les esprits des ancêtres qui cherchaient à réaliser quelque chose. Souvent quelque chose de mal, bien évidemment… D’où nous n’avons plus qu’à trouver un ancêtre d’Aspharoth répondant à ces critères, et à partir de là, je sais manœuvrer.

- Cela ne signifie-t-il pas de se noyer sous des piles de livres poussiéreux durant des semaines ? Et dire que j’étais rentré chez les répurgateurs pour ne pas avoir ce genre de problèmes…

- Pas grave, ça va te changer de ton quotidien de porte-flingues à gros muscles. Où est la bibliothèque de Sûl-Nar ?

- Suis-moi… Mais attends, il y a un problème dans ton raisonnement : qui est Aspharoth ? La bibliothèque ne garde pas trace de la généalogie du moindre pékin d’un pays voisin.

- Ça c’est certain, mais des lignées magiques, par contre… et une puissante, au vu des effets de la possession qu’on a rencontrés et du fait que dame Grendelor, qui n’est pas une petite magicienne, s’est apparemment vidée de ses forces pour la guérison. Donc…


- Une lignée noble.

Partant de là, ils écumèrent impitoyablement la bibliothèque locale. Leurs premiers efforts furent rapidement couronnés de succès puisqu’ils trouvèrent rapidement mention d’Aspharoth dans un livre de politique qui détaillait les membres existants des lignées royales. Il était listé sous le nom d’Emelius de la lignée Thor, fils de Karhas, roi des Gold, parfois aussi appelé Aspharoth. Cette rapidité avait conduit Exodus à prononcer quelques vantardises sur ses capacités de recherche en empoignant un livre de généalogie Gold. Il avait cruellement déchanté pendant que De Vaanne riait sous cape. La lignée Thor avait en effet plus de points communs avec le roncier qu’avec le noble chêne, et remontait à des temps immémoriaux. Il commençait à geindre quand De Vaanne le fit taire.

- Regarde rapidement les biographies. Trouve ceux qui n’ont apparemment pas réussi à remplir le rôle qu’ils s’étaient fixés avant de mourir ou qui ont été tués et qui auraient une bonne raison de se venger. Trouve les prophéties qui parlent d’un destin hors du commun pour un quelconque Thor. Ensuite tu me les transmets et je vois.

- Tu as le beau rôle !

- J’ai plus d’expérience pour collationner les informations.

Trois jours de recherches ininterrompues plus tard, la liste, au départ pléthorique, s’était réduite à un seul nom.

- Nepheroth, roi des Gold et premier Gardien d’Osphalte ? Marié à une déesse ? Tu es sûr ? demanda Exodus.

- Certain. Il se serait réincarné dans une épée, mais a été maudit par le Conseil des Cinq et l’épée en question a été brisée. Il a donc la meilleure des raisons de venir détruire la vie des Gold actuels et de leurs descendants jusqu’à la énième génération, et pour ça quoi de mieux que de posséder un rejeton royal ?


Grendelor

La porte fermée, Grendelor s'y appuya, glissant au sol. Des larmes débordèrent de ses yeux grands ouverts et des sanglots secouèrent ses épaules. Trop de choses en trop peu de temps. Elle avait beau être forte, elle avait ses limites et celles-ci avaient été dépassées il y avait de cela plusieurs jours. Laissant s'écouler la fatigue et le chagrin avec les flots salés qui sillonnaient ses joues, la magicienne fit le vide dans son esprit. Sargas s'était rendormi et elle irait le rejoindre dans quelques minutes. Entre temps, elle devait décider que faire suite à cette visite, pour le moins désagréable et fortement décevante. La guérisseuse se promit de surveiller régulièrement son beau-frère. Mais surtout, elle devait le prévenir.

En temps normal, ça ne lui aurait demandé aucun effort malgré la distance. Aujourd'hui, épuisée et fragilisée, elle aurait besoin d'aide. Essuyant les larmes qui coulaient encore sur son visage, Grendelor se releva avec difficulté. D'un pas las, elle se dirigea vers une petite pièce, fraîche et sans fenêtre, emplie de fioles diverses. Sans hésitation, elle en choisit une, petite, contenant un liquide violacé. La débouchant prudemment, la jeune femme y trempa le petit doigt qu'elle suça ensuite avec une grimace. La potion avait pour effet d'aiguiser les sens et de permettre de tirer de l'énergie plus facilement de la nature. Grendelor n'aimait pas l'utiliser car les plantes dans lesquelles elle allait se servir se flétriraient à cause du manque. Traversant à nouveau la maison, la dame turquoise sortit dans la cours intérieure, au milieu de laquelle une petite fontaine laissait s'écouler un filet d'eau en murmurant. Ce qui frappait, mais qui n'étonnait pas ceux qui connaissaient la propriétaire des lieux, était l'abondance de verdure dans la trentaine de mètres carrés qui formaient cet espace ouvert. Le spectacle était étonnant et charmeur, dégageant une atmosphère paisible. La magicienne n'y prêta pas attention et se dirigea vers l'olivier qui trônait dans le coin nord-ouest. Elle pourrait y puiser sans le vider. Avec de l'attention, il s'en remettrait sans trop de difficultés.

Une main sur l'écorce, elle ferma les yeux, absorbant l'énergie vitale de l'arbre, dosant subtilement son effort mental. Le message était simple et parvint sans problème à son destinataire.

*Méfie-toi, tu es surveillé par l'Inquisition. Ils arrivent.*


Exodus

- Dans ce cas, voilà l'affaire résolue, déclara Exodus avec joie. On connait le nom de l'entité, la localisation d'Aspharoth: il ne nous reste plus qu'à voler jusqu'à lui et... Mais non! s'exclama-t-il soudain. L'affaire n'est en rien résolue, on ignore toujours l'emplacement exacte d'Aspharoth et ce même après 3 jours de recherches intenses et ô combien rébarbatives! Il se laissa choir sur sa chaise, d'un air fatigué. On a juste un nom...

-Allons, ressaisis-toi, ça ne te ressemble pas de déprimer de la sorte. On en viendrait presque à regretter le caractère insupportable dont tu t'affubles le reste du temps. De plus le nom était la seule chose dont j'avais besoin pour localiser précisément le possédé.

-Alors qu'attends-tu donc? Procède le plus vite possible, qu'on puisse enfin quitter ce lieu fermé et étriqué. Je ne supporte plus de rester enfermer à lire arbres généalogiques et biographies à n'en plus finir, j'ai besoin d'air frais!

DeVaanne soupira, méditant brièvement sur le rapport entre la création de l'ordre des Répurgateurs et la canalisation des éléments les plus atteins des rangs des l'Inquisition.

- Je ne peux pas procéder à une telle distance de la cible, il faut au moins que l'on se trouve dans les environs proches pour que ma méthode soit efficace. Il se leva, rangeant rapidement les nombreuses notes issues de leur recherches. Aussi nous devons partir en direction d'Echoriath, ce qui je pense n'est pas pour te déplaire?

Réajustant son chapeau, Exodus se leva à son tour, affichant une mine ravie. Il ne dit mot et se contenta de prendre la direction de la sortie la plus proche, décidé à mettre le plus de distance entre lui et cette étude. DeVaanne remit son casque, tout en soupirant, vaguement amusé.

-Je suppose que cela veut dire "oui".


* * *


Les deux hommes se dirigèrent d'abord vers Adalerin, car d'après Exodus "c'était le meilleur moyen pour rejoindre les Mont d'Echoriath, qu'ils pourraient loger au chaud une dernière fois avant d'affronter le blizzard du sommet, qu'en plus il avait la-bas des choses à récupérer qui leur seraient utile et que de toute façon ils y allaient, un point c'est tout". Devant ces arguments, DeVaanne n'avait pu que suivre son collègue et c'est ainsi qu'ils firent halte dans le Village sous les cimes.
Exodus les mena directement à ses quartiers, désireux de s'équiper en prévision du grand froid qui les attendait. Il avait demandé à son collègue de l'attendre dans l'antichambre, après lui avoir servi un verre. Ce dernier s'impatientait, assis sur l'un des fauteuil, jouant avec le contenu de son verre sans y toucher. Il parla en direction de la pièce dans laquelle le répurgateur préparait son barda:


- Il nous faudrait une base d'opération plus proche que ce village pour organiser nos recherche dans les monts. Atteindre les sommets nous prendrait au moins une journée ou deux à partir d'ici et c'est bien trop long, il aurait largement le temps de filer. Une idée?

Une voix distante lui répondit, accompagné d'un fatras métallique:

- Hum... Le seul lieu qui pourrait correspondre ce nomme Alkhazzar. C'est la Cité des concours et des épreuves, placée sur le plus haut sommet des Monts d'Echoriath. A partir de là, il nous serait facile de couvrir les cimes. De plus, malgré la taille des édifices, l'endroit reste en grande partie désert à l'exception de quelques gladiateur armés de plumes et de pinceaux. Et où est-ce que j'ai bien pu foutre ce truc...

- Très bien, va pour Alkhazzar. Puis, avec un ton plus mesquin: Et on y mourra sans doute pas de faim, car il y aura surement un restaurant la-bas, sans quoi je ne vois pas comment tu pourrais en avoir entendu parlé et retenir ne serait-ce que le nom.

La seule réponse qu'il reçu fut une main qui passa la porte, suivit d'un geste obscène, ce qui amusa le paladin plus qu'autre chose. Il retourna à son verre, contemplant son contenu rubis, sans pour autant y succomber. Il commençait à s'impatienter.

-...

- Ah! je l'ai trouvé!


- Ne pourrais-tu pas te dépêcher un brin? Tu es plus lent qu'un cultiste devant une collection de fouet. Et puis quel besoin as-tu de te prémunir contre le grand froid lorsque chacun sait à quel point tu te vante de ton héréditaire résistance aux basses températures?

- Je ne crains pas le froid de ma région mais le blizzard mêlé à la glace des Haut-monts, je ne suis pas encore assez crétin pour l'ignorer. De plus...

Exodus sortit enfin de ses quartiers, portant sur lui un manteau plus sombre et plus épais que le précédant, le col fourré et rigide montant jusqu'aux oreille. Les manches et le bas de l'habit présentait les mêmes caractéristiques, le manteau descendant jusqu'aux chevilles. Sur ses bottes étaient sanglées deux courtes lames et sur ses bras plusieurs couteaux. Le buste était couvert par un plastron léger, sur lequel siégeaient deux paires de pistolets ainsi que divers fioles de la taille d'un doigt. Seul le chapeau restait inchangé, éternellement vissé sur le crâne de son propriétaire. Un sac de voyage énorme trônait enfin sur son épaule, rebondis par son contenu.

-... j'avais deux-trois affaires en plus à récupérer.

- J'hésite quand à l'interprétation d'un tel harnachement : soit tu pars en pique-nique, soit tu pars carrément en exil.

