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Pluie de jais [terminé]

Par Cho, Cassiopée - Le chapitre 2 se poursuit dans le sel de la connaissance

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8 nov. 2015 - 13:51

PLUIE DE JAIS
_____________


Cassiopée

Les arbres étaient si grands ! La canopée couvrait le ciel et Cassiopée avait beau lever les yeux vers les étoiles, elles ne perçaient pas l'ombre des feuillages.
Les fûts droits et majestueux se dressaient tels des seigneurs de miséricorde pour la Dame du Sang. Elle marchait depuis des jours sans savoir où ses pas la menait et les hauts conifères semblaient s'évertuer à la protéger de l'extérieur.
Cassiopée usait son énergie vitale à avancer sans but dans l'espoir d'oublier.
La nuit sombre ne lui était pourtant d'aucun salut.
La solitude mentale lui était si inconnue qu'elle se savait plus que faire. Alors, elle s'était perdue parmi les arbres. Sentir leur présence était un baume léger pour son âme blessée car la force de la végétation avait bravé le temps et toutes les guerres.
Quand elle avait senti Issac se perdre en elle jusqu'à disparaître de sa conscience, le vide s'était installé. Un vide qui lui mordait le ventre à longueur de temps. Elle n'était plus qu'une ombre fantomatique dans la nuit. Dame blanche errante.


Cho

Zalyna était une jeune fille à la peau claire, si claire que d'ordinaire, même lorsqu'il faisait nuit, la couleur brune de sa longue chevelure tranchait sur sa peau.
Mais cette nuit était particulièrement sombre... Tellement sombre qu'elle avait plus de mal qu'à l'accoutumée pour se déplacer. En effet, elle avait beau connaitre ces chemins par coeur, elle n'était pas à l'abri de l'une ou l'autre racine susceptible de la faire trébucher...

Il fallait qu'elle se dépêche néanmoins, car elle avait beau adorer Gareth, il n'était guère patient. Et puis le fait qu'elle aime autant flâner dans la forêt à toute heure du jour et de la nuit n'était pas pour le rassurer, elle le savait très bien.

Elle se hâta de ramasser les plantes qu'elle était venue chercher, et fit demi-tour lorsqu'elle entendit le craquement d'une brindille ayant cédé sous le pied.
Elle se retourna et aperçut une silhouette à une vingtaine de mètres d'elle... Elle se demanda ce que faisait cette femme dans une forêt aussi reculée ? Cette dernière semblait perdue... Zalyna s'approcha doucement dans sa direction ...

"Bonsoir, je m'appelle Zalyna... Etes-vous perdue ?"


Cassiopée

La voix était claire. Elle s'insinua dans les pensées de la Dame comme une flèche tirée. Cassiopée n'avait pas vu la jeune fille approcher. Secouée par le choc, elle se retourna et se retrouva face à Zalyna. Elle tenta de répondre, mais la phrase prononcée ne faisait pas vraiment sens dans son cerveau maltraité. Elle ne put que répondre :

-Vous êtes Zalyna... Zalyna... Je ne sais pas.

Les yeux perdus de la Dame exprimaient un insondable chagrin. Son corps, voilé de brume semblait se mêler au vent. Cependant, la noblesse restait l'armature de la longue et haute femme. Ses longs cheveux blancs paraient ses épaules comme le voile d'une mariée abandonnée.

-J'ai froid.

Elle parut soudain voir la femme qui la regardait. Comme son regard semblait s'inquiéter pour elle, elle ajouta :

-Je suis un peu perdue. Mais... je vais trouver.

Ces derniers mots eurent raison de sa conscience et ses yeux partirent à nouveau se perdre dans les étoiles.


Cho

Zalyna avait eu à peine le temps d'entendre les paroles de la Dame qu'elle vit cette dernière tituber, menaçant de s'écrouler sur le sol.
Elle se précipita vers elle et la soutint jusqu'à ce qu'elle touche le sol en toute sécurité. Elle l'allongea et l'examina : elle ne présentait aucune blessure et sa respiration était régulière, bien que lente. En revanche sa peau était glacée, elle se hâta donc d'enlever son châle pour lui mettre sur les épaules.

Que faisait cette Dame dans ces bois, seule en pleine nuit ? Elle semblait perdue, elle l'avait même formulé... Pourquoi sa peau était-elle aussi froide, alors que la nuit était aussi douce ? S'était-il passé quelque chose avant qu'elle ne tombe sur elle ?

En tout cas, une chose était certaine, elle ne pouvait laisser cette femme ici.
Zalyna décida donc de la ramener chez elle... Elle sortit un sifflet de la poche arrière de sa sacoche et souffla dedans... Aucun son n'en sortit, du moins audible pour un être humain ordinaire... Il s'écoula quelques minutes lorsqu'un cheval d'un noir de jais arriva à hauteur de Zalyna.

- Salut mon grand, dit-elle en caressant le flan de l'animal, je vais avoir besoin de ton aide.

Onyx était le cheval de Zalyna. Il vivait dans la forêt, libre, et pouvait aller et venir comme bon lui semblait. Ils avaient l'habitude de se retrouver grâce à ce sifflet que venait d'utiliser Zalyna. C'était un cheval sauvage, pourtant infiniment proche d'elle...

Elle installa la Dame sur Onyx et entama la route jusqu'à chez elle.

- Veuillez m'excusez, ma Dame, ce doit être peu confortable ...

Après une demi-heure de marche, elle arriva chez elle. Elle se hâta d'ouvrir la porte et appela Gareth.

- Gareth ! J'ai besoin d'aide ! En allant chercher des plantes dans la forêt, j'ai trouvé cette Dame. Elle est inconsciente et complètement frigorifiée, peux-tu m'aider à l'installer près de la cheminée ?

Son bienfaiteur l'aida dans sa tâche et une fois installée, Zalyna se chargea de bien la couvrir...


Cassiopée

Les lourdes peaux pesaient sur les épaules de Cassiopée, mais elles lui apportaient le poids de la réalité. Elle regardait le feu sans ciller, sans le quitter des yeux. Il la réconfortait.
Zalyna lui avait offert un bol de soupe bien chaude qu'elle tenait encore entre ses mains, oubliant de la manger. Les parois réchauffaient ses doigts glacés et le fumet venait doucement lui chatouiller les narines.
La maison dégageait une odeur de vie et de chair.

