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Chapitre II : Champs de Lothsithi

La suite du Roman de Lothindil

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14 nov. 2015 - 21:27

Le premier chapitre est ici

Première tentative d'instant puissant au niveau symbolique.

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C’est ainsi que fut prise la décision de quitter définitivement Cyniar. Nous avions convenu de partir trois jours plus tard, à l’aube, le temps de préparer nos affaires respectives ; le temps surtout pour moi de prévenir Héramë, le père de Lothindil. N’ayant que peu d’argent en réserve, nous avons décidé de partir à cheval jusqu’à la capitale et de là, prendre un aynore vers Kendra Kâr.
Les quelques jours de voyage depuis notre cabane dans la forêt royale se passèrent, bien sûr, sans encombre. Lothindil nous fit juste faire un détour par le champ de Lothsithi. Ce champ est ce qui se rapproche le plus, chez vous, des cimetières. Ici se reposent les elfes qui ont cessé de vivre, debout dans la terre, comme de leur vivant. Au-dessus d’eux est plantée une Lothsithi, une fleur de Lune. Cette fleur permet à leur âme de sortir et de rejoindre les étoiles.


*****


Le soleil était à son zénith quand nous sommes arrivés au champ de Lothsithi. Bien qu’étant un espace naturel et ouvert, il nous était interdit de nous en approcher avant le coucher du soleil. Cela faisait partie des nombreux interdits du Sithisme, la religion unique du peuple Sindel. Le Sithisme vénère Sithi, une déesse incarnée dans ce monde par la Lune, protectrice et créatrice des elfes gris. Les légendes veulent qu’elle se soit sacrifiée pour permettre au peuple Sindel, ses enfants, de fuir leur ancien monde, « Eden ». C’est une religion extrêmement complexe, même pour quelqu’un y ayant toujours vécu, elle compte une quantité phénoménale de rites, de règles et de dogmes qu’il faut apprendre et respecter. Le respect des morts et des champs de Lothsithi en font partis, bien sûr. Nous avons donc attendu, avec d’autres familles, que Sithi veuille bien apparaître dans le ciel et que le soleil disparaisse.

C’est sous une lune presque pleine que nous avons pu nous faufiler entre les fleurs, évitant d’en heurter ou d’en écraser une, ce qui serait un sacrilège. Les pétales gris argentés, soumis à la pâle lumière sélène dont ils tirent leur énergie, brillaient. Contrairement aux autres plantes qui ont besoin de soleil, les Lothsithi ne fleurissent que la nuit. Leur corolle est gris terne les nuits noires, mais semble produire une douce lueur bleutée légère quand elle est nimbée de la lumière nocturne. C’est une fleur tellement étrange avec ses pollens qui, au moindre coup de vent, se dispersent comme de la poussière de fée lumineuse.

Je suivais donc Lothindil à travers les tombes. Elle en cherchait une précisément, une seule parmi des milliers : la tombe de Saryä, sa sœur aînée. Saryä était une elfe que je n’ai pas connu, car elle est morte, noyée, peu avant mon éveil. Sa mort bien qu’accidentelle, a traumatisé Lothindil, à tel point que ce jour-là, j’ignorais toujours exactement ce qui les reliait, car elle refusait d’en parler, évoquant juste une mort injuste.

Une fois trouvée, elle vint s’agenouiller à côté de la fleur et se lança dans une longue et lente mélopée. Je restais en retrait, assise et tête baissée. Contrairement aux elfes, nous autres aniathys n’avions pas le droit de prier, d’invoquer ou d’évoquer les disparus, de nous recueillir sur les tombes ; les prêtres de Sithi considéraient que n’avons pas d’âme et par la même, pas la possibilité de croire véritablement dans une Divinité, quelle qu’elle soit. Nous n’étions que des témoins étrangers à ces mystères, ne pouvant pas les partager.