- Je pars à la chasse au possédé en compagnie d'un Paladin à la langue plus tranchante que sa lame et qu'il est possible d'entendre arriver à 100m tant les spallières grincent au moindre de ses mouvements si tu veux tout savoir. Puis sans même laisser le temps à son collègue de répondre: Allons-y maintenant, on a encore une longue marche pour atteindre la Citadelle d'Alkhazzar.



* * *



Bien plus tard, montant le long d'un escalier taillé à même la roche, Exodus appréciait la brise glacé qui lui courait sur le visage. L'air avait beau lui agresser la peau et la gorge, il ne pouvait s'empêcher de le savourer. Un soleil d'hiver reflétait ses rayons sur les pentes enneigées et escarpées des Monts d'Echoriath, à la foi supplice et merveille pour les yeux. Cette chasse le ravivait. il s'était laissé flotter trop longtemps, oubliant l'un des plaisir qu'il avait toujours éprouvé lors des traque: le sentiment d'excitation. Il n'en sentait plus la fatigue tant ce sentiment l'envahissait et gravissait les marches deux par deux.

-Rappelle moi encore une fois pourquoi on a choisi de passer par ces maudit escalier? On aurait voulu atteindre le sommet de la Grande Cathédrale à genou qu'on y serait arrivé plus vite qu'avec ces maudites marches.

Exodus s'arrêta et tourna la tête pour regarder DeVaanne qui montait à un rythme régulier les marches de l'interminable escalier. Il fatiguait sans doute plus de la monté, en raison du poids de son armure complète et de la température mais si jamais c'était le cas, jamais il ne le montrerait. Le répurgateur sourit et lui répondit encore une fois par le même réponse:

-La Citadelle n'est accessible par les airs que par période de concours ou bien si l'on dispose d'un moyen de transport personnel capable de supporter les températures. Or comme nous faisons partis tout deux de ces rare personnes à n'avoir ni dragon de compagnie ni pouvoir de téléportation, nous sommes condamné à gravir cet interminable escalier, seul moyen pour nous de rejoindre la citadelle en moins d'une journée, pour peu que l'on ne s'arrête pas trop longtemps. D'ailleurs en parlant de s'arrêter... Il consulta sa montre. il est déjà 13h15, aussi vais-je te suggérer une brève halte pour nous restaurer. Qu'en penses-tu?

- J'en pense que cela nous ferait du bien mais que je ne vois que bien peu de gibier dans les environs, bougonna l'inquisiteur.

- Tu me vexe en pensant que j'ai pu partir sans un repas digne de ce nom! Attend de voir ce que j'ai pris dans mon sac en plus de mon petit matériel.

Sur ces mots il sortit de son sac un grand emballage, lequel contenait une terrine, un pain noir et quelques fruits. Suivirent deux bouteilles au contenu transparent.

- Je... A l'origine je plaisantais en parlant de pique-nique... Mais là j'avoue que mes dons de voyance m'étonnent moi-même! Tu pars avec ce genre de menu à chacune de tes missions? Tu invite l'hérétique à déjeuner pour le capturer, c'est ça?


- Cesse de médire et à la place admire! Foi gras cuit en terrine en provenance de Bethil et pain noir venu de Wilwarin: un délice pour le nez et les papilles. J'ai préféré éviter les conserves, de peur que tu te vexe. Et tiens, j'ai pensé à toi en partant, dit-il en lui lançant l'une des bouteilles.

En l'absence d'étiquette, DeVaanne ouvrit la bouteille, renifla avec précaution d'un nez bouché par le froid, puis se risqua à une rasade. Le fort alcool des Marches de Rhéan lui glissa dans le gosier et lui réchauffa l'estomac.

- Où as-tu bien pu trouver cette merveille dans ce pays? A ce que j'en sais, l'exportation en est extrêmement limité...

- Chacun ses secrets. En attendant, moi, je mange! Il mordit à pleine dent sa tartine avant de reprendre la bouche pleine, catapultant à chaque mot. Comme je le dis, mieux vaut prendre chaque repas comme le dernier pour éviter, en cas d'incident, d'arriver devant l'Unique avec la peau sur les os.

- Cesse donc de créer tes propres canons et de t'en servir pour me bombarder de miette! Et fais donc plutôt tourner une assiette.


* * *


Au alentour de 23h00, ils atteignirent enfin les lumières de la Citadelle. Le trajet avait été fort long et les deux hommes n'avaient pris qu'une brève pause dans l'après midi, avant de finir le chemin dans une dangereuse obscurité.

- Nous y voilà! Bienvenue à Alkhazzar: vents glacés, chauffages absents et cheminées sans bois à tous les étages. Pour ce qui est des repas, la cantine locale vous garantie, à condition que le chef soit présent, des plats exécrables à toute heure du jours comme de la nuit, pour garder les compétiteurs dans un même état. En bref, l'endroit rêvé pour nous servir de base de replis.

DeVaanne contemplait les tours serties de fenêtres éclairés, pour peu nombreuses qu'elles étaient, avec un petit air de victoire sur le visage.

- Je le savais... Tu y est déjà allé pour goûter leur restaurant...

- Tu aura beau te moquer, il n'en reste pas moins que j'ai réussis à nous y mener en moins d'une journée.

- Hooo, mais pour ça, ne t'en fais pas, répondis DeVaanne en lui posant une main de métal sur l'épaule, je n'ai pas douté à un seul instant de tes talents de boy-scout.

- Tais-toi et grimpe.


Une fois installé dans l'une des nombreuse chambre inoccupé de la Citadelle, ils prirent un repas, suivit d'un court repos avant de se concentrer de nouveau sur leur principal problème.

-Bien, maintenant que nous somme ici, vas-tu enfin me dire comment tu compte t'y prendre pour localiser Aspharoth et son démoniaque aïeul au milieu de cet empire blanc?


De Vaanne

- Enfer blanc, plutôt, grogna l’inquisiteur. En fait, je préfère te laisser la surprise plutôt que tout raconter maintenant. Sache juste que je vais invoquer de l’aide.

- De la nécromancie ? s’écria Exodus. Tu es fou ?

De Vaanne soupira.

- Bien sûr. Et je vais donc sacrifier un jeune hermaphrodite d’apparence masculine après lui avoir fait avaler de force treize plumes de corbeau albinos sur un autel de marbre rouge tout en respirant profondément un mélange de champignons aux effets particuliers.

- Tu vas manquer de matière première, dans ce trou perdu…

- Exactement. C’est pourquoi ta proposition ne vaut pas la peine qu’on s’y arrête.

- Je me disais aussi. Tu es l’un des plus coincés dans une organisation de coincés. Aucune chance qu’on te voie un jour sniffer des champignons hallucinogènes.

- Ah ? Parce que c’est commun dans les pyjama-parties des répurgateurs ? Maintenant, tais-toi donc et contiens ta curiosité jusqu’à demain.

Exodus se contenta de grommeler un bon coup et s’enroula dans ses couvertures. L’atmosphère était, il est vrai, proprement glaciale et les murs bloquaient aussi bien le vent qui mugissait le couloir que des passoires.

- Ah, au fait !

- Quoi ?

- Tu avais raison. Le repas était infect.

- J’ai toujours raison, quand il s’agit de nourriture. Bonne nuit, inquisiteur.

Le lendemain matin, le répurgateur était attablé dans la grande salle du bâtiment, regardant d’un air soupçonneux la tasse posée devant lui, remplie d’un liquide mal défini à l’odeur peu engageante. Il se préparait à la porter prudemment à ses lèvres quand une voix derrière
la lui fit promptement reposer sur la table.


- Mes spalières grincent peut-être au moindre mouvement, mais tes ronflements réveilleraient un mort.

- Je ronfle, moi ? demanda innocemment Exodus.

- Oui, toi.

De Vaanne s’empara de la tasse sur la table et la but d’un trait. Une grimace d’horreur se peignit sur ses traits.

- Je n’arrive pas à y croire, dit-il. C’est encore pire que le repas d’hier soir. C’était censé être quoi ?

- Tisane de fleur des montagnes… Mais ! Au fait, où est passée ton armure ? demanda Exodus, interloqué. C’est incroyable, tu es bien humain, en fin de compte !

- Je l’ai enlevée pour éviter de geler sur place une fois dehors. Pour te seconde phrase, un échantillon de mon immense mépris envers ton absence d’humour suffira. Allez, direction le sommet, je veux avoir une vue d’ensemble sur la situation.

Quelques heures plus tard, les deux hommes arrivaient au sommet proprement dit. Le temps avait été exécrable pendant la quasi-totalité de la montée et ne s’était découvert qu’à l’approche de l’arrivée. Pour résultat, les fourrures qui les recouvraient étaient blanches de neige : seuls deux visages en dépassant semblaient apporter un peu de couleur et de chaleur dans ce règne glacé.

- Pour la vue d’ensemble, c’est raté, fit remarquer Exodus. On trône au dessus d’une mer de nuages…


- Pas grave, le trône me suffit, répondit De Vaanne en étendant une couverture sur la neige. Je vois pouvoir commencer. Et je vais avoir besoin de prier. Dans le calme.

- Ah…

- Donc fais-en autant. Ça te changera.

- Navré, seulement le dimanche. Je vais me contenter de regarder, dit Exodus en extrayant un brin d’herbe d’un de ses sacs et se le coinçant dans la bouche.

Malheureusement pour lui, Exodus ne vit pas grand-chose au départ. De Vaanne semblait s’être changé en bloc de glace, à l’exception d’une main gantée qui tournait régulièrement els pages d’un petit missel posé devant lui. Ses lèvres semblaient prononcer des mots, mais aucun son n’en sortait. Plus le temps passait, et plus le débit de paroles silencieuses s’accentuait : les lèvres de l’inquisiteur bougeaient désormais sans s’arrêter.

Sa main empoigna alors le missel et tourna plusieurs pages. Une douce lueur en irradia. De Vaanne parla enfin à voix haute.

- Il est dit généralement que seule la mort met fin au devoir. Mais pour nous, membres de l’Inquisition, même ce repos nous est refusé. Notre mission est trop importante pour que le passage nous exempte de la remplir. Aujourd’hui, Seigneurs Inquisiteurs des temps anciens,
entendez ma prière. Un de vos frères actuels demande votre aide : il a besoin de conseils, de quelque chose que vous seuls pouvez lui fournir. Répondrez-vous à son appel ? Seigneur Coteaz ? Seigneur Marchand ? Seigneur Rorken ?


A l’appel de chacun des noms, une forme spectrale se matérialisait devant les deux hommes. La première était bardée d’acier et supportait un aigle sur son poignet gauche tandis que la droit étreignait un immense marteau de guerre. De la seconde on aurait pu croire qu’un simple souffle de vent aurait suffi à la faire s’évanouir. Une robe de laine simple entourait un corps faible et souffreteux : seuls deux yeux d’une intensité brûlante montraient la détermination d’acier de son possesseur. La troisième, un homme aux traits altiers revêtus de vêtement d’une très grande finesse, respirait la noblesse et les responsabilités.