Zalyna s'était assise à ses côtés, tirant un tabouret près de la lourde chaise devant la flambée. Elle ne parlait pas. Elle surveillait. Pendant ce temps, un lourd bol coincé entre les cuisses, Gareth pilait des herbes d'un rythme régulier qui battait le silence comme le cœur d'un être.
Cassiopée sentit peu à peu la chaleur du foyer pénétrer son sang. Ses doigts toujours froids furent les premiers à devenir mobiles. Puis, elle ferma un instant les yeux avant de se tourner vers sa voisine qui la regardait.

- Merci.

Son sourire était bien mince et la peine bridait son regard. Pourtant, les flammes avait rallumé un feu dans le fond des yeux de Cassiopée.

- Pardon d'être ainsi.


Un long silence suivit la remarque, puis elle ajouta, faiblement : Mais je n'y arrive plus...

Les larmes coulaient le long de ses joues sans qu'elle puisse les retenir.


Cho

- Merci.

Zalyna ne sut que dire, que faire, or elle désirait plus que tout venir en aide à cette femme qui lui semblait si perdue.
Le feu semblait lui avoir redonné quelques couleurs, son sourire était pourtant mince et son regarde d'une tristesse sans égal.

- Pardon d'être ainsi... Mais je n'y arrive plus.

Zalyna aperçut des larmes couler le long de sa joue. Elle se leva de son tabouret et s'agenouilla près de la Dame. Elle prit ses mains entre les siennes et fut parcourue d'un frisson tant elle fut étonnée de la froideur de ses doigts après tout ce temps passé devant le feu... Elle serra ses mains d'autant plus fort, espérant lui apporter encore plus de chaleur, et lui demanda :

- Comment vous appelez-vous ? D'où venez-vous ? Je croise rarement d'autres humains dans ces contrées reculées d'Echoriath, vous m'avez pas mal surprise...

La Dame regarda Zalyna droit dans les yeux, et la sonda du regard. Elle semblait chercher quelque chose, mais quoi ? Ses traits n'étaient pas hostiles, mais plutôt remplis d'un mystère qui, elle en était certaine, dépassait tout ce que Zalyna pouvait connaitre. Après quelques secondes, la Dame reporta son attention sur son bol.
Elle aussi avait un secret, cette Dame était peut-être comme elle ?
Devant le mutisme de son hôte, elle repris la parole :

- Je ne voulais pas vous paraître impolie... Vous m'intriguez... Vous semblez perdue, désemparée et je ne sais pour quelle raison, j'ai cette envie incommensurable de vous venir en aide d'une manière ou d'une autre... Pour cela j'ai besoin que vous me parliez.

Zalyna, qui avait toujours les mains de la jeune Dame entre les siennes, plongea à son tour son regard dans le sien et ajouta :

- Vous pouvez me faire confiance, et si vous désirez me parler plus en longueur, je reste à votre entière disposition. En attendant, buvez cette soupe, c'est une préparation personnelle. Vous verrez, elle vous fera énormément de bien.

Sur ces paroles, Zalyna se releva et alla à la cuisine préparer un second bol de soupe.
Elle revint quelques minutes plus tard avec un plateau sur lequel elle avait disposé 3 bols. Elle en tendit un à Gareth, et entama le sien, posant le troisième près de la Dame qui finissait sa première soupe.

- Vous aviez raison, ce breuvage est formidable.

Et la Dame attrapa le nouveau bol que Zalyna venait de lui apporter.


Cassiopée

Cassiopée se sentait apaisée. La boisson l'avait revigorée plus qu'elle n'aurait pu l'escompter. Elle n'avait pas pris conscience avant ce moment qu'elle n'avait pas mangé, ni bu depuis bien longtemps.
A présent, son esprit reprenait son équilibre. Ses idées arrivaient à former une pensée cohérente.
Elle posa son bol d'un geste lent. Puis, elle se tourna vers la jeune fille qui avait repris place près d'elle.

-Vous êtes bien bonne mademoiselle. Et votre père, bienfaiteur. Je vous remercie. Je me sens bien mieux.

En formulant ses remerciements, Cassiopée savait qu'elle aurait du se lever et partir, pourtant elle n'en avait pas envie. La chaleur dégagée par le feu plus la gentillesse de l'accueil la retenaient mieux qu'un véritable piège.

Elle esquissa un mouvement pour quitter sa place. Mais Zalyna se précipita sur elle.

-Non,non ! Restez assise. Vous ne devriez pas vous lever. Vous êtes encore bien trop faible.

Se tournant vers le vieil homme elle dit :

-N'est-ce pas que la dame peut coucher ici ? Je lui prêterai mon lit pour cette nuit. Moi je prendrai la paillasse qu'on a mise de côté pour la rénover. Ça ira très bien.

Gareth grogna un acquiescement sans quitter sa tâche.
-Fais comme tu veux.

Cassiopée percevait l'immense bonne volonté de la jeune fille et savait qu'elle la blesserait en partant maintenant. Mais elle ne captait aucun signe palpable dans l'esprit du vieil homme.
Se sachant faible, elle donna son consentement :

-Merci Zalyna. Vous êtes très bonne. Mais je vous laisserai votre lit. Je prendrai la paillasse. J'ai l'habitude de coucher dehors, ne vous en faites pas. Cependant j'accepte votre hospitalité.

Elle sourit.

-Je crois que j'ai besoin de votre chaleur.

Puis elle ajouta :

-Mon nom est Cassiopée.


Cho

Zalyna fut contente de voir que Cassiopée avait accepté de rester pour la nuit.

Elle se hâta de lui préparer un coin pour dormir, qu'elle voulut le plus douillet possible. Elle espérait ainsi que la Dame récupère au maximum.

Lorsque Cassiopée s'installa, Zalyna l'observa tout en étant pensive... Elle était toujours autant intriguée par cette femme et avait un désir fulgurant d'en apprendre plus sur elle. Elle ne voulait pas déjà la quitter si tôt le lendemain.

- Je vous souhaite de passer une bonne nuit, si vous avez besoin de quoi que ce soit je ne suis pas loin, n'hésitez pas à venir me réveiller.

Elle s'apprêta à quitter la pièce lorsqu'elle se retourna vers Cassiopée et dit :

- Demain, j'aimerais vous accompagner... ou du moins, jusqu'à la sortie de ces bois, histoire de me rassurer, en majeure partie.

Sur ces paroles, Zalyna tourna les talons et sortit de la pièce.