Je la laissais donc faire, ne parvenant pas à saisir pourquoi elle souhaitait tellement ce détour. Les morts ne sont-ils pas simplement morts pour qu’on veuille les prier, leur demander de veiller sur nous ? Pourquoi implorer une divinité de les protéger et de les accueillir eux, alors que ceux qui restent sont ceux qui souffrent encore et encore ? Toujours est-il que le chant de Lothindil dépassait ces simples incantations, il s’agissait d’un autre rituel, dont j’avais entendu parler sans jamais le voir ni l’entendre : celui d’invocation du mort. Loin des sorts de nécromancie dont certaines personnes savaient faire usage, l’objectif semblait être d’implorer l’âme de la personne de venir auprès de nous, mortels, pour un temps court. C’était sans doute pour une aniathy comme moi, le rituel le plus étrange et le plus mystique, où la seule question est à quoi ça sert ? Je l’ignorais encore, mais ce jour-là, j’ai eu un aperçu de la réponse.

Du fourreau de sa ceinture, Lothindil sortit un poignard. Elle le posa près de la fleur sans cesser de chanter. Après quelques minutes de mélopée, elle le prit et coupa une des feuilles de la Lothsithi, dans le sens de la longueur, pour en faire couler une douce sève, transparente, mais brillante à la fois, comme une larme sous la lumière. Puis elle tourna sa main gauche vers la lune, paume grand ouverte et d’un geste rapide, se la trancha, le long de la ligne principale, celle qui court depuis le pouce jusqu’au petit doigt. Le sang coula, bien sûr, rouge tandis que la chanson d’invocation finissait. Elle serra alors le poing jusqu’à ce que son liquide vital vienne tomber en gouttes sur la feuille coupée, mélangeant le sang et la sève.

« Saryä, ma sœur. Vois ce sang qui coule et se mêle à la sève. »

Lothindil était profondément émue, sa voix tremblait et des larmes devaient couler de ses beaux yeux bleus. Cependant, son timbre était étrange, il résonnait plus puissamment que jamais, même si les mots n’étaient que murmurés. Tout mon être en était chamboulé, la magie qui était à l’œuvre ce jour-là dépassait les connaissances des mages sur les éléments.

« Ce sang est ton sang, celui que tu as versé pour que je puisse vivre jusqu’à ce jour. Sache que ton sacrifice ne sera jamais vain, puisque je vivrais en ton nom. Par ton sang versé il y a cent ans et par mon sang versé cette nuit, je te promets de vivre libre, comme tu l’aurais voulu, de suivre mon destin pour lequel tu es partie. Mon histoire me conduit loin de nos terres que tu as aimées, sur les terres barbares où règnent le chaos et la guerre. Pour toi ma sœur, je me battrais ; pour rendre hommage à ta mort et à ta vie, je lutterais à mort pour la vie. Entends cette nuit mes paroles, emporte-les dans les étoiles avec toi, que je ne puisse jamais les retirer et que, chaque nuit, les étoiles puissent me les souffler quand mon cœur les aura oubliées. »

Une longue minute de silence suivit ces paroles, juste coupée par une brise qui fit s’agiter les fleurs, comme un assentiment au serment prononcé. C’est ainsi que j’appris une part infime du lien entre mon elfe et sa sœur, ces phrases résonnaient en moi comme l’écho d’un passé qu’il aurait mieux valu que j’ignore. L’instant, ou la magie des lieux je l’ignore, gravait en moi le moindre des mots prononcés ce jour-là. Il me faudrait désormais être le témoin et le garant de cette promesse, je sentais dès ce moment qu’il me faudrait lutter pour y arriver. Murmurant pour ne pas briser l’instant, moi aussi je posai alors un serment :

« Je n’ai point de sang à verser, point de larmes à faire couler, point de dieux à qui m’adresser, mais si quelqu’un entend ces mots qu’il les retienne pour mes les rappeler si je les oublie. Désormais je lutterais à jamais pour que Lothindil puisse vivre et pour que vivent à jamais ses rêves et ses espoirs, ses doutes et ses craintes. Je la suivrais, partout, au péril de ma vie et de mon âme. Si je n’ai pas le droit d’avoir un Dieu, alors je croirais toujours en sa vie à elle et ne cesserait de me battre pour qu’elle existe. »


Lothindil se tourna vers moi, le visage fermé, mais un léger sourire sur les lèvres. M’avait-elle entendu ? Je ne le sus jamais. Elle se leva, rangea son poignard encore ensanglanté et quitta le champ, toujours sans prononcé un mot. Ce n’est qu’une fois sortie de la zone dédiée aux disparus, qu’elle se décida à me laisser la soigner, avant de remonter à cheval pour galoper toute la nuit, comme si elle avait la mort à ses trousses.