- Nous t’avons entendu, inquisiteur, dirent-elles en chœur. Énonce tes demandes, pour la plus grande gloire de la Foi.


- Mais auparavant, jeune homme, ajouta la petite silhouette d’un ton grinçant, explique nous pourquoi tu as besoin de notre concours à tous trois, Seigneurs Inquisiteurs. Nous n’acceptons pas d’être dérangés si cavalièrement. Et à titre personnel, je ne goûte guère la présence de mon collègue Coteaz.

- Seigneurs… commença De Vaanne.

- Laisse donc, le coupa le premier spectre. Le Seigneur Marchand s’est toujours cru plus important qu’il n’a jamais été du fait de son auto-exorcisme et de ce qu’il pense avoir vu alors. Le vieux corbeau de malheur…

- C’est pas faux, murmura De Vaanne, mais…

- Que doit-on dire de toi alors, jeune Coteaz, arriviste sans scrupule qui ne pensait qu’à monter les échelons de l’Inquisition ?

Exodus, sentant que la situation allait dégénérer si les spectres commençaient à s’enguirlander, décida de venir en aide à un De Vaanne complètement dépassé.

- Allons, messieurs, vous n’avez pas été invoqués ici pour régler les affaires pas claires de la famille ! Nous avons une mission à vous confier, et…

- Comment oses-tu, répurgateur ?


La voix de Marchand sembla cracher le mot.

- Nous n’avons pas été convoqués ! L’inquisiteur ici présent a respectueusement demandé notre présence, et s’il est muet devant ses supérieurs, tu devrais en faire autant, voire plus encore car tu es rien et moins que rien !

Les oreilles d’Exodus devinrent d’un beau rouge flamboyant et il se préparait à répliquer quand le troisième spectre prit enfin la parole.

- Il suffit, dit Rorken d’une voix douce. Le répurgateur n’aurait pas du parler mais il a raison. Quelle est ta demande, jeune inquisiteur ? demanda-t-il à De Vaanne sans attendre la réponse de ses collègues.


- Merci, Seigneur. Nous suspectons un cas de possession non démoniaque assez grave. On nous a assuré que la possession avait été traitée, sans pour autant que le possesseur soit entièrement retiré du corps de l’hôte. Nous en doutons fortement, mais celui-ci s’est enfui par un sortilège impie de téléportation dans les montagnes qui nous entourent. La recherche matérielle étant inefficace, nous vous demandons de mener la vôtre sur le possesseur et de trouver sa localisation. Le répurgateur et moi-même nous chargerons ensuite des mesures… temporelles.

- Je vois. Tu as le nom du possesseur, je suppose.

- Oui, Seigneur. Un roi de la race Gold. Nepheroth, premier gardien d’Osphalte. Marié à une déesse. Il ne devrait pas être difficile de retrouver sa trace.

- De cela nous sommes seuls juges, répondit Rorken d’une voix froide. Nous partons immédiatement à sa recherche.

A peine ces mots étaient-ils prononcés que les trois spectres se dissolvaient dans l’air, ne laissant rien subsister sur le sommet qui aurait pu trahir leur présence. De Vaane se releva, l’air profondément las.

- On peut rentrer maintenant, et attendre.

- Ils ne semblaient pas m’apprécier particulièrement, dit Exodus, toujours choqué du mépris qu'on lui avait témoigné.

- Il faut les comprendre. Ils viennent d’une période où les répurgateurs étaient réellement la voie de garage pour les inquisiteurs les plus excités…

-... Tu es sûr d'avoir bien choisi ?

- Certain. Coteaz était assoiffé de pouvoir, mais uniquement parce qu'il pensait qu'avec plus de moyens, il remplirait mieux sa mission. Marchand était un vieux chnoque pessimiste, mais il en connait un rayon sur la possession. Et Rorken... c'était un enquêteur d'exception, et un
des rares qui puisse faire travailler les deux autres ensemble.


- On est pas rendus...


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Message posté le 18:41 - 7 nov. 2015

Exodus

Depuis le ciel du pays de Ter Aelis, ou bien depuis Wilwarin si la citée passe à proximité, il est possible d'apercevoir les plus hauts sommets des monts d'Echoriath, cette fabuleuse chaîne de montagne qui bloque presque tout le nord  du pays et dont les plus hauts pics s'amusent à caresser les nuages (les nuages détestent d'ailleurs qu'on les caresse: ça les chatouille horriblement).

Rapprochons-nous un peu.

Depuis ces mêmes sommets, on peut savourer une vue sans nul autre: des flancs escarpés à perte de vue, recouverts d'une épaisse couche de neige, océan glacial précipité sur la roche par les nuages qui planent à quelques centaines de mètres seulement au dessus des monts (les nuages sont très rancuniers). Le soleil s'y reflète, donnant naissance à une surface lisse et dorée tellement sublime qu'elle s'imprime dans la mémoire aussi surement qu'elle brulent la rétine de l'observateur négligeant.

Rapprochons nous encore.

Perchée sur les hauteurs d'un des plus impressionnant glacier, la forteresse d'Alkhazzar domine de toute sa majesté le paysage qui s'étend sous ses fondations. Immense disque de pierre gris et argent, entrecoupé de vitraux unis (ou parfois juste du cadre), elle s'étend sur le vide par une large passerelle menant à un belvédère, en haut duquel trône un phare rayonnant (très loin de la mer, on vous l'accorde, mais du plus bel effet). Neige et glace semblent sans emprise sur cette forteresse qui dégage sa propre froideur, laquelle ferait pâlir les glaçons de jalousie s'ils était mis au courant. Des chambres spacieuse, adapté au passage du vent, des cheminées sans bois, par égard envers les glaçons (il faut bien se faire pardonner) et des draps le plus souvent remplis de poux (la femme de ménage habite en effet dans la vallé, au chaud). Et au sommet du Dôme de la forteresse, une large ouverture, un cercle de pierre sans toit auquel on accède par un escalier tortueux. L'endroit est battu par les vents en permanence et la température n'a jamais essayé de se remonter vers le zéro (en vérité elle ne sait même pas compter). Bref, c'est le cadre idéal pour le week-end, vous en êtes maintenant convaincu.

Mais que voyons nous sur ce sommet? Deux silhouettes semblent se détacher du manteau enneigé, deux petits points sombres frigorifiés.
Rapprochons-nous encore une fois.

Ils sont deux à se regarder en chien de faïence par leur yeux depuis longtemps figé par le froid.  Les maigres pensés qui transitent encore dans leur petits cortex gelés sont celle du regret d'avoir quitter leur douce couverture pour ce manteau en peau d'ours rendu blanc pour la neige. Ils vont mourir ici, affamés, seuls et oubliés de tous, à méditer dans leurs derniers instants sur les grandes questions métaphysiques qu'ils n'auront bientôt plus loisir de poser. Car tel est le destin de deux poux perdus dans le froid. Comme quoi la nature est cruelle.

Deux poux? Il semble que le dernier rapprochement ai été trop grand. Nous nous en excusons.
Retour léger en arrière. Là, c'est bon!

Les deux hommes sont emmitouflés dans plusieurs peaux épaisses rendus blanches par la neige (ce fût déjà dit mais la précision est importante. Sans doute). Leur posture, similaire à celle de nos précédents sujets, pourrait porter à confusion. Mais vous allez vite vous rendre compte que l'écart d'évolution et d'intellect est flagrant, et permet de reconnaître immédiatement les héros de cette histoire.


**
*


- J'ai froid.

La voix du répurgateur Exodus se perdit rapidement au milieu des rafales de vents qui parcouraient le sommet en ce frais et ensoleillé début d'après midi.
Pourtant, le message parvint au oreilles quelque peu bleuies de son collègue, l'Inquisito-palladin DeVaanne, qui réprima un soupir, d'une parce que il avait déjà entendue cette phrase 259 fois depuis  le début de la journée, et de deux parce qu'il évitait au maximum d'ouvrir la bouche, craignant de voir la totalité de son appareil buccal exploser sous l'effet du froid. Il se tenait assit en tailleur sur la pierre même, séparé du froid par d'épaisse fourrure et devant lui reposait un missel ouvert mais dont les pages ne bougeaient même pas malgré le vent.

De son côté Exodus se faisait un devoir de ne laisser percevoir de lui qu'un morceau très réduit de visage, camouflé entre col haut cachant les oreilles, chapeaux fourré enfoncé sur le crâne et barbe mal taillée envahie de neige. Il avait froid (on l'aura compris) et il s'ennuyait, ce qui accentuait son ressentit du climat local. Le seul point positif de la journée, le fait qu'ils n'avaient pas eu à retourner au sommet du glacier pour que son collègue retente une connexion, n'avait suffit à lui remonter le moral.


- J'ai froid, répéta-t-il avec obstination.

260, songea DeVaanne.

- Et j'en ai franchement marre! rajouta Exodus avec véhémence.

Cette fois DeVaanne laissa partir un soupir. Son endurance atteignait ses limites.

- T'est-il donc définitivement impossible de garder la bouche fermée et la langue immobile plus de trente secondes? demanda-t-il en laissant échapper un jolie petit nuage de vapeur.

- Catégoriquement impossible, répondit l'intéressé, sans quoi le givre va sceller ma bouche pour l'éternité, ce que je ne souhaite pas.

DeVaanne s'autorisa un fugace sourire en imaginant son collègue muet pour toujours, ainsi qu'un profond sentiment de satisfaction.

- Non mais franchement de quoi on a l'air, je te le demande!

- Nous avons l'air de ce que nous sommes: deux inquisiteurs en missions si tu veux tout savoir, en attente d'une information capitale avant la purge d'une entité sans doute millénaire. Je pensais que tu étais au courant depuis le temps...

Le ton employé avait laissé plané un sérieux doute quand au nombre réel d'inquisiteur présent dans l'esprit du fanatique.

- On a plutôt l'air de deux putain de pingouins, à rester planté là à attendre l'illumination au milieu des glaciers!

Après avoir corrigé mentalement sa phrase –  imaginant plus facilement l'actuel paladin, tête nue et assis dans ses couvertures blanches, en un cormoran échoué en plein blizzard – il enchaîna.

- Et tout ça pour quoi, hein? Pour voir apparaître trois spectres qui ne peuvent même pas se voir en peinture et entendre dire que notre cible est "quelque part au milieu de la neige, bonne chance, au revoir, on retourne à notre partie de bridge"!

- Je trouve que tu manque singulièrement de respect envers nos prédécesseur, lui répondit DeVaanne sur un ton lourd de reproche. Et si tu estimes pouvoir faire mieux, je t'en pris, pars donc seul dans les montagnes et meurs de la manière la plus rapide et silencieuse que tu puisse trouver! Tu n'auras pas fait un kilomètre dans ce blizzard que tu sera transformé en statue de glace. Et au moins je n'aurais plus à supporter ton intarissable discours.