Elle entra dans sa chambre, s'étala de tout son long sur son lit et fixa le plafond... Elle trouvait cette Dame si belle, mais était-elle réellement humaine ? Elle se sentait à la fois proche et étrangère à Cassiopée...
Le lendemain, elle essayerait de discuter avec la Dame, d'en apprendre plus sur elle... Peut être que cette personne pouvait l'aider, elle, qui ne savait ni d'ou elle venait, ni pourquoi elle avait ces pouvoirs...

Elle se tourna sur le flanc et ferma les yeux... et s'endormit.


Cassiopée

Était-il temps de dormir ? Était-il l'heure de sombrer dans les replis de son âme ?
Cassiopée rechignait à quitter le semblant de paix qui l'habitait ce soir là. Depuis la Chute des dragons, elle n'avait pas été si calme. Installée au chaud sur la paillasse de la chaumière, elle goûtait le répit.
La jeune fille avait su lui apporter un moment de repos par sa gentillesse, par son attention, ses soins empressés. Mais surtout, cette jeune personne possédait un talent indéniable qui courrait bien au delà d'une simple tisane.

Cassiopée sentait le Sang battre en son sein. C'était un battement lointain et sourd, à peine perceptible, mais il était rassurant de l'entendre à nouveau, de constater qu'il n'était pas totalement mort.

Elle laissa son corps se détendre et récupérer. L'aube vint et la trouva les yeux ouverts.
Cassiopée se leva et fit le moins de bruit possible pour ne pas réveiller ses hôtes. Elle regretterai la compagnie rassurante de la jeune Zalyna. Ne voulant pas fuir comme une voleuse, elle plongea sa main dans son manteau de brume pour en ressortir une larme d'eau qu'elle déposa dans un petit récipient de terre qui traînait, vide, sur la table. La goutte prit aussitôt la forme de la coupe et la remplit à ras bord. La famille ne manquerait pas d'eau. Elle venait d'installer une source à domicile.


Silencieuse, elle quitta la maison en prenant soin de fermer doucement la porte derrière elle.


Cho

Zalyna était en train de boire, les yeux fixés sur sa soucoupe en terre cuite... Elle la fixait depuis son réveil, perdue dans ses pensées.

A son réveil, elle avait trouvé la pièce vide, mais c'est en rangeant qu'elle avait aperçu sa soucoupe remplie d'une eau cristalline. Elle n'avait pu résister à cette envie de la goûter.
Mais lorsqu'elle remplit sa tasse, elle pu voir, interloquée, que l'eau de la soucoupe revenait à son niveau initial, presque à ras bord. Leur hôte leur avait certainement fait ce cadeau... Une source magique, rien que ça !

De plus en plus de questions se bousculaient dans la tête de Zalyna. Elle avait senti que cette femme n'était pas une humaine ordinaire, et elle avait eu raison. Elle aussi avait des pouvoirs visiblement, des pouvoirs inconnus pour elle, certes, mais des pouvoirs quand même.

Zalyna était intriguée... Elle ne pouvait reprendre le cours normal de sa vie, comme si elle n'avait jamais rencontré Cassiopée, c'était tout bonnement impossible... Il fallait qu'elle trouve des réponses à ses questions, ça la hantait depuis bien trop longtemps...

Gareth l'avait recueilli lorsqu'elle était toute petite, elle ne se souvenait de rien avant cette période de sa vie. Les autres habitants des environs avaient été effrayés par Zalyna, il la trouvait étrange ... Seul Gareth n'avait pu se résoudre à laisser une jeune enfant dehors, seule, et l'avait ainsi adoptée. S'il était au courant pour ses phénomènes étranges qu'elle produisait, il n'était pas friand de les voir à tout bout de champ. Elle avait donc appris à appréhender ses pouvoirs seule, dehors.
Elle venait d'avoir la preuve qu'elle n'était pas seule... Mais qui était-elle ? Elle savait qu'un jour elle devrait quitter ces contrées pour trouver des réponses à ses questions. Ce moment était venu, elle en était persuadée.

Elle se leva d'un bond, alla chercher un support et écrit un message à l'intention de son bienfaiteur. Elle devait partir avant qu'il ne se réveille, sinon il tenterait de l'en empêcher... Il aurait peur pour elle...

Elle attrapa sa besace, y fourra quelques herbes, des mélanges de sa conception ainsi que quelques effets personnels. Elle sortit et pris le chemin qui s'enfonçait dans la forêt... Elle s'arrêta et sortit une gourde contenant l'eau de la source cristalline. Elle ouvrit, versa de l'eau au creux de sa paume et murmura des paroles incompréhensibles. La goutte d'eau se déplaça doucement en direction de son majeur.

- Droit devant... Faites que ça marche.

Elle avait souvent pratiqué ce sort de localisation avec des effets personnels directs, elle espérait que ça fonctionnerait avec cette eau. De toute façon, c'était sa seule piste...

Elle sortit ensuite son sifflet et appela Onyx.

- Bonjour mon grand, tu m'as manqué, dit-elle en pressant sa joue dans l'encolure de l'animal, il est temps pour nous de partir...
Nous allons enfin essayer de découvrir d'où nous venons, murmura-t-elle à son oreille.

A ces mots, l'animal parut plus excité, pressé, comme s'il l'avait comprise.

Elle monta Onyx, et ils partirent au galot dans la direction indiquée...


Cassiopée

La route empruntée par Cassiopée s'était peu à peu transformée en chemin de terre aux flaques fréquentes, puis en sentier étroit qui remontait vers le col à passer. Son bref séjour chez Gareth l'avait remise dans le droit chemin.
Elle ne marchait plus au hasard. Elle suivait la route que lui indiquait la voix si présente dans sa tête. C'était une parole maîtresse, un désir compulsif. Son seul souhait actuel.

Alors qu'elle atteignait le large val qui faisait la jonction entre les monts d'Ishpad et de Rose Imbu, elle entendit le bruit lointain et régulier des sabots d'un cheval. Sans presser son pas, elle gravit les derniers mètres et se plaça à l'écart du chemin au sommet d'un roc qui dominait le col.

Seule, livrée aux vents qui soufflaient à cette époque de l'année sur les sommets d'Echoriath, elle veillait patiemment.
Le bruit ne tarda pas à se rapprocher et lorsqu'elle aperçut enfin la petite silhouette qui montait l'animal, elle plissa les yeux sous la réflexion qui l'agitait.