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Message posté le 21:55 - 14 nov. 2015

Leur corolle est gris terne les nuits noires, mais semble produire une douce lueur bleutée légère quand elle est nimbée de la lumière nocturne.
Le "légère" est de trop ici.



C’est une fleur tellement étrange avec ses pollens qui, au moindre coup de vent, se dispersent comme de la poussière de fée lumineuse.

La tournure de cette phrase me gêne. Je pense que le "tellement" est de trop, et j'aurai simplement dit "son pollen".

Sa mort bien qu’accidentelle, a traumatisé Lothindil, à tel point que ce jour-là, j’ignorais toujours exactement ce qui les reliait, car elle refusait d’en parler, évoquant juste une mort injuste.
Répétition. "simplement une mort injuste"

Puis elle tourna sa main gauche vers la lune, paume grand ouverte et d’un geste rapide, se la trancha, le long de la ligne principale, celle qui court depuis le pouce jusqu’au petit doigt.
Ils n'ont pas les mêmes lignes que nous? Moi je n'ai pas de ligne qui va du pouce au petit doigt...


Lothindil était profondément émue, sa voix tremblait et des larmes devaient couler de ses beaux yeux bleus.
pourquoi "devaient"? Pourquoi pas simplement "coulaient"?


Cependant, son timbre était étrange, il résonnait plus puissamment que jamais, même si les mots n’étaient que murmurés. Tout mon être en était chamboulé, la magie qui était à l’œuvre ce jour-là dépassait les connaissances des mages sur les éléments.
ce paragraphe mérite d'être retravaillé aussi je trouve. Augmente le contraste, fait ressentir cette puissance. Pourquoi est-elle chamboulée? Qu'est-ce qu'elle ressent exactement?

Pour toi ma sœur, je me battrais ; pour rendre hommage à ta mort et à ta vie, je lutterais à mort pour la vie. Entends cette nuit mes paroles, emporte-les dans les étoiles avec toi, que je ne puisse jamais les retirer et que, chaque nuit, les étoiles puissent me les souffler quand mon cœur les aura oubliées. »
J'aime beaucoup ce passage, particulièrement la formule avec la mort et la vie.


« Je n’ai point de sang à verser, point de larmes à faire couler, point de dieux à qui m’adresser, mais si quelqu’un entend ces mots qu’il les retienne pour mes les rappeler si je les oublie. Désormais je lutterais à jamais pour que Lothindil puisse vivre et pour que vivent à jamais ses rêves et ses espoirs, ses doutes et ses craintes.
La formulation me semble maladroite.

Je la suivrais, partout, au péril de ma vie et de mon âme. Si je n’ai pas le droit d’avoir un Dieu, alors je croirais toujours en sa vie à elle et ne cesserait de me battre pour qu’elle existe. »
Je croyais qu'elle n'avait pas d'âme?


Lothindil se tourna vers moi, le visage fermé, mais un léger sourire sur les lèvres. M’avait-elle entendu ? Je ne le sus jamais. Elle se leva, rangea son poignard encore ensanglanté et quitta le champ, toujours sans prononcé un mot. Ce n’est qu’une fois sortie de la zone dédiée aux disparus, qu’elle se décida à me laisser la soigner, avant de remonter à cheval pour galoper toute la nuit, comme si elle avait la mort à ses trousses.
Prononcer


C'est pas mal, les éléments sont là. Encore une fois, on comprend bien l'histoire, rien n'est flou, on n'est jamais perdu. Quelques maladresses ou éléments à revoir pour renforcer le caractère sacré-mystique du moment à mon avis.

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