- Au moins on serait vite fixé, au lieux de se sentir geler à petit feu...

Exodus se mit à faire les cents pas en suivant le cercle dessiné par l'esplanade, maugréant dans sa barbe. Il tentait de réchauffer son corps de tout les moyens possibles depuis que le cuisinier de la forteresse (dont seul le titre ventait sa condition) l'avait interdit de passage parmi les fourneaux, sous prétexte qu'il ne pouvait pas les fournir tout deux en chocolat bouillant dans les quantités demandés, car ils avait déjà liquidé le stock annuel. Exodus avait beau s'être défendu en expliquant que la consommation ne se bornait qu'à sa seule personne depuis le début et que, allez, quoi, soyez sympa juste une tasse, le responsable n'avait rien voulu savoir, et reposez ce jambon où vous l'avez trouvé, merci.
L'autorisation de tirer à vue donnée aux marmitons avait achevé de décourager le répurgateur, qui en était donc réduit à faire les cent pas pour se réchauffer. Preuve, encore une fois, que c'est la faim qui fait le plus marcher son monde.


- Et puis franchement, niveau respect on repassera, reprit Exodus, laissant la barre à sa mauvaise fois, avec les vives recommandations de son mécontentement. Je me permet de te rappeler leur comportement de ce matin, qui aurait rendu des points au "capital sociabilité" de nos Ministres du Culte.

- Je t'ai déjà expliqué le pourquoi de leur hostilité, il n'y a rien à rajouter, murmura DeVaanne dans une tentative de tuer le débat.

- N'empêche, maugréa son comparse, je me demande bien ce qui m'a retenue de leur souffler dans les bronches...

- Sans doute ton instinct de survie, le même que je maudit depuis le temps que je te connais. Et peut-être même un hypothétique échantillon de bon-sens, appuya DeVaanne avec un amusement non dissimulé, bien que j'en doute fort: tu n'aurais même pas pu les toucher.

- Justement, peut-être que si, contre-attaqua le répurgateur avec un grand sourire (qu'il regretta vite lorsque ses gencives lui rappelèrent avec soin la température ambiante). J'en avait discuté avant mon départ avec Teclis, tu sais, le savant de l'Ordre. On était partit sur le cas des ectoplasmes et des manifestations hérétiques incorporelles et...

DeVaanne était trop occupé à se traiter de tout les noms d'oiseau créés par l'Unique et même des autres pour écouter, maudissant son esprit d'avoir loupé une censure capitale et offert à Exodus un terrain favorable à l'un des exposés dont il avait le secret. Et ce dernier s'en donnait à cœur joie, usant de grand geste pour illustrer ses propos – ce qui, les bras et les jambes sous plusieurs mètres de fourrures, donnait plus l'impression de regarder un matelas prit de convulsion.

- … déjà qu'on obtient de bons résultats avec l'onction d'huile sacrée sur les lames, aussi on s'est dit qu'en partant de cette base, il serait possible de rendre tangible l'éthéré mais il fallait rajouter...

Se concentrer sur autre chose. Regarder le ciel, par exemple. Oh, un nuage! C'est beau un nuage.

- … et c'est là que j'ai proposé d'utiliser du gingembre, dont les effets...

Depuis combien de temps n'avait pas regardé le ciel comme ça? Qu'est-ce qui l'en avait dissuadé?

- … mais l'hypothèse de faire sacraliser des pieds de gingembres n'ayant jamais été soulevé, ont était un peu à cours de matière première, aussi...

La réponse vint d'elle même lorsque le cumulonimbus qu'il fixait pris peu à peu la forme d'Exodus en train de sourire à pleine dent: son imagination, alliée à des nuages taquins, lui faisait toujours voir ses pires cauchemars se dessiner dans le ciel.

- … mais vu que je devais partir dans les jours qui suivaient, je n'ai jamais eu loisir de connaître la validité de cette théorie. Enfin, ça attendra, tu ne pense pas?

L'interpellé ne répondit pas, trop occupé à garder les yeux fermés et à répéter les 201 prières de la vertu et de la patience enseignées à l'homme par l'Unique en personne. Et Il les avait sans aucun doute transmit pour se genre de situation.

- Est-ce que tu as seulement écouté? Demanda un Exodus détestant qu'on l'ignore.

Le manque de réponse de l'inquisiteur plongea son collègue dans un concert de grognement. Puis, regardant autour de lui, il réfléchie quelques instant avant d'afficher un sourire type "sournoiserie en  préparation, on va se marrer". Le genre de sourire qu'affiche un enfant taquin après avoir remplacé votre confiture préféré par de la colle forte saveur anchois. Il se pencha quelques instant, complota pour lui même et se redressa avant de faire face au dos de son collègue.

- Hey, regarde par là, c'est pas eux?

DeVaanne se retourna, surpris qu'Exodus repère quoi que ce soit dans cet enfer blanc.

- Où est-ce que tu –

Il n'eut jamais le temps de finir sa phrase vu qu'une boule de neige de la taille d'un poing de troll vint s'écraser sur la seule partie de son anatomie jusque là épargné par la neige, c'est à dire son visage. Il respira lentement, posément, puis parla d'une voix calme, du genre de celle qui veut vous dire de ne pas bouger, ça ne fera presque pas mal, c'est pour votre bien.

- Ose enco –

La petite sœur de la première boule de neige suivit la même trajectoire que son ainée, à un détail près qu'elle rentra en partie dans l'oreille de la cible. Cible qui se mit soudainement à bouillir aussi bien intérieurement qu'extérieurement (avec un nuage de vapeur du plus bel effet) et dont l'esprit fut saturé de jurons, jusqu'à ceux qui était inconnues de la censure.
Lui lancer quelque chose. N'importe quoi, du moment qu'il pourrait savourer la vision de Exodus assommé. Pourquoi n'avait-il pas pris son casque avec lui? Près de  deux kilos d'acier auraient pu se révéler très utile. Mais à défaut, DeVaanne prit le plus gros tas de neige qu'il pu tenir entre ses deux mains, se releva et le lança avec toute sa haine en direction d'Exodus le "bientôt enterré vivant sous la neige".

La boule de neige fusa en direction du répurgteur quand une masse éthéré se matérialisa entre elle et son objectif.


- Jeune inquisiteur, nous avons –

La boule de neige traversa la silhouette du Seigneur Rorken comme au ralentit, faisant apparaître des vagues sur toute la surface de son corps fantomatique, sous les yeux grands ouverts de DeVaanne, lequel recommandait en cet instant son âme à l'Unique. Une petite masse de neige à moitié fondu s'écrasa derrière le vieil inquisiteur, juste au pied de ses deux confrères qui venait de se matérialisé.

Les regards se tournèrent d'abord vers Exodus, qui s'était pris d'une passion subite pour les nuages, sifflotant doucement tout en indiquant d'un pouce discret la direction approximative de DeVaanne. Ce dernier se tenait droit comme un "i", les mains coupables dans le dos, le port de tête le plus digne possible (encore qu'avec la neige qui lui collait aux cheveux et à l'une de ses oreilles, la dignité en prenait un sérieux coup).


- Hum, ravi de vous voir de retour mes Seigneurs. Nous nous préparions justement en prévision de votre arrivée.

- Je vois ça, répondit Rorken d'une voix douce, aussi glaciale que la température ambiante. Je pense donc que vous serez heureux de savoir que votre départ est pour bientôt, car nous avons retrouvé la cible que vous cherchez.

- Une bonne nouvelle il est vrai...

- Mais il y a quelques... nouveautés par rapport à ce que tu nous avais dit, souligna à son tour le seigneur Coteaz. La cible est maintenant multiple.

- Le Gold est possédé, le doute n'est même pas à considéré. Marchand affichait un visage de dégout total et sa voix rocailleuse transpirais de mépris. Et l'entité est très puissante, pour ne pas arranger les choses. Mais surtout, ils sont accompagnés. Une présence non-humaine, forte... et très liée à la cible. Vous allez devoir vous surpasser, Inquisiteur.

- Enfin, dernière information d'importance: ils se trouvent dans une grotte aux résonances étranges. Le lieu est très ancien, et il en dégage une énergie païenne particulièrement intense. Toutefois, impossible d'en déterminer la source: la caverne elle-même, ou bien quelque chose qu'elle renferme.

- C'est encourageant comme tableaux, murmura Exodus si fort que tout le monde pouvait l'entendre.

DeVaanne lui lança un regard qu'on pouvait traduire comme un appel au silence sans condition. Sans laisser de temps aux anciens inquisiteur de relever la remarque, il prit la parole, les mains jointe devant lui comme dans une supplique.

- Nous vous remercions infiniment pour votre aide Seigneurs, notre traque aurait pu se finir ici sans votre intervention. Êtes-vous certains que ce soit tout ce qu'il y ai à savoir?

- Voudrais-tu aussi que nous traquions et détruisions ces hérétique à ta place, jeune Inquisiteur? Lui lança Coteaz sur un ton méprisant. Nous avons beau être intouchable, notre rôle n'est pas...

- Justement, l'interrompit Exodus en faisant un pas en avant, le doigt scientifiquement levé, je planche sur une théorie qui –

- LA FERME! Lui répondirent immédiatement quatre voix à l'unisson, dont trois d'outre-tombe.

Exodus fit immédiatement deux pas en arrière, les bras levés en signe de reddition, avant de retourner réfléchir à la sacralisation du gingembre par l'onction.


- Le seigneur Coatez, même si je souffre de l'admettre, à raison. Nous n'avons pas pour tache de traiter des problèmes de ce monde à votre place, ou bien l'Unique ne nous aurait pas fait mortel. Toute créature hérétique est un nid de surprise et il faut s'attendre à tout lorsqu'on les chasse. J'espère que je ne t'apprend rien, Inquisiteur?

Les silhouettes de  Coteaz et de Marchand se dissipèrent alors, regagnant leur lieu de repos. Seul Rorken restait encore visible.

- L'entré de la caverne que nous avons trouvé se trouve à environ quatre kilomètres d'ici, sur le versant de la montagne la plus à l'ouest par rapport à votre emplacement. Vous devriez passer facilement sur celle-ci en empruntant le col en contre-bas. Le passage est camouflé derrière une congère mais vous devriez pouvoir vous en sortir. Toutefois, il se peut qu'il y ai d'autre accès. Bonne chance, à vous deux.

Puis il se dissipa à son tour, regagnant le missel de cuir posé sur la pierre.

Les deux hommes restèrent là à regarder le missel, celui qui leur faisait face, puis encore le missel. Enfin, DeVaanne se pencha pour refermer le volume de cuir dans une prière de remerciement, avant de le ranger respectueusement sous une tonne de couche de fourrure.