La cavalière n'avait pas pu repérer la haute stature de la Dame plongée dans sa robe de brume. Elle avait les yeux rivés sur une gouttelette lancée à vive allure qui devançait son galop.

Mais Cassiopée avait déjà fermé les yeux pour réunir autour d'elle les souffles venteux. Elle lèva lentement le bras en direction de l'écuyère. Le vent s'enroula autour de son bras, puis de son avant-bras comme un serpent. Il fila vers Zalyna et la rafale vint siffler aux oreilles de la jeune fille, l'enveloppant elle et sa monture d'une bise méchante. Le tourbillon stoppa net la bête qui rua de peur, projetant Zalyna au sol. Secouée et cernée par la poussière soulevée, la fille ne tarda cependant pas à se relever alors que Cassiopée recevait la bulle d'eau dans sa main restée ouverte.


Cho

Onyx était immobile, il avait les yeux grands ouverts, alertes et sa respiration s'était accélérée... Il guettait...

Zalyna se releva et se frotta l'arrière train, pour évacuer la boue et soulager la douleur en même temps.
Elle s'approcha d'Onyx et lui chuchota quelque chose à l'oreille : l'animal se calma et baissa la tête...

Sans se retourner, elle s'exclama en direction de la présence qu'elle sentait dans son dos :

- Je dois trouver des réponses à mes questions ; et je ne trouverais ces réponses qu'en quittant ces Terres. Je le ressens, vous aussi êtes différente : après tout, jamais personne en dehors de moi n'avait réussi à perturber Onyx auparavant...

Zalyna passa sa main dans ses cheveux, d'un noir de jais, et remis plusieurs mèches en place, derrière son oreille droite. Elle ajouta :

- Si vous ne voulez pas m'aider dans cette quête, je comprendrais ; vous ne pouvez pas m'en vouloir d'avoir au moins essayé ...

Elle attendit une réponse, un souffle, un bruit, rien ne parvint à ses oreilles. Elle avait là sa réponse.
Elle ferma les yeux, résignée, et monta sur Onyx. Elle ébouriffa sa crinière, tendrement, de sa main droite ; puis avec sa main gauche elle attrapa les crins et les fit passer de droite à gauche. On pouvait maintenant voir une marque ressemblant vaguement à une spirale sur l'encolure de l'animal.
Zalyna recouvra la marque de sa main droite, et le même symbole apparut sur le dos de sa main. Ce dernier était presque invisible pourtant, mais s'illuminait d'une lueur bleutée chaque fois qu'elle posait sa main à cet endroit... Onyx émit un hénissement...

De la fumée noire apparut sur les flancs de l'étalon. Au fil des secondes, elle pris la forme d'ailes. Il était maintenant pressé de voler, ça faisait si longtemps ...
Avant l'envol, elle se tourna vers l'endroit où elle pensait que Cassiopée se trouvait, et dit :

- Ce fut un plaisir de vous rencontrer... J'espère à nouveau connaitre ce plaisir à l'avenir.
Dans le cas contraire, Adieu ma Dame...


Cassiopée ne bougeait plus. Elle était comme figée, les yeux toujours fixés sur ce qu'elle venait de voir... Ces marques... Elle ne les avait plus vue depuis longtemps. Elle regardait fixement Onyx, ce cheval ailé d'un noir de jais... d'un noir aussi profond que les cheveux de sa maîtresse... Il n'y avait aucun doute.

Onyx essaya de prendre son envol, sans succès. Le vent semblait à nouveau apprivoisé, comme pour les dissuader. Zalyna se tourna à nouveau et aperçut cette fois Cassiopée, redevenue visible. Elle lui sourit.


Cassiopée

Cassiopée lui rendit son sourire.

- Faut-il donc toujours que la magie attire la magie ? Faut-il que les auras s'attirent pour permettre que les pouvoirs se transcendent ?

Le sourire de Cassiopée s'évanouit. L'air, aussi lourd que le plomb pesait sur les corps.

- Je ne veux pas que la magie détruise encore une fois les âmes. Je ne veux plus voir le Sang couler...

Elle ferma les yeux. Sous le voile de ses paupières repassaient en boucle le ciel en flamme au dessus de Galvorn et le cri des dragons hurlant leur mort vrillaient ses oreilles. Cette souffrance indélébile l'envahissait chaque fois qu'elle se retrouvait seule fasse à elle-même.
Se dégageant de ses souvenirs d'un geste large, elle se rapprocha de Zalyna et caressa doucement les flancs d'Onyx.

- Il est beau, tu sais. Comment l'as-tu eu ?


Cho

Zalyna avait son regard fixé sur Cassiopée, elle semblait perdu dans ses pensées. Des pensées douloureuses, si elle croyait ce qu'elle venait d'entendre. La magie pouvait être à ce point destructrice ? C'était quelque chose que Zalyna avait du mal à concevoir. Et ce, même si elle conservait ces souvenirs-là...

Mais elle était ignorante après tout... Une ignorance qu'elle comptait bien combattre.

- Il est beau, tu sais. Comment l'as-tu eu ?

Zalyna sourit. Oh oui, elle le savait, il était pour elle l'être le plus beau qu'elle eut jamais rencontré, et qu'elle ne rencontrerait jamais, elle en était certaine. Elle avait cette impression depuis toujours qu'il était comme une partie d'elle-même...

- Je ne m'en souviens pas, malheureusement ... Dans mon plus lointain souvenir, il était déjà à mes côtés.

Un flot de souvenirs envahit Zalyna qui frissonna...
Cette terreur qu'elle avait ressentie lorsqu'elle était petite... enfermée dans cette cage de métal froid... Mourant de faim, et de soif...
Déjà à cette époque, Onyx était près d'elle. C'était là ses plus lointains souvenirs... Tout était si flou dans sa tête.

- Pour tout vous dire Cassiopée, je n'ai aucun souvenir d'avant mes 6 ans... Avant mon arrivée dans ces forêts, tout est assez flou dans ma tête... Je me souviens avoir vécu quelques temps, enfermée, avec Onyx... Et puis... je suis arrivée dans ses contrées.

Zalyna regardait fixement Cassiopée, comme si elle cherchait des réponses dans ses yeux.

- Avez-vous déjà vu ça auparavant ? Un lien aussi fort, voire... magique, entre un cheval et son cavalier ?
Un cheval né le même jour que ce dernier...


Cassiopée

- Ton animal est né le même jour que toi ? Tu dis ?
Le sens-tu toujours en toi ? Comme une autre partie de toi-même ou est-il dépendant de toi ?