De son côté, Exodus commençait déjà à faire jouer ses bras, plus part réflexe que part réel besoin (il en était arrivé au stade ou le froid ne se fait même plus sentir, et où la notion de chaleur est automatiquement censuré par des neurones frigorifiés.


- Bon, ça ne c'est pas trop mal passé, encore une fois... Puis, fixant le flanc de la montagne désigné par Rorken: Si on part dans la demi-heure, on devrait pouvoir atteindre la zone avant la tombée de la nuit.

DeVaanne se contenta d'approuver par un hochement de tête, accompagné d'un "hu-hu" très distrait, cherchant visiblement quelque chose par terre.

- Le temps de prendre nos affaires, de faire un crocher par les cuisines pour subtiliser une thermos pleine très grand format et on est partit!

- Tout à fait, mais il reste un détail avant tout cela, lui répondit DeVaanne avant de lâcher un "ah" satisfait.

Exodus interrompit son plan de bataille mentale contre les formations de marmitons et tourna vers son collègue un visage interrogatif.

On dit que la vengeance est un plat qui se mange froid. Exodus pour sa part, lui trouva à la fois un arrière goût de réchauffé au niveau de la forme, vite remplacé par un effet givrant du plus bel effet lorsque la boule de neige s'écrasa en partie dans sa bouche mi-close. Ce fourbe de DeVaanne avait en prime garni la boule du plus de glaçons qu'il avait pu trouvé, dans un but sans doute exutoire.
Exodus recracha une bouffé de neige, s'essuya rapidement le visage avant d'admirer l'inquisiteur en train de descendre les marches menant à l'intérieur d'Alkhazzar d'un pas digne mais rapide.


- Bien visé, concéda-t-il.


*
**


Promis, la prochaine fois on choisira les poux.


De Vaanne

C'est beau un inquisiteur investi d'une mission. La tête haute, les épaules larges, il se dirige d'un pas vif et martial vers son objectif, bien décidé à ne laisser rien ni personne l'en détourner. C'est d'ailleurs pourquoi un bruit crissant le suit à la trace dans ses pérégrinations à travers l'hôtel d'Alkhazzar.
En fait, si on veut être tout à fait précis, il jure et ahane, le corps tendu en avant pour tirer un poids particulièrement lourd. Donc autant pour l'allure martiale, là ça fait plus docker de Galvorn (en armure dorée quand même). Mais que traîne-t-il avec autant d'obstination et d'abnégation ?

- Mon chocolaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaat !

Ah, oui... logique.
Donc, nous avons d'un côté De Vaanne, inquisiteur de son état, plus d'un quintal, métal compris, et un mètre 90 d'obstination rigide et généralement hostile à toute forme d'exodisme. De l'autre, le répurgateur Exodus, un peu moins d'un quintal, cuir et multiples repas compris, également près d'un mètre 90 de désespoir et de haine envers le premier. Entre les deux, un arrêt aux cuisines, la victoire facile sur les cohortes de marmitons armées jusqu'aux dents de louches et autres ustensiles de cuisine, et le vol qualifié des réserves de chocolat brûlant pour les trois années à venir.
Toute cette lutte fort intéressante dans un match de catch pro, mais fort peu professionnelle, explique le crissement susnommé qui plane dans l'air depuis le premier embranchement menant aux cuisines, quelques trois couloirs plus tôt. En réalité, le grincement va bientôt s'arrêter, les ongles du répurgateur qui griffaient frénétiquement la pierre des murs arrivant en limite d'utilité pour laisser place aux doigts eux-mêmes, et fort possiblement à de longues traces rouges sang de fort mauvais goût et difficiles à enlever pour la femme de ménage quand elle remontera de la vallée dans six mois.

- Bon, ça suffit maintenant ! jurla l'enarmuré en laissant tomber son fardeau comme un sac de patates.

Ledit sac ne répondit pas, trop occupé qu'il était à souffler ses des ongles proches du point d'ébullition. De Vaanne en profita pour contourner le répurgateur et, se plantant devant lui, c'est à dire entre les cuisines et lui, dégaina sa zweihänder et l'abattit, pointe en avant, à quelques centimètres d'Exodus.

- Répurgateur, nous allons jouer à un jeu. Cette épée symbolise la limite à ne pas franchir. Tout doigt de pied subrepticement passé derrière cette ligne sera impitoyablement sectionné du corps principal. Sans anesthésie. La partie intéressante du jeu, c'est que je peux bouger la limite, donc attention à ne pas te faire prendre.

- Monstre !

- Je sais. Assez causé, va récupérer tes affaires !


Quelques trop courtes minutes plus tard, les deux hommes étaient de retour dans l'horreur blanche, complètement harnachés et prêts pour à peu n'importe quoi qui ne totalise pas le potentiel destructif d'un Exterminatus en bonne et due forme (ou d'un Sanz mal réveillé). C'est d'ailleurs faux, car l'un d'entre eux n'était pas prêt à une chose. Attendre.

- On a même pas eu le temps d'aller aux cuisines et pourtant tu me fais attendre comme un imbécile devant la porte. J'ai beaucoup souffert de tes coups d'inquisiteur faux-jeton, mais là je crois que tu passes les bornes ! Dis, j'espère que tu m'écoutes ?

- Entre toi et le blizzard, mon cœur balance Vous avez à peu près la même valeur informative.

- Tu peux me dire ce qu'on attend alors ?

- Bien sûr. Regarde, répondit De Vaanne en tendant le bras vers une forme qui sortait de la tourmente, en provenance directe des écuries.

- Des chevaux, par ce temps ? s'écria Exodus.

- Mais non voyons, tous les chevaux sont descendus pour l'hiver dans la vallée. En attendant le personnel s'en sert de fourre-tout. Dont un fourre-tout pour ses équipements neigeux.

- Du genre ? demanda le répurgateur, soupçonneux.

- une luge assez grande pour nous contenir tous les deux avec l'équipement, réplique l'inquisiteur en souriant comme un gosse. Allons, en voiture, froussard, que valent quelques minutes de descente vertigineuse contre un après midi de marche gelée, à faire attention aux avalanches et autres saloperies que cache une montagne en plein hiver ? On passe le col et ça nous dépose presque devant l'entrée !

- Je vais le regretter. Oh, je sens que je vais le regretter...

- Braque à droite, je vois une souche !


De Vaanne, aux commandes de la luge qui fonçait comme un bolide sur les pentes enneigées, fit celui qui n'avait pas entendu, ce qui par ailleurs était parfaitement possible vu le vent qui sifflait à ses oreilles et l'état congelé des dits appendices, et infléchit sa course vers la gauche. Il en fut récompensé par un grognement insultant provenant d'Exodus. Quelques instants plus tard, l'énorme souche disparaissait déjà derrière eux.
L'inquisiteur sourit : cela, c'était du sport. Rien de mieux pour tester des réflexes qu'une luge de bonne qualité sur une forte pente enneigée et quelques arbres pour rajouter de la difficulté. Il pouvait voir l'autre côté du col, plus loin en contrebas, le terme de leur trop court voyage.
Il leva les yeux : en réalité, il ne voyait plus l'arrivée. Un instant désorienté, il comprit et hurla à son compère derrière :

- Accroche toi, ça va secouer !

- Parce que tu penses que je m'amuse, derrière ? répondit Exodus. Qu'est-ce que tu as vu cette... oups.

Le oups provenait d'une rencontre forcée avec un repli convexe de terrain : congère, souche (encore ?) enterrée sous la neige, tas de terre mystérieusement posé là, bref, la luge des deux inquisiteurs fila vers le sommet comme un éclair et, une fois là haut, décolla majestueusement. L'atterrissage fut à la mesure : brutal. Le choc manqua leur faire sauter l'émail des dents mais il fut heureusement amorti par la neige, pour la plus grande part. Le choc du métal sur le métal, cependant,comme une batterie de cuisine qui s'effondre,  s'entendit à des lieues à la ronde.
La luge continua sa course à la même vitesse, les deux hommes toujours dessus. Aucun n'avait versé dans le fossé malgré l'acrobatie. Exodus était cette fois devenu d'un beau vert, et le front de De Vaanne se plissait de concentration. La cible était toute proche, et il fallait bien calculer pour éviter de descendre dans la vallée de l'autre côté du col. Il réfléchit quelques secondes et jura.

- Oh, et puis à l'Unique les calculs !

D'un coup sec, il tourna les patins directionnels sur le côté au maximum de leur capacité, ce qui eut pour effet de faire verser la luge et de les envoyer tous les deux, cul par dessus tête dans la congère la plus proche. De Vaanne se releva le premier, tandis qu'Exodus perdait un temps impressionnant à se débattre avec sa rapière et à invectiver son collègue, le traitant de noms imagés et inconnus jusqu'alors.

- Et bien quoi ? On est arrivés à destination, la grotte est à cinq cents mètres à gauche. Et silence, on va se faire repérer.

Les insultes redoublèrent.


Exodus

- Se faire repérer ? Riposta le répurgateur. C'est déjà un miracle en soi que l'on ai pas déclenché plus de trois avalanches à la minute avec tout le boucan que l'on a fait dans cette saloperie de – où est mon chapeau !?

Le visage anxieux (et encore un peu vert) d'Exodus se mit à tourner frénétiquement à la recherche de son couvre-chef, qu'il repéra finalement à moitié enseveli sous la neige. DeVaanne s'autorisa un bref sourire en le voyant procéder à une véritable mission de sauvetage, notant dans un coin de son esprit que le chapeau de son collègue pourrait, le cas échéant, faire un excellent moyen de pression quant à son activité.

- La prochaine fois, commença Exodus après avoir vidé son chapeau de la neige qui l'occupait et se l'être vissé sur la tête, je ferais du petit bois de tout objet ressemblant de près ou de loin à une luge, puis j'en ferais un bûcher sur lequel je ferais cramer toute personne ayant ne serait-ce que l'ombre de l'intention de me faire monter dessus! Ou l'inverse.

- Soit original un instant et cesse de te plaindre. On doit se dépêcher de rejoindre cette grotte avant qu'un autre pépin du type blizzard ou prédateur nous tombe sur le museau.

Les deux hommes se mirent à marcher d'un pas rapide, encouragé par la promesse de trouver un abri isolé du vent glacial et peut-être un peu plus chaud. Les cinq-cent mètres qui les séparaient de la grotte montaient légèrement en un faux-plat recouvert de plusieurs mètres de neige et entourés par de nombreuses congères sur lesquelles rebondissait la voix d'Exodus qui jurait devant l'Unique que la prochaine fois, il s'y rendrait à pied ou en volant s'il le fallait, mais surement pas sur "cette saloperie de cercueil monté sur patin".