Tout en parlant, Zalyna était descendue de sa monture. Aussi Cassiopée n'avait plus vraiment de raison de maintenir la pression sur l'animal.
Sa perception fine décelait la force derrière la douceur du pelage. La musculature de la bête n'avait d'égal que sa majesté.
La main claire de la Dame du Sang contrastait étrangement avec le pelage plus noir qu'une nuit sans lune. Les muscles s'agitaient sous sa caresse. Onyx tourna sa tête vers Cassiopée.
Lorsque leurs regards se croisèrent l'échange fut fulgurant et presque instantané. L'animal était entré en communication avec elle et elle avait ressenti au fond d'elle-même la supplique du cheval ailé pour qu'elle accepte la compagnie de Zalyna.

Cassiopée n'en avait pas envie. Elle avait trop à faire pour récupérer un équilibre décent sans avoir une fille sortie de nulle part dans les pattes. Pourtant, la prière avait été si pressante qu'elle ne pouvait pas refuser sans blesser l'animal fabuleux et sa partenaire.

- Tu souhaites venir avec moi, Zalyna, n'est-ce pas ?
Mais je ne suis pas une bonne compagne de route. Je ne sais même pas où je vais. Je ne sais même plus qui je suis.


Elle soupira puis reprit :

Peut-être que ta force et ta volonté consolideront ma raison d'être.


Cho

- Onyx est ... dépendant de moi. C'est assez difficile de placer des mots sur notre relation. Nous avons chacun notre personnalité, mais je sais que sans lui, je ne peux être entière...

Zalyna observa attentivement Cassiopée pendant qu'elle lui parlait. Elle semblait réticente à ce qu'elles voyagent ensemble.
Cependant, Zalyna désirait plus que tout commencer ce voyage avec elle, et elle ne sut dire pourquoi... Elle était attirée par cette Dame si mystérieuse. Elle avait l'impression qu'elle pouvait lui apporter autant que cette dernière pouvait le faire pour elle. Ce qu'elle pouvait lui apporter ? Elle n'aurait su le dire...

Le regard de Cassiopée changea tout à coup. Elle semblait plus hésitante, et Zalyna vit là une ouverture...

- Tu souhaites venir avec moi, Zalyna, n'est-ce pas ?
Mais je ne suis pas une bonne compagne de route. Je ne sais même pas où je vais. Je ne sais même plus qui je suis


Peut-être que ta force et ta volonté consolideront ma raison d'être.

Zalyna chercha le regard de Cassiopée. Lorsqu'elle l'eut, elle lui sourit. La Dame décela dans son regard de la chaleur, de la douceur mais aussi beaucoup de force. Elle lui rendit son sourire.

- Je ne vous dérangerais pas plus que nécessaire. Je suis de bonne compagnie et je sais me faire discrète si le besoin s'en fait ressentir.

Zalyna se tut quelques instants, chercha ses mots puis repris :

- Je pourrais partir seule, je m'en sens capable, mais j'ai ce sentiment que nous ne nous sommes pas rencontrées par hasard...
N'êtes-vous pas du même avis ?


Cassiopée

Cassiopée ne répondit pas à la question. Déjà, l'envie de reprendre la route la tourmentait à nouveau.
C'était un désir qui lui mordait les tripes et créait une faille monumentale dans l'Harmonie. Le chaos qu'il engendrait meurtrissait tout son être, et au delà d'elle un souvenir qu'elle n'arrivait plus à identifier.
Elle ressentait à tout moment une déchirure intérieure. Elle se sentait comme mutilée.

- Partons rapidement si tu veux m'accompagner. J'espère que tu ne seras pas déçue du voyage.

En disant ces mots, elle n'imaginait pas d'autre issue qu'un désintérêt probable. Pourtant, la jeune fille lui offrait un petit répit dans son désarroi.

Elles marchèrent la journée durant sans trop parler. Zalyna respectait le silence de la Dame. Cassiopée oubliait la présence de ses compagnons de voyage. Son esprit s'évadait au fil de la montée.
En effet, la marche devenait difficile sur le sentier escarpé qui longeait le val d'Hartreg. Plus qu'un val, il ressemblait à un profond ravin et les sabots d'Onyx glissaient souvent sur la caillasse et le sol abrupt.

Elles ne s'arrêtèrent pourtant qu'à la nuit tombée, alors que la nuit rendait dangereux de crapahuter sur le flanc de la montagne.

Leur campement fut vite installé sur un large replat rocheux surplombant la vallée obscure. Zalyna sortit une couverture des sacoches que portait son cheval et s’emmitoufla dedans alors que Cassiopée allumait un feu à leurs pieds.

- Comment faites-vous cela ? Demanda sa cadette.

Mais Cassiopée la regarda sans comprendre qu'elle venait d'allumer un feu à partir de presque rien. En remuant les lèvres. En bougeant les doigts. Par habitude, sans savoir ce qu'elle faisait vraiment.
Alors, parce qu'elle ne comprenait pas ce qui lui demandait Zalyna, elle évoqua un autre sujet.

- Tu vois Zalyna cette montagne qui nous surplombe ? On la nomme le mont d'Ich. Il paraît qu'à cet endroit vécut le plus ancien des élémentaux. Il ne reste plus de lui que son squelette enfoui sous les roches que le temps a déposées. C'est là que je suis appelée. Mais je ne sais pas pourquoi.


Cho

Zalyna était bien contente d'avoir son sac de couchage ainsi que le feu qu'avait créé Cassiopée, car cette nuit était particulièrement fraîche.
Onyx n'était jamais bien loin non plus, et son flanc lui procurait une chaleur sans égal.

- Tu vois Zalyna cette montagne qui nous surplombe ? On la nomme le mont d'Ich. Il paraît qu'à cet endroit vécut le plus ancien des élémentaux. Il ne reste plus de lui que son squelette enfoui sous les roches que le temps a déposées. C'est là que je suis appelée. Mais je ne sais pas pourquoi.

Zalyna fixait la montagne. Le plus ancien des élémentaux y avait vécu. Qu'était-il ? Ou plus exactement, qu'avait-il été ? Un être rattaché à un élément, sans doute... L'air, le feu, l'eau ? En tout cas, c'est ce que ce nom lui évoquait, mais elle ignorait tellement de choses.