Au bout de dix longues minutes, l'entrée de la grotte se fit enfin voir, crevasse noire au milieu d'une muraille d'un blanc immaculé. Les deux inquisiteurs restèrent sur leur garde et examinèrent rapidement les traces que la neige n'avait pas encore achevé d'effacer: des empreintes de gros animaux, type loups des neiges, ainsi que de bottes. Et au milieu des traces plus inquiétantes, comme si la neige avait fondu puis immédiatement glacé sous l'effet conjugué de la chaleur et du froid. Les traces de loups s'écartaient de la grotte mais les bottes s'y engouffraient, les fondus disparaissant au bout de quelques pas.


- Prêt? Demanda DeVaanne par pur formalité avant de s'engouffrer dans les ténèbres.[/i]

- Maintenant que tu le dis, je crois avoir oublié mon instinct de survie à la forteresse... Je ferais sans doute mieux d'aller le chercher, non?

- Tu en trouvera un autre ici, lui répondit l'écho de la voix de l'Inquisiteur. Maintenant suis-moi.

Le répurgateur avança, poussé par le vent et disparut à son tour dans la noirceur de la grotte. Il fit une dizaine de pas avant de voir la silhouette de son collège se découper au niveau d'un coude que formait le boyau, soudain bien plus éclairé.

- Je crois qu'on va pouvoir avancer sans torche et bien plus rapidement, dit ce dernier avec motivation. Ces cristaux semblent couvrir toute la paroi et ce aussi loin que porte le regard.

Exodus contempla en même temps qu'ils progressaient les cristaux luisant qui sortaient de la paroi de manière totalement anarchique. Ce n'était pas une installation lumineuse comme les aimaient habituellement les anciennes races païennes, mais bien un phénomène naturel du plus bel effet, inondant d'une lumière bleue-argentée les murs de pierre. Le passage lui-même ne donnait pas de signe apparent de construction, hormis le simple fait qu'il était d'un taille quasi-régulière sur toute sa longueur. Il se dégageait une étrange impression de cet endroit, sans pouvoir réellement la définir. Le répurgateur se surprit à réciter mentalement l'une des prières de voyage qu'il avait appris, sans se souvenir de l'avoir à un moment commencé.

- Ces cristaux sont peut-être la source d'énergie dont parlaient les Inquisiteurs, fit-il observer au bout de plusieurs minutes. Je connais des Archivistes qui seraient près à beaucoup de chose pour s'en approcher. Je donnerais moi-même beaucoup pour voir leur réaction, conclut-il avec un sourire.

- Si tu penses à un Archiviste en particulier et s'il s'agit du même auquel je pense moi-même, alors je donnerais encore plus pour me retrouver très loin de lui le jour où il mettra la patte la-dessus. Toutefois, pas de conclusion hâtive: nos estimés – malpolis, oui, mais estimés tout de même – prédécesseurs nous ont dit que la résonance païenne pouvait venir aussi bien de l'endroit lui-même que d'une chose qu'il renfermerait. Et qu'importe la quantité de ces cristaux, ça m'étonnerait qu'ils suffisent à émettre une énergie capable d'inquiéter trois de Ses plus grands serviteurs.

DeVaanne regarda quelque cristaux sur sa droite, réfléchissant sur ce qu'il se devait dire pour finir mais qui semblait vouloir lui échapper sans passer par les lèvres. Il réfléchit quelques secondes avant de finalement s'en souvenir.

- Ah oui! Dit-il en se retournant. En attendant, en l'absence d'information, interdiction de toucher  les...

Il s'interrompit quand il vit Exodus en train d'approcher une de ses dagues en direction des cristaux, sans doute avec l'intention d'en déchausser un ou deux.


-... Cristaux. Exodus!

- Quoi encore? Tu viens toi-même de dire qu'il ne sont sans doute pas dangereux, et je te promets que je le lui donnerais quand tu sera à au moins un kilomètre. Et puis c'est pas comme si je risquais de perdre un bras...

- Tu n'y touches pas! Ordonna DeVaanne en détachant chacune de ses syllabe. Principe de prudence. Je commence à croire que tu as réellement oublié ton instinct de survie. Maintenant on continue à avancer.

Les deux inquisiteurs se remirent en marche, DeVaanne se promettant intérieurement qu'il limiterait le plus possible à l'avenir les missions en binômes, Exodus maugréant contre les esprits obtus qui empêchaient la science d'avancer et qui sait de trouver des moyens pour faire cuire instantanément une portion de pâte même en plein blizzard.

La marche parut durer une éternité, et une heure s'écoulait aussi lentement qu'une journée. Le boyau s'était incliné au bout d'un quart d'heure et descendait depuis sans interruption, les cristaux étant à chaque fois un peu plus nombreux, occupant parfois même le sol. La froideur glaciale des sommets avaient peu à peu laissé place à une chaleur sèche, de plus en plus difficile à supporter à mesure que le boyau s'enfonçait en raison des tenues fourrés et des capes. Ils s'arrêtèrent deux minutes pour boire un peu d'eau, encore glacée de leur passage en altitude.


- Une chance que le passage soit unique, fit remarquer DeVaanne en passant la gourde à son comparse. Je n'ose même pas imaginer comment nous nous y serions retrouvé s'il y avait eu la moindre intersection.

- On aurait pu suivre le courant d'air. Il souffle régulièrement en direction de la sortie, et de toute façon ça indique forcément un autre moyen d'accès.

DeVaanne ôta son casque et constata en effet un léger courant d'air frais, particulièrement agréable sous cette chaleur. Un point à mettre sur le compte du goinfre se dit-il intérieurement.

- Continuons, dit-il en replaçant son couvre-chef, le boyau semble redevenir plat un peu plus loin.

Ils se remirent à marcher dix minutes avant de tomber sur un gouffre impressionnant qui semblait traverser toute la montagne. De très petits flocons tombaient dans le gouffre depuis une minuscule ouverture au sommet, des centaines de mètres plus haut, bien trop haut pour que la lumière du jour n'éclaire efficacement l'endroit. La seule luminosité venait des grappes de cristaux qui émergeaient ça et là sur la gigantesque paroi de pierre tel des anémones dans une faille sous-marine, et disparaissaient aussi loin que le regard pouvait porter.
En face du tunnel, franchissant avec audace le précipice, se tenait un long et fin escalier de pierre, premier signe de construction depuis leur arrivée. Il semblait millénaire mais aussi fragilisé par la multitude de fissures et crevasses qui le parcouraient, quand ce n'était tout simplement pas une marche qui avait disparu dans le vide. Tout en haut, des centaines de marches au dessus de leurs têtes et pourtant encore bien loin de la faille au sommet, une ouverture luisait d'une lumière bleutée au plein milieu de la parois.


- Voilà la source du courant d'air, fit amèrement DeVaanne. On peut sans doute oublier l'idée d'un accès secondaire, à moins d'apprendre à voler dans la journée. Ne nous reste donc plus que cet escalier.

- Après avoir tous descendus, on remonte. Logique indiscutable, fit Exodus avec moquerie. Je passe devant si ça ne te dérange pas: l'escalier semble antédiluvien, et je préfère repérer les marches fragiles avant que toi et ton armure ne fassiez s'écrouler directement l'ensemble.

- Ta sollicitude me touche, répondit un DeVaanne presque surpris. T'aurait-on donc inculqué un ou deux détails sur le respect de la hiérarchie pendant ton séjour en solo?

- J'ignore jusqu'à la signification de ce mot, lui rétorqua Exodus d'un voix joyeuse en commençant sans attendre son ascension. En revanche je sais que si jamais l'escalier venait à chuter avec moi encore dessus, mes chances seraient franchement très minces, aussi peut-on supposer que j'ai simplement retrouvé ce fameux instinct de survie dont tu parlais.

Les deux hommes montèrent les marches avec un rythme chronométré, prenant garde à éviter toute marche suspecte et à conserver leur équilibre dans les passages les plus étroits. La température quant à elle chutait de nouveau au fur et à mesure que les marches se succédaient.
Au bout de dix minutes ils n'avaient couvert que la moitié des marches.


- Au fait, je me posais une question, fit Exodus. Comment – attention à cette marche – est-ce qu'on s'y prendra pour le bannissement de l'entité? Les possessions n'ont jamais réellement été mon domaine de prédilection, tu t'en doutes.

- Le plan est on ne peut plus simple, répondit DeVaanne en soufflant légèrement. On applique la règle première du Fides concernant les possédés, page 59, verset 4: arrestation, enchainement, purification et extirpation du démon, suivit du bannissement, violent la plupart du temps. L'usage des armes lourdes et hautement mortelles est conseillé en bas de page, avec mention "morgenstern".

- Ah oui, la fameuse méthode "trois-quart", enchaina Exodus d'un ton scientifique.

- Comment ça trois-quart?

- La méthode "trois-quart", développa Exodus, car trois-quart des sujets possédés meurent lors du bannissement: un quart parce qu'il ne survivent pas à l'extraction, et les deux autres quarts parce qu'ils refusent de se faire emmener. A croire que la moitié des gens ne nous font pas confiance, affligeant non? Il tourna un visage amusé en direction de DeVaanne. Tu paris sur quel quart dans le cas présent?

- Je préfère parier avant tout sur notre propre capital "survie" si ça ne te gène pas. Vu l'entité et le corps-hôte, il va falloir une bonne dose de talent. Des conseils particuliers sur l'allanthrope en question? Tu l'as déjà rencontré?

- Jamais en personne, tout juste aperçu une ou deux fois, à l'occasion. Mais sa réputation dépeint un type redoutable, et plutôt doué avec la foudre. M'est d'avis que l'armure risque d'être un soucis.

- Bha, je peux faire avec, j'ai quelques tours dans mon sac. Du moment que tu tiens ton rôle, à savoir l'exaspérer autant que tu y arrives avec moi, ça devrait passer.

- Ah, je vois qu'on applique – gaffe, y'a un trou à la suivante – le schéma classique: duel honorable à deux contre un avec prise en tenaille? J'aime.

- Pas sûr, n'oublie pas qu'il y a une deuxième présence. Si elle se lance dans la mêlée, je compte sur toi pour t'en charger. Après tout, conclu-t-il en camouflant son sourire derrière son casque, tes qualités martiales devraient te permettre de défaire tout ce qui n'exhibe pas jambon, vrai?

Ils arrivèrent en haut de l'escalier au moment ou le répurgateur s'apprêtait à répondre. Il s'en abstint lorsqu'il se rendit compte de la majesté de l'endroit dans lequel ils pénétraient. La lumière fusait des multiples ouvertures murales, et les fresques et peintures colorées couraient aussi bien sur les murs blancs que sur les imposantes colonnes, lesquelles étaient gardés par quelques soldats de pierre inconnus mais tous ornés des même cristaux que dans le boyaux, cette fois taillé avec précision selon des motifs étranges. Une atmosphère pesante assaillit les intrus à l'instant même où ils franchirent la limite de l'entrée.

- C'est... commença Exodus.

- Grand, embraya DeVaanne sur un ton prévenant que tout qualificatif autre pour ce lieu païen serait châtié avec fermeté et justice.

- Entre autre, répondit l'instinct de survie d'Exodus.

Ils avancèrent de quelques pas en direction du centre du cercle, ou siégeaient un piédestal et accessoirement la cible de leur traque, le Gold et Gardien Aspharoth aux cheveux blanc, accompagné d'une femme de grande beauté aux long cheveux noirs.

Les  deux inquisiteurs s'arrêtèrent à quelques mètres seulement, au niveau des colonnades, les mains prêtes à s'armer dans l'instant.


- On ne dérange pas j'espère? Pas facile à trouver comme coin, vous savez?


De Vaanne

- Je t’avais dit qu’il fallait te planquer !

- Tu sais très bien que je ne recule jamais devant l’ennemi, et je te ferai remarquer que le seul endroit disponible pour se planquer dans cette grotte vide était derrière mon armure, espèce de faux jeton ! aboya le primat.  Si tu avais été un peu moins enclin à préférer ton instinct de survie à la réussite de la mission, je ne serais pas en train de boiter depuis qu’on a rebroussé chemin.

Et de montrer sa jambe gauche, dont les pièces d’armure avaient manifestement subi un choc extrêmement violent.

- Tu t’en es bien sorti quand même, ce n’est que de la ferraille cabossée. Quoiqu’un centimètre plus haut, et c’était ton genou qui finissait broyé… quoi ? s’interrompit Exodus après jeté un coup d’œil au visage du primat.

- Je rêve ou tu viens de traiter mon armure de ferraille cabossée ? Venant de quelqu’un dont les fourrures sont déchirées, tachées d’un sang dont la moitié ne lui appartient même pas, couvert de coupures avec son armure en cuir déchiré, et qu’on dirait tout droit sorti d’une partie fine de Galvorn, c’est quand même assez cocasse.

Exodus s’arrêta et s’inspecta du regard. Quoique fortement fielleuse et caustique par endroits, la description faite par De Vaanne n’en recelait pas moins une forte part de vérité. Ses habits étaient tout simplement en loques, et du sang frais coulait par endroit sur la neige à l’entrée de la grotte. Les déchirures laissaient apparaître le doublage en fourrure de l’intérieur, donnant l’impression d’un animal tavelé.
Il aurait été difficile lequel des deux était le plus mal en point : si le primat ne semblait avoir aucune blessure ouverte grâce à l’armure, celle-ci était enfoncée en plusieurs endroits, une spalière manquait à l’appel et l’état de sa jambière gauche semblait lui causer une douleur manifeste à chaque pas. Le répurgateur, lui, semblait plus concerné par une vilaine coupure au bras et pour laquelle il compressait un linge avec son autre mains.

- Nous n’avons pas l’air particulièrement brillants en tout cas, donc arrête de te montrer pénible pour une fois. Tu ne veux pas me refaire le pansement ?

De Vaanne s’arrêta en soupirant et prit sans ménagement le linge de la main d’Exodus. Sans considération particulière, il l’appliqua sur la blessure et fit un nœud bien serré qui arracha une grimace à son subordonné.

- Maintenant que tu es réparé et que tu n’as plus de raison de geindre, on va peut-être pouvoir rentrer, comme ça tu rempliras le rapport tant que c’est encore frais.

- Pourquoi moi ? Pourquoi ce jeu de mot pourri avec la température ambiante et polaire ?

- C’est toi qui a porté le coup de grâce à ce satané Gold ! Ah, la voilà, c’est terrible ce qu’il a neigé depuis qu’on est rentrés dans la grotte, cette pauvre luge disparaissait complètement dans la congère.


Exodus verdit en voyant De Vaanne sortir l’engin du diable en ahanant, sa jambe gauche toujours tendue et dans l’impossibilité de se plier.

- Euh… On ne pourrait pas descendre à pied vers le village le plus proche plutôt ?

- Non. Il est à environ trois jours de marche. Moins bien sûr si tu te mets en boule et que tu roule, ce que ta corpulence et tes fourrures te permettraient de faire, par contre tu risquerais de heurter ta tête sur un arbre, ce qui pourrait s’avérer dangereux, même pour toi. Bref, la quantité de nourriture disponible étant inférieure au mètre cube, nous ne tiendrons pas trois jours, même si tu te rationnes. Allez, grimpe et allons-y.

- Bon, d’accord, d’accord, mais tu fais quoi là ? dit-il en voyant le primat sortir une flasque d’une poche de son armure et d’en avaler une gorgée.

- Je me réchauffe, ça m’aidera à passer les arbres.

- Je vais le regretter. Je sens que je vais le regretter…


Exodus

Nos deux compères avait fini par rejoindre le village de Jülbach peut après la tombée de la nuit. Situé dans une vallée sinueuse, juste en dessous de la forteresse d’Alkhazzar, le village était un endroit difficilement accessible et peu attirant, mais sa position de dernière étape avant le fort montagneux lui avait permis de grandir assez pour proposer aux voyageurs tavernes, commerces, et même un apothicaire (étrangement spécialisé dans les engelures et les comas éthyliques).

Problème : l’apothicaire en question était partit tôt dans la journée pour sa tournée mensuel dans les communautés isolées des alentours et ne reviendrait que le lendemain, ce qui laissait les deux Inquisiteurs contraints de soigner du mieux possible leurs plaies dans la coquette chambre qu’ils venaient de prendre pour la nuit, repas chaud compris.

Exodus, assis torse nu devant le foyer rougeoyant de la cheminée, était occupé à soigner son nez, lequel avait fait une rencontre un peu trop rapide avec l’armure de DeVaanne, à l’occasion d’un virage périlleux. La mi-nuit était presque dépassée, car il avait auparavant aidé son compagnon à retirer les nombreuses pièces d'armure qui lui restaient. La jambe avait posé problème, le métal enfoncé ayant fini par pénétrer la chair, et l'une des plaies présentait un début d'engelure. L'opération de retrait ainsi que le premier nettoyage avait causé au l'Inquisiteur des douleurs plus qu'intenses, et ce dernier avait trouvé un soutient dans le manche de son épée qu'il avait serré jusqu'à ce que ses phalanges soient aussi blanche que neige.

Une fois les soins d'urgences appliqué, DeVaanne avait chassé le Répurgateur d'un geste agacé, prenant le relais pour, officiellement, "s'assurer de ne pas retrouver de mie de pain dans ses blessures". Exodus avait accepté sans relever la pique, car il savait que son compagnon souhaitait surtout qu'il se soigne à son tour. Il connaissait DeVaanne depuis maintenant assez longtemps pour savoir quand il feignait l'indifférence.

Exodus avait donc soupiré et s'était redressé avec difficulté. L'adrénaline et le froid avaient pour un temps endormie ses sensations mais les nombreuses coupures qui lui couvraient le corps s'étaient enfin rappelées à lui. D'autant plus que les vertiges réguliers dont il était sujet depuis leur retour n'étaient pas dus au retour express en luge, comme il essayait de s'en convaincre. Il avait bu a grande rasade le contenue d'une cruche d'eau fraîche, avait passé le reste a DeVaanne et s'était chargé de nettoyer consciencieusement ses nombreuses plaies.

- L'apothicaire va avoir pas mal de travaux d'aiguilles demain, maugréa-t-il alors qu'il finissait d'installer un pansement rudimentaire sur son nez. Regarde mes bras! On dirait plus un canevas rouge et blanc qu'autre chose.

- Arrêtes de te plaindre, ou bien c'est la plaie qui se trouve entre ton nez et ton menton que je lui demanderai de recoudre en premier! répliqua DeVaanne en serrant les dents.

- Pas la peine d'être désagréable non plus. J'ai assez mal comme ça sans avoir en plus à endurer tes piques aiguisées...

- Ça t'apprendra à te jeter sur l'ennemi sans réfléchir. Et à emmener plus de vivre que de matériel de premier secours dans tes bagages!

- Oui bon d'accord, j'ai peut être inversé les proportions mais l'un dans l'autre nous nous en sommes plutôt bien sorti non? Dit Exodus en levant les bras de manière détendue.  Je veux dire on a paré efficacement au plus urgent!

- Dit celui qui a manqué de me faire un cataplasme à la terrine de chèvre aux herbes? répondit DeVaanne avec un regard fatigué mais encore capable de lancer des éclairs.

- Le romarin n'est pas une herbe médicinale? Tenta Exodus dans un trait d'humour censé détendre l'atmosphère.

- Pour le rhume, sans doute, répliqua l'Inquisiteur en y mettant tout le mépris possible. Pour les plaies ouvertes, j'ai comme un doute.

Le Répurgateur préféra se retourner plutôt que d'entretenir un débat qu'il savait à l’avance aussi stérile que blessant. Son collègue n'était pas de base connu pour son sens de l'humour et ses blessures n’amélioraient pas son caractère. Exodus se fit donc un devoir de silence et présenta son dos couturé, s’enferment dans une moue boudeuse.

Il entendit encore quelques instants DeVaanne ronchonner et jurer dans sa barbe alors qu'il finissait de nettoyer ses blessures. Puis le silence se fit, remplacé par une respiration plus posée. Exodus se mit a la recherche de parchemin et d'encre qui n'avait pas gelé, économisant ses mouvements et limitant le bruit. Il finit par les trouver, ainsi qu'une plume n'ayant pas trop souffert du voyage, et s'installa sur la petite table qui faisait face au foyer brûlant.

- Est ce que tu as un message particulier pour le rapport?

Pas de réponse.

- DeVaanne?

Exodus tourna la tête pour voir l'Inquisiteur immobile, assis sur le lit le dos collé au mur et la jambe grièvement blessée reposant sur un tabouret. Ses vêtements de même que les linges qui l'entouraient étaient rouges de sang frais et son teint était d'une pâleur inquiétante. Sa poitrine se levait a peine sur un souffle imperceptible.

Il n'était tout de même en train de mourir, cet idiot? se dit Exodus dans un bref moment de panique.

Le froncement de sourcils de DeVaanne, caractéristique de ses moments de réflexion, trahi sa vie encore présente. Exodus, contrarié d'avoir eu à se faire du soucis,  se leva et appuya sur la jambe de l'Inquisiteur, ses doigts enserrant fermement la chair autour de l'engelure tout juste traitée.

Un cri de douleur perça et DeVaanne ouvrit grand les yeux.

- AAAAAAH! ESPÈCE DE... Mais qu'est ce qui te prend, sombre idiot?!

- Je vérifiais si tu étais encore des nôtres ou bien si l'Unique t'avais enfin rappelé à Lui. Répondit Exodus en se dirigeant vers une carafe encore pleine et une petite assiette en terre. Tu devrais être flatté que je fasse si grand cas de ton état.