Elle voulut poser la question à la Dame, mais s'abstint. Cassiopée s'était tue maintenant et semblait vouloir un peu de tranquillité. De toute façon, elle aurait bientôt réponse à sa question, étant donné que son guide comptait se rendre dans cette montagne.

En plein milieu de la nuit, Zalyna s'éveilla en sursaut, la respiration haletante. Elle regarda ses compagnons, ils ne semblèrent pas l'avoir remarquée, elle en fut soulagée.
Elle sortit de son sac de couchage et approcha d'une de ses sacoches. Elle en sortit un carnet, aux pages jaunies par le temps. Elle l'enfouit dans une de ses poches, enfila un survêtement et s'éloigna à pas feutrés du campement.

Elle marcha une dixaine de minutes, et une fois qu'elle s'était assurée de s'être assez éloignée des sens des autres, elle s'assit sur une souche d'arbre et ressortit le carnet de sa poche, qu'elle feuilleta.

Comme Onyx, elle avait toujours eu ce petit livre sans se souvenir d'où il provenait exactement. Il contenait des écritures manuscrites, et elle l'avait assez parcouru pour savoir qu'il ne contenait aucune information sur son auteur. Malgré tout, il lui avait permis d'appréhender un peu la magie. Sans lui, elle n'aurait jamais appris comment il lui était possible de retrouver la trace de quelqu'un à partir d'un objet lui appartenant.
Elle ignorait encore beaucoup de choses cependant, et ce livre contenait pas mal de sorts et d'incantations qui ne semblaient pas, pour l'instant, à sa portée.

Elle chercha parmi les pages le moyen de faire un feu, elle ne trouva rien correspondant à ce qu'elle avait vu la veille au soir. Déçue, elle se releva et retourna vers le campement.
Elle marchait depuis cinq minutes environ, lorsqu'elle sentit une vague glacée... Elle eut si froid, si vite, qu'elle sut que ce n'était pas naturel... Elle regarda autour d'elle, paniquée, lorsqu'elle aperçut une ombre, à quelques mètres d'elle...

-Q-qui ê-êtes v-v-vous ... ? dit-elle, en claquant des dents.

Elle voulut s'en approcher, mais après avoir fait un pas, elle s'évanouit...


Cassiopée

Cassiopée s'était réveillée avec les premières lueurs de l'aube. Une brume rosée auréolait le mont d'Ich et dégoulinait de nuages sur ses pentes. L'humidité imprégnait tous les êtres vivants et le feu s'était éteint pendant la nuit. Le feu fut donc la première chose que Cassiopée fit renaître lorsqu'elle se leva. La seconde fut de chercher Zalyna qui avait déjà quitté les flancs chaleureux d'Onyx. La jeune fille avait sans doute été cueillir quelques baies ou chasser avant leur départ.

Elle soufflait sur le feu quand les naseaux d'Onyx lui poussèrent le bras, elle tourna la tête vers l'animal et rencontra ses yeux. Aussitôt un lourd sentiment d'inquiétude l'envahit. Elle décida donc de partir à la recherche de sa jeune compagne maudissant intérieurement les complications.

Elle partit d'abord le long du sentier en cherchant à droite et à gauche pour voir si elle apercevait la tignasse noire de la jeune fille. Puis elle revint sur ses pas et cette fois examina les traces laissées par Zalyna.
Elle repéra celles qui quittaient leur campement. Elles montaient sur le versant, écrasant fortement la maigre végétation sous l'effort. Il n'était donc pas difficile de les suivre. Cassiopée repéra sans peine l'arrêt effectué avant de poursuivre vers un retour au campement. C'est en route qu'elle perdit toute trace d'empreinte. Elles disparaissaient brutalement sous l'effet d'une masse.
Après quelques recherches infructueuses dans les alentours, elle revint au campement, éteignit le feu qui n'aimait pas la solitude, et détacha Onyx.

Le fait que Zalyna ait pu disparaître sans laisser de traces, en abandonnant une partie d'elle-même avait de quoi l'inquiéter et elle nourrissait à présent la même angoisse que celle révélée par le cheval de Jais.

- Qu'en penses-tu, Onyx ? Tu sais où elle a pu passer ?

Les yeux du cheval dansèrent dans ceux de la Dame des étoiles. Elle ferma les yeux, cherchant à en comprendre le sens.
En soupirant, elle prit la longe à la main, tapota le cheval pour l'encourager à avancer et entama la dernière montée avant d'arriver au sommet.


Cho

Zalyna gesticulait. Elle essayait vainement de défaire les liens qui encerclaient ses poignets.
L'endroit où elle était confinée était sombre. Tellement sombre qu'elle ne vit pas grand chose autour d'elle. Elle sentait la roche, humide et froide, derrière elle. Elle s'adossa à cette dernière et chercha avec ses mains liées une excoriation dans la pierre qui serait assez tranchante pour lui mettre de récupérer tous ses mouvements.
Elle en trouva une, à quelques dizaines de centimètres sur sa droite et se dandina. Elle frotta la corde dessus, essayant de l'entamer, rien n'y fit.

Elle baissa la tête et réfléchit. Qui donc l'avait emmenée ici ? Et où se trouvait-elle d'ailleurs ? Une grotte ? Un souterrain ? Elle n'aurait su le dire. En tout cas, elle avait déjà réussi à se mettre dans le pétrin, et avec une rapidité déconcertante : elle venait à peine de commencer son voyage !

Elle recommença à frotter ses poignets contre le mur lorsqu'elle entendit des bruits de pas qui résonnaient à travers les parois de pierre froide...
Une silhouette passa non loin d'elle. Elle aperçut un rai de lumière, qui provenait probablement d'une torche. Les pas s'éloignèrent et l'endroit fut à nouveau plongé dans l'obscurité. Elle était toujours figée, lorsqu'elle entendit des voix, provenant de l'endroit où avait disparu la lumière.

- Dis Gaston, tu veux bien m'faire plaisir, 'rête un peu de partir à tout bout d'champs comm'ça là !
J'aime pas êt'tout seul ! Et s'il revient ?


- Arrête de t'angoisser comme ça... Pense plutôt au pactole qu'on va se faire quand tout ça sera terminé !

- Ouaip, j'sais bien. Mais quand même, il m'donne des frissons l'bonhomme ! Et c'te fille, qu'est-ce qu'il peut bien lui vouloir ? Hein ?

- On s'en fiche. Tiens, je l'entends justement...

Tout à coup, Zalyna ressentit cette vague de froid. La même qu'elle avait ressentie avant de s'évanouir.
Elle entendit, soudain, un cri affolé, auquel suivi le bruit d'une lame tranchant la matière...