- Attends un peu... fit DeVaanne en essayant de tendre la main vers son arme. On va voir si tu ne te sens pas flatté par l'attention toute particulière qu’Antienne va t'accorder...

- On verra ça quand tu tiendras début, rétorqua Exodus en passant entre DeVaanne et le manche de son arme. En attendant, mange ça et surtout bois. Tu as perdu suffisamment de sang comme ça, et tu n'as pas le profil pour mourir dans ton lit.

Il laissa a porté de main du blessé le pichet d'eau clair et l'assiette, laquelle était remplie d'une saucisse, de légumes froids et d'un gros morceau de pain à peine rassit. Exodus récolta une méchante frappe sur la cuisse au passage, mais elle fit sans doute plus mal au lanceur qu'au destinataire.

- Et donc pour le rapport? Dit-il en se réinstallant à sa table, avec une assiette jumelle de la première.

- Les faits, de manière claire et concise. Précise bien la nature allanthrope du nettoyage, mais garde l'information de l'enfant de la Dame Turquoise, on en sait pas encore assez pour le moment...

- Bien noté.

- Et... et dis au Synode que sa décision est pleine de sagesse, vu l'état de ce... pays si on peut appeler ça comme ça. Des allanthropes, des descendants de races mortes et des dragons... Ce lieux mérite bien toute notre attention, finit-il en mordant dans la saucisse.

- Euh... quelle décision?

- Je ne te l'ai pas dit? Demanda DeVaanne en retour. Le Saint Synode a jugé bon d'implanter une commanderie des Enfants en Ter Aelis. Tu as devant toi l'avant-garde, et surtout le Primat en charge de ladite commanderie. Et donc ton supérieur direct sur ces terres.

Exodus prit quelques secondes pour apprécier toutes les conséquences de cette nouvelles à plus ou moins long terme et surtout la nécessité de mesurer ses actes et paroles a partir de maintenant...

- Et alors... mon Primat, à quels effectifs faut-il s'attendre?

- Un peu plus de deux cents personnes, Frères Jurés et personnel compris. Nous prenons officiellement quartier a Saint Vauss de Belthil, où ma première tache sera d'y juger le tas de paresse et d'hérésie qui s'y prétend Prélat. Et que tu aurais d'ailleurs dû démettre dès ton arrivé! Ajouta-t-il en pointant un bout de pain accusateur.

- Je ne suis pas vraiment passé par Saint Vauss à mon arrivé, pour tout dire...

- Et en plus d'un an il ne t'est sans doute pas venu à l'esprit d'y faire étape une fois... Enfin, ce n'est plus comme si ça m'étonnait.

- Et qui seront les Enfants en question, a pars toi? Demanda rapidement Exodus en essayant de changer de sujet.

- A part nous, tu veux dire : tu es officiellement rattaché à ma commanderie, comme "expert local", autant que comme main d'œuvre. Je pense que tu aimeras le manteau, le rouge aminci. Des Terres Saintes, nous retrouverons Tear. Je pense que tu te souviens de lui?

- Ton protégé? Oui, il te suivait comme une ombre quand il n'était pas a ses études. Il a dû bien grandir?

- Assez pour prétendre à sa robe d'Enfant, avec sans doute plus de mérite que toi. Et également nous retrouverons le Maitre Archiviste Teclis. Il a été rattaché aux Enfants et envoyé le plus loin possible du Saint Etat depuis sa dernière... disons expérience.

- Ah. Teclis. Exodus soupira : la réputation de l'archiviste était d'un niveau aujourd'hui encore inégalé, mais malheureusement pas pour les meilleurs raisons. Je suppose qu'il est trop tard pour demander une mutation sur un lieu moins dangereux? De préférence un autre continent?

- Bien trop tard. Et pourtant j'ai essayé, mais quelqu'un de plus influent que moi a dû juger que Ter Aelis correspondait à la distance minimum requise entre Teclis et notre Saint Siège. Ce qui n'est peut-être pas si faux.

- Bon, je suppose qu'on fera avec, râla Exodus qui de toute manière prévoyait de rester le moins possible dans la Cathédrale, afin d'éviter à la fois un supérieur irascible et un inventeur au caractère littéralement explosif. Il nous suffira de porter des tenues renforcées en permanence et de négocier un forfait avec les maçons locaux. Qui d'autre?

- C'est tout, du moins en provenance de chez nous. J'ai toute liberté pour recruter les éléments locaux que je juge dignes et utiles. Des noms te viendraient-ils en tête? Et si possible qui n'ont pas ton légendaire régime alimentaire, je vais devoir jongler avec un budget plus serré qu'un cul de Ministre.

- Un ou deux, concéda Exodus après une courte réflexion. Les allanthropes ont beau pouvoir se pavaner comme ils le souhaitent dans le pays, ils ont néanmoins réussi à se faire des ennemis. De puissants ennemis. Ils devraient être réceptifs à Sa parole, s'ils ne l'entendent pas déjà.

- Parfait. On devrait assez vite être capable de centrer cette colère sur quelque chose de pieux et d'utile. Le Primat de Ter Aelis étouffa un bâillement et repoussa son assiette vide sur la table. Je crois que je vais essayer de dormir un peu... je te laisse me réveiller lorsque l'apothicaire sera là. Ah, et une chose...

- Oui mon Primat?

- Avise-toi de me serrer encore une seule fois la jambe comme tu l’as fait et je te promets que je te refile comme cobaye à Teclis.

- Comme il vous plaira, mon Primat. Dormez bien, mon Primat.

L'intéressé grogna, trop fatigué pour s'indigner de l'insolence - qui fût toutefois clairement inscrite dans sa mémoire - et balança doucement ses jambes sur le lit avant de ramener une chaude pelisse dessus.

Exodus resta une dizaine de secondes à le regarder s'endormir. Après tout, il aurait pu tomber bien plus mal que sur un ami dans le rôle de responsable local. Et puis, il lui devait sans aucun doute la vie après les événements survenus plus tôt. Encore une fois.
Satisfait, un morceau de saucisse dans le bec et une plume dans la main, il se pencha enfin sur son rapport.


A l’attention toute particulière du Saint Synode, de son secrétaire général le Primat Von Salza ;

A l’attention du Conseil des Répurgateurs, de son doyen l’honorable Emeriss Huilost ;


Amené à leur connaissance par le Répurgateur Exodus, en son nom et celui du Primat-Inquisiteur DeVaanne, responsable de la nouvelle commanderie de Ter Aelis.


Le 29ème jour du mois d’hivernage de la 176ème année de la Reconquête



Vos Seigneuries,

    C’est avec la joie d’avoir apporté une fois de plus juste contribution aux divins dessins du glorieux Unique que je vous fait parvenir ce rapport. J’espère qu’il vous trouvera tous en bonne forme, gardé par l’Unique qui veille sur le Saint Etat et Ses fidèles.

    En effet il convient de signaler qu’aujourd’hui même, une expédition menée par le Primat DeVaanne, récemment arrivé en ces terres, et moi-même a réussi à purifier de notre monde le dernier membre connu d’une race allanthrope mystique et potentiellement lié aux anciens Princes Esclave, à savoir les Elfes Gold (ou Geöld selon les versions). Le dit Gold a péris de nos mains suite à une bataille dantesque, accompagné dans sa chute par un elfe féminin semblant de sang pur, et potentiellement lié à lui de manière charnelle. Remercions l’Unique que cette race dégénérée connaisse un rythme de reproduction si aléatoire, nous facilitant ainsi le travail.

    Cette élimination n’a pu être effective que grâce à de minutieux travaux d’enquête et des démonstrations de bravoures comme seuls Ses serviteurs peuvent en accomplir. Preuve en est que nos ordres aux méthodes parfois si différentes sont évidemment complémentaires, et que la soi-disant rivalité qui les oppose n’est que pure invention.

    Notre enquête nous amena des déserts du pays aux plus hautes montagnes du Nord. Sur une information fortuite relative à la possession du sujet cible et suites aux sages recommandations du Primat DeVaanne, nous partîmes à la recherche d’un lieu de magie ancien et sans aucun doute corrompue, perdue dans les plus hautes cimes. Usant de la foi immortelle de nos prédécesseurs et des mots infaillibles du Fides, nous parvînmes à trouver le dit-lieu et les allanthropes cités plus haut.

    Le lieu, semblable à un temple païen, semblait reposer sur une forte résonnance magique et renfermait une sorte de relique après laquelle notre cible courrait. Là c’est révélé ce que notre enquête nous avait permis de soupçonner, à savoir la possession de nature impie de l’allanthrope. Je ne prendrais pas sur votre précieux temps en vous décrivant les affres du combat qui suivit : sachez juste que la compagne du Gold tomba la première, déchainant une fureur sans borne et fort douloureuse du sujet. Le coup fatal porté, ce que j’oserais qualifier de débordement arcanique survint dans le temple, nous laissant tout juste le temps de quitter les lieux et soufflant sans aucun doute les dernières trace de notre cible et des reliques qui lui était lié.

    Toutefois, compte tenue de la nature de la possession identifié et du manque de connaissance relatif aux elfes de la race Gold, je préconiserais à mes illustres pairs de surveiller dans les mois, voir les années à venir la résurgence d’esprits ou de lieux magiques isolés, échos potentielles de la trace psychique que nous avons éliminé. Nul ne souhaite voir l’incident de Del-Morin se répéter.

    J’arrive à la conclusion de ce rapport et en profite pour remercier Vos Seigneuries de l’attention toute particulière qu’elles ont adressée à ce pays au fort potentiel. Il regorge en effet d’une population ne demandant qu’à retrouver Sa foi mais est également le foyer de nombreuses races allanthropes, sans parler des innombrables ruines pré-humaines qui la couvre, ou de l’usage tout disproportionné de la magie qui y est pratiqué. Je suis persuadé que la nomination du Primat DeVaanne à ce poste est le garant de la réussite de nos projets futurs en ces terres, sans compter le respect qui lui est dû pour ses capacités aux combats, lesquelles sont indéniable. Eu-t-il été absent ce jour que votre serviteur ne serait sans doute plus à même de remplir le présent rapport.

    C’est donc avec fierté et piété que je rejoints sa commanderie et le rang des Enfants de l’Unique en Ter Aelis, comme le demandent vos sages ordres.

    Au très justes membre du Saint Synode, je présente mes respect, l’assurance de ma dévotion à Son œuvre et encore une fois mes remerciements.

    A mes pairs et notre estimé doyen, je présente le renouvellement de mes engagements et de mes vœux, lesquels me rappellent l’honneur de mon nom, mon devoir et ses conséquences.

Dans l’espoir que cette missive vous parvienne le plus rapidement, je reste, sous Son regard et nul autre,
Exodus,
Répurgateur, Enfant de l’Unique et votre très fidèle serviteur.


Compte utilisé par l'équipe rôliste.
Verrouillé
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