- Mais mais mais ... Pou ... Pourquoiiii ??????!!!! Arrêtez, ARRETEZ, je vous en SUPPLIE !
NOOOOOOOOOOOOOOOOOOON ... eurk...


Zalyna avait son coeur qui palpitait. D'après ce qu'elle venait d'entendre, l'homme venait de blesser (tuer ?) ses complices...
Si elle devait agir c'était maintenant ou jamais. Sinon elle mourrait, ou pire... Elle ne pouvait mourir, pas déjà maintenant !
Elle avait l'impression que son cerveau bouillonnait, mais était incapable de réfléchir à quoi que ce soit. La marque sur sa main s'était illuminée, et la brûlait...

Puis tout à coup, ses cordes se délièrent... Elle se leva d'un bond, et s'engouffra dans le tunnel dans la direction opposée d'où elle avait entendu les voix quelques instants plus tôt.
Elle se sentait suivie. Il allait vite. Trop vite.

Il fallait tenter le tout pour le tout, elle s'arrêta net, regarda les parois autour d'elle, y plaça ses mains et ses dernières volèrent en éclat. Elle savait qu'elle y arriverait, même si elle n'aurait su expliquer comment, ni pourquoi.
Les débris de pierre s'étaient accumulés et bouchaient à présent le tunnel derrière elle. Elle se remit à courir en direction de la sortie.

Lorsqu'elle vit la lumière, elle s'engouffra dans l'ouverture et heurta un cheval de plein fouet..
Elle leva la tête et aperçut Onyx. A quelques pas de lui, se trouvait Cassiopée.

- Il ne faut pas rester ici ! J'ai été enlevée, je ne sais pas qui était cet... homme... Fuyons, vite ! Je ne veux pas que vous courriez de risque vous aussi !


Cassiopée

Onyx avait mené Cassiopée jusqu'à la caverne qui renfermait Zalyna. Le cheval connaissait le chemin pour rejoindre sa partenaire. Il n'avait qu'à se laisser guider par son instinct.
Pourtant en arrivant devant l'entrée de la grotte, l'esprit de Cassiopée se révulsa. Elle sentait un pouvoir glacé dans l'ombre qui s'ouvrait devant eux. Craignant d'être vite repérés par celui-ci, elle couvrit Onyx et elle-même de l'aura d'Orion. Orion était son protecteur, sorte de père reclus qui ne savait faire que cela, l'aider dans les moments où elle risquait sa vie. La bulle invisible formait un arc de force autour d'eux.
Téméraires, ils pénétrèrent l'ombre dense. Tout était sombre et seule la lumière diffuse de l'entrée de la grotte éclairait très faiblement leurs premiers pas dans l'antre. Plus ils s'enfonçaient, plus le noir les cernait.
C'est alors qu'ils entendirent les bruits d'une course et des fracas de pierres. Accélérant l'allure, Onyx percuta son amie qui les incitait avec force à fuir l'endroit.

Mais il était déjà trop tard. Le froid les avait rattrapé. Cassiopée n'eut que le temps d'envelopper Zalyna dans l'aura d'Orion. Une vague glacée les submergea sans pourtant les atteindre sous la coque stellaire qui les maintenait à l'abri.
Mais il fallait répondre vite avant que l'être sache trouver la riposte à cette protection.
Aussi Cassiopée puisa sous ses pieds l'énergie du noyau terrestre, chargeant son pouvoir du feu de la terre qui grandissait en elle. Son aura se mit à briller d'abord, puis à brûler d'un feu si violent qu'il en devenait liquide. La vague de froid reculait devant cet ennemi.


Cho

La vague de froid avait reculé grâce à Cassiopée. Il ne fallait pas cependant traîner plus longtemps dans les parages, Zalyna le sentait...

Cette dernière s'approcha d'Onyx et plaça sa main sur son encolure. Grâce à leur étrange pouvoir, le cheval put déployer ses ailes, semblables à des flammes noires.
Zalyna grimpa sur son dos et tendit sa main gauche à Cassiopée.

- Montez, il nous conduira en lieu sûr.

La Dame sembla hésitante, mais finit par prendre place derrière la demoiselle.
Onyx s'avança jusqu'à l'entrée de la grotte, pris son élan et s'envola...

La sensation était étrange. Jamais auparavant une autre personne qu'elle n'était monté sur le dos d'Onyx. En outre, elle avait toujours évité de trop voler avec sa monture, de peur de se faire repérer et de risquer d'avoir des ennuis. Pourtant, il était clair qu'elle adorait ça, et c'était aussi naturel pour elle que de respirer l'air.
Elle tourna la tête vers Cassiopée, et fut à moitié rassurée : elle semblait tout à fait à l'aise sur l'animal en plein vol, et ce, même si elles montaient Onyx à cru ; cependant elle était visiblement préoccupée.

- Je ne connais pas grand chose de ce monde, vous si. Connaissez-vous cette créature ? Est-elle humaine ?

Zalyna ne voulait pas l'assaillir de questions, mais c'était plus fort qu'elle. De plus, elle avait ce pressentiment que la "chose" l'avait enlevée pour une raison certaine.

- Elle ne m'a pas enlevée par hasard, n'est-ce pas ?

Cassiopée la regarda en silence. La jeune fille aux cheveux de jais était encore si innocente. Que fallait-il dire ? Ou taire ?


Cassiopée

La sensation étrange de retrouver un monde connu. Cassiopée survolait les monts de l'Orgueil. Les sommets surgissaient des nuages comme les aiguilles tranchantes d'une lame de scie.
La beauté du lieu n'avait d'égal que celui du vol du cheval. Ses ailes battaient lentement avec ampleur. Onyx se mit à planer rendant ainsi au monde aérien sa pureté silencieuse.

Elle n'osait exprimer à Zalyna ce que lui évoquait la couleur de jaie qui s'abattait sur son univers lumineux. Tout ceci était pourtant ancré bien solidement dans les profondeurs de la Terre et n'aurait jamais dû faire surface. Elle pouvait à peine y croire. Mais le Givre avait surgi et avec lui une vague de souvenirs avait soulevé un voile de sa mémoire.

Cassiopée n'arrivait pas à se rappeler ce qui meurtrissait le vivant. Son credo était d'oublier pour le bien de l'Humanité. Lorsque ses souvenirs venaient en surface, c'est qu'un danger guettait ou que son éducation était en branle.

Qu'en était-il aujourd'hui ?

Alors que son esprit tendait à se perdre en conjonctures, Zalyna l'interrogeait, alors elle tenta une réponse :

- Tu ne connais rien de toi, Zalyna, mais la brume noire qui nous suit est une poussière issue des temps immémoriaux, tout comme l'être que nous venons de rencontrer. Le mieux serait de ne plus t'en approcher à moins que tu ne souhaites savoir ce que tu es. Dans tous les cas, tu dois d'abord te fortifier. Tout comme moi d'ailleurs...

Verrouillé
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Message posté le 09:29 - 10 nov. 2015

Zalyna demeura un long moment silencieuse. Elle était perdue dans ses pensées et ne cessait de se remémorer les paroles de la Dame...

Ne plus s'approcher de cet endroit ? Impossible. Surtout si les dires de Cassiopée étaient avérés. Elle désirait plus que tout au monde en apprendre plus sur elle, savoir d'où elle venait. Cet être, si sombre et froid, détenait-il toutes ses réponses ? C'était inconcevable pour elle. Et pourtant... Elle avait confiance en Cassiopée. Et elle n'aurait su dire pourquoi.
Inconcevable... Pourquoi ? Elle ne se sentait d'aucune familiarité avec un être aussi froid et aussi sombre... Et il pourrait détenir des informations cruciales ?

L'obscurité en soi, elle pouvait comprendre. Après tout ils avaient tous deux, Onyx et elle, une part de ténèbres dans leurs coeurs. L'image de la cage lui revint en mémoire. Elle frissonna.

Elle secoua la tête. Une chose était, cependant, certaine. Elle se devait de devenir plus forte, pour ses compagnons et pour elle. Elle ne voulait ni être dépendante des deux autres, ni être un fardeau...
Elle avait la chance d'entreprendre ce voyage, il lui fallait mettre dorénavant toutes les chances de son côté.

Elle prit sa décision.

- Ma Dame, vous savez que je désire plus que tout en apprendre plus... Mais vous avez raison...

Elle inspira profondément.

- Je ne veux pas être un fardeau, apprenez moi... Je vous en supplie.

Onyx se mit à hennir d'approbation.

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Message posté le 21:10 - 16 nov. 2015

Onyx volait en altitude, bien plus haut que les plus hauts sommets des monts pâles. Il se dirigeait vers le Sud, mais les montagnes paraissaient ne jamais finir.
Le froid avait enveloppé les deux silhouettes blotties l'une contre l'autre et Cassiopée n'avait trouvé d'autre ressource que d'élever un peu la température des grelons qui les atteignaient. La fusillade se transformait en pluie diluvienne à leur proximité si bien qu'elles étaient toutes deux trempées.
Elle n'avait rien répondu à Zalyna. Le silence s'était installé, faisant place à la réflexion. Une lente et longue cogitation dans laquelle se mêlait son désir de suivre son fort intérieur et le souhait de ne pas abandonner sa jeune protégée.

Les bois de Cendreval commençaient à pointer leur cimes persistantes. Elle rompit leur mutisme mutuel.

- Si tu veux apprendre, Zalyna, je dois d'abord savoir qui tu es. Ta partie sombre peut être dangereuse pour nous deux. Mais pour cela, nous devons trouver de l'aide.
Je crois que L'Obsidienne pourrait nous apporter un éclairage. Mais la Grande Marcheuse est en chemin... Et je n'ai aucune idée du lieu où elle se trouve aujourd'hui....
Pour le moment, je n'ai que cette proposition à te faire. Si tu es disposée à réellement connaître tes racines, je ne vois que cette solution.

Alors qu'elle prononçait ces mots, elle regrettait déjà sa solitude qui lui permettait de suivre dans l'inconscience totale un chemin qui lui semblait tracé. Mais était-ce le bon chemin ? Que cherchait-elle vraiment ? Elle n'en savait même rien.


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Message posté le 22:20 - 18 nov. 2015

Ces bois lui avaient manqué plus qu'elle ne l'aurait imaginé. Elle marchait doucement entre les arbres, faisant craquer des brindilles sous ses pieds.
Elle allait repartir bientôt. Elle finirait par obtenir des réponses à toutes ses questions.

Tout en marchant elle guettait un bruit de sabot, un battement d'aile... Elle avait tenu à ce qu'Onyx accompagne Cassiopée. La Dame n'avait pas voulu, mais Zalyna avait insisté. C'était peut-être futile, elle était capable de s'en sortir seule, mais savoir qu'Onyx la conduisait à une route sûre en dehors de ces bois la rassurait.
Elle profitait ainsi de quelques instants seules avec ses pensées. Seule face à ses choix, ses réflexions et son avenir.
Elle avait écouté son cheval, elle connaissait le chemin qu'il voulait emprunter. Mais qu'en était-il d'elle ? Etait-elle prête à partir pour une si longue aventure ?
Cassiopée avait évoqué sa noirceur. Etait-elle prête à y être confrontée ? L'inconnu l'attendait de pied ferme.

Elle connaissait bien évidemment déjà la réponse, Onyx et elle avaient toujours eu une pensée commune. Leurs chemins et leurs envies s'entremêlaient toujours. Leur lien était magique et surréaliste. Leur origine passait par l'explication de ce lien. Ils devaient savoir. Ils devaient partir, quoi qu'il en coûte.
En effet, elle connaissait la réponse depuis un moment maintenant, mais ça lui faisait beaucoup de bien de remettre toutes ses pensées en ordre.
Cet endroit allait lui manquer, c'était certain. Mais elle était forte, elle reviendrait. Elle se fit la promesse de revenir humer le doux parfum de ces forêts. Ses origines l'avaient conduite ici lorsqu'elle avait à peine 6 ans. Elle finirait par y revenir, elle en était persuadée.

Elle arriva enfin devant le cabanon de Gareth. Onyx n'allait pas tarder à revenir, elle alla lui ouvrir l'annexe, pour qu'il puisse s'y reposer.
Elle inspira profondément et entra après avoir frappé doucement contre la porte.
Elle allait partir, elle ne savait pas quand elle pourrait revenir mais elle devait le faire. Elle devait partir à la découverte de ses origines. Elle devait tout expliquer à Gareth.

Il lui sourit. Elle avança et l'enlaça.
Enfin, elle s'assit près de lui et commença son récit...


__________ FIN __________



Verrouillé